Maison Côté Sud

À L’EST D’ÉDEN

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Depuis East Beach, le regard suit la crête des

montagnes, rebondit sur la frise de palmiers un étage plus bas, termine son voyage dans les corolles des « griffes de sorcière » lancées à l’assaut de la plage. Et c’est ainsi, en suivant la plage, que l’on arrive à Montecito, où de nombreuses célébrités possèdent un pied-à-terre, où Charlie Chaplin épousa Oona O’neill, où les Kennedy vinrent en voyage de noce, où vous croiserez peutêtre Jeff Bridges ou l’écrivain T. C. Boyle au pied des falaises dorées de Butterfly Beach, à l’heure où les gens joggent et où les aigrettes prennent des bains de pieds. En 1887, quand les voies ferrées relièrent enfin Santa Barbara à Los Angeles, les premiers touristes vinrent en train prendre les eaux à Montecito. Bientôt rejoints par la grande bourgeoisi­e et l’aristocrat­ie, qui prirent d’assaut les premiers palaces quand la Grande Guerre les coupa du Vieux Continent, où elles avaient leurs habitudes. La plupart étaient de grands propriétai­res terriens, des entreprene­urs, des décideurs ; il ne leur fallut pas longtemps pour recréer une riviera sur les rives du Pacifique. Nombre d’entre eux firent bâtir à Montecito des castels ou des villas, qu’ils dotèrent de noms exotiques – Sotto Il Monte, Casa Bienvenida, El Descanso… – et de jardins méditerran­éens. La Casa del Herrero de George Steedman, construite en 1925 par l’architecte George Washington Smith, en est l’exemple parfait. Mais la médaille du mérite horticole va sans hésitation à Ganna Walska, ex-cantatrice, jet-setteuse, croqueuse d’hommes et de diamants. Devenue jardinière-visionnair­e de Lotusland, elle passa quarante-trois ans de sa vie à agencer ses jardins de cycas, d’aloès, d’euphorbes, de bromélias ou de cactées. Le résultat ? Un « nirvana botanique » qui laisse pantois. À Ojai, oasis nichée dans les collines voisines, Bertolt Brecht, Thomas Mann, Stravinsky, Greta Garbo ou son ami Aldous Huxley vinrent, dès les années 1930, entendre les enseigneme­nts de Jiddu Krishnamur­ti. Nul doute que vous trouverez quelque récit de l’époque chez Bart’s Books, qui incarne depuis cinquante ans l’esprit non-conformist­e d’ojai. Pleine de trésors, éditions rares ou livres d’occasion à deux dollars, c’est la plus grande librairie indépendan­te de plein air des États-unis. Chez Caravan Outpost, c’est la cuisine qu’on fait en plein air, sur un feu de camp et avec une batterie de poêles en fonte. Doté d’une boutique hippie-chic, le camp ne fait pas vraiment dans la contre-culture… mais on passe un bon moment dans ses caravanes Airstream à l’ombre des palmiers.

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