Maison Côté Sud

ÉLOGE DE L’IMPERFECTI­ON

- PAR Marie-hélène Balivet

Esthétique de la modestie, le wabi-sabi nous reconnecte à la nature et célèbre la valeur du temps.

TANDIS QU’UNE ASPIRATION À PLUS DE SOBRIÉTÉ ÉMERGE DANS NOS SOCIÉTÉS, UN ART DE VIVRE ANCIEN, ISSU DU BOUDDHISME ZEN JAPONAIS, MONTRE LA VOIE. ESTHÉTIQUE DE LA MODESTIE, LE WABI-SABI NOUS RECONNECTE À LA NATURE EN CÉLÉBRANT LA VALEUR DE L’USAGE ET DU TEMPS. DÉMONSTRAT­ION CET AUTOMNE CHEZ MARIANNE CAT.

Toute beauté est imparfaite, incomplète et impermanen­te, comme le flux même de l’existence. De cet axiome hérité du bouddhisme zen, les Japonais ont tiré une esthétique et un art de vivre singuliers, nommés wabi-sabi. Prônant la simplicité et l’authentici­té, cette philosophi­e cherche l’inspiratio­n dans la nature et l’harmonie de ses imperfecti­ons. Une branche de cerisier noueuse, un tabouret de bois usagé, un tablier de lin ravaudé avec soin, une dalle de pierre patinée par le temps acquièrent, par leur vécu unique, une valeur spirituell­e. Art de la modestie et de la résilience, le wabi a pratiqué le surcyclage (upcycling en anglais) bien avant l’heure, en sublimant les cicatrices des matériaux et des objets: on connaît la délicate méthode du kintsugi, qui consiste à réparer les fêlures de la porcelaine avec de l’or. De cette démarche étroitemen­t connectée à nos préoccupat­ions actuelles, Marianne Cat, l’infatigabl­e dénicheuse de tendances marseillai­se, a fait le thème de son exposition automnale. Dans le bel espace de son concept store, à l’hôtel de Paul, elle a convoqué des artistes du Japon, de Belgique, d’italie ou de France, animés par l’esprit wabi et l’idée qu’on peut faire beaucoup avec peu. Ln Boul et ses céramiques couturées, Mitri Hourani et ses abat-jour sauvés de l’oubli, Ysabel de Maisonneuv­e et ses voiles de soie recousus, Vintage Customan et ses fripes transfigur­ées par le patchwork, Martine Persault et ses coussins à récits… Une quinzaine de créateurs a répondu à l’appel. José Esteves, le poète de la lumière, est venu accompagné de lampes fabuleuses, mi-végétaux mi-oiseaux, fabriquées avec un mélange de sciure et papier recyclé. Géraldine Tubéry, designer textile, présente une série de tapis issus de sa résidence dans le studio de design d’emmaüs Alternativ­es, Les Résiliente­s: épatante structure d’insertion qui, sous la houlette d’eugénie de Larivière, utilise matériaux et objets obsolètes pour créer des meubles et éléments décoratifs. Refus du gaspillage, retour à l’essentiel, quête d’une nouvelle sagesse: le wabi est, décidément, pile dans l’air du temps.

 ??  ?? 1. Tables d’appoint conçues à partir de vieux livres au sein du studio de design et d’insertion profession­nelle Les Résiliente­s. 2. Céramique-calebasse avant cuisson, signée Ln Boul. 3. Coussin en chanvre et lin de récupérati­on, pièce unique de Martine Persault. 4. Les dernières créations de José Esteves, lampes en papier recyclé et métal recouvert de matière végétale. 5. Le Japonais Mitsugu Sasaki rapièce et magnifie les vêtements qui ont vécu. Ici, une veste de travail.
1. Tables d’appoint conçues à partir de vieux livres au sein du studio de design et d’insertion profession­nelle Les Résiliente­s. 2. Céramique-calebasse avant cuisson, signée Ln Boul. 3. Coussin en chanvre et lin de récupérati­on, pièce unique de Martine Persault. 4. Les dernières créations de José Esteves, lampes en papier recyclé et métal recouvert de matière végétale. 5. Le Japonais Mitsugu Sasaki rapièce et magnifie les vêtements qui ont vécu. Ici, une veste de travail.
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