EMPREINTES VÉGÉTALES
Gabrielle de Lassus Saint-geniès collectionne les plantes et fixe leur âme grâce au cyanotype.
Fougère, bleuet, laurier ou millepertuis… Gabrielle de Lassus Saint-geniès collectionne les plantes et fixe leur âme sur papier grâce à l’art du cyanotype. Promenade onirique et méditation sur la biodiversité, son Herbier d’azur s’expose à l’abbaye Saint-andré de Villeneuve-lès-avignon.
Poétesse, photographe, passionnée de botanique et d’histoire de l’art, Gabrielle de Lassus Saint-geniès embrasse ses multiples expériences créatives comme un mode de vie. Elle se fait connaître en 2017 pour son recueil de poésie Hortus Conclusus, les litanies du jardin, composé de plus de 650 quatrains dédiés à des végétaux et préfacé par le parfumeur Jean-paul Guerlain. Mais c’est au cours de l’écriture de son premier roman, L’anglaise d’azur, consacré à la botaniste Anna Atkins, que la jeune écrivaine se lance en autodidacte dans l’art du cyanotype. Fille du grand chimiste britannique John George Children, Anna Atkins, pionnière de la photographie, réalisa plus de mille cyanotypes. Pour comprendre la démarche de son héroïne, Gabrielle de Lassus Saint-geniès se met à étudier cette technique de photographie alternative. La cyanotypie est une savante alchimie, résultant de l’action de la lumière autour d’un objet posé sur un papier imprégné de composés chimiques photosensibles. Après un temps de solarisation, de rinçage et de séchage, l’épreuve originelle se transforme en un tirage unique, blanc à fond bleu cyan. Restituant de façon précise silhouettes et textures, le cyanotype est un « piège céleste », permettant de capturer l’âme des plantes et de la fixer dans le grain du papier. Dès lors, écumant talus et chemins, Gabrielle de
Lassus Saint-geniès se livre à une quête passionnée : fougères, ombellifères, lupins, avoine folle, millet des oiseaux… sont collectés et immortalisés dans les photogrammes indigo, constituant peu à peu son fabuleux Herbier d’azur, où la beauté du monde se reflète en négatif. « Quoi de plus mystique comme expérience que de travailler avec les quatre éléments pour partenaires artistiques : la Terre m’offre ses plantes, le Soleil me prête son Feu, l’eau baigne mes épreuves et l’air est le grand maître du séchage ! Et que fait la main de la poétesse ? Elle ordonne, guide et soumet les éléments en leur obéissant », explique Gabrielle de Lassus SaintGeniès. Cet herbier, où se mêlent la jubilation de l’artiste et la rigueur du naturaliste, va aussi puiser aux sources de la mythologie et de l’imaginaire littéraire. Égrainant graminées et autres astéracées des chemins, il laisse parfois apparaître quelques plumes de paon ou quelques dentelles anciennes à l’architecture végétale… Ode mystique à la biodiversité, célébration d’une nature surnaturelle, le vagabondage botanique de Gabrielle de Lassus Saint-geniès nous fait appréhender la multiple splendeur du « créé ». Et entrevoir, dans chaque brin d’herbe, une empreinte divine. Herbier d’azur est à découvrir jusqu’au 28 avril 2019 à l’abbaye Saint-andré, fort Saint-andré, rue Montée-duFort, 30400 Villeneuve-lès-avignon.