HUB CULTUREL
Comme Venise ou Stockholm, Abu Dhabi grandit à cheval sur plusieurs îles. Celle dont vous allez beaucoup entendre parler au cours des prochaines années s’appelle Saadiyat. «L’île du Bonheur», triangle de sable et de mangrove de 27 km2, sera aussi celle des arts et de la culture, puisqu’elle va concentrer les musées dessinés par une poignée d’architectes internationaux. Si Jean Nouvel a ouvert le bal avec le Louvre Abu Dhabi, on attend pour l’année prochaine le Zayed National Museum de Norman Foster, qui s’annonce aussi beau que l’opéra de Sydney et qui contera la naissance des Émirats, en partenariat avec le British Museum. Le second musée Guggenheim de Frank Gehry pourrait sortir des sables en 2022. Rien n’est sûr, mais un Musée maritime signé Tadao Ando serait dans les cartons et Zaha Hadid aurait dessiné les premiers plans d’un musée des Arts vivants. En attendant d’en savoir plus, le Manarat Al Saadiyat, ancien pavillon des Émirats que Foster avait dessiné pour l’exposition universelle de Shanghai, sert de camp de base pour les grandes réunions de chantier et de hub accueillant expos photos, ateliers d’arts plastiques ou spectacles vivants. Face à un tel bouillonnement, ce n’est pas un musée que Jean Nouvel a dû inventer pour le Cultural District, mais une médina culturelle de 97 000 m², avec ses rues, ses galeries et une lumineuse agora centrale, où des gens très différents pourront se rencontrer et s’émouvoir devant une même oeuvre. Car la grande envie du Louvre Abu Dhabi est de souligner tout ce qui nous réunit. Sa vision globale, humaniste, fait dialoguer les trésors du lieu avec d’autres musées émiratis, avec les grandes collections françaises – du Louvre, bien sûr, mais aussi d’orsay, Guimet, Pompidou, du quai Branly, des Arts décoratifs, de Versailles, Chambord, Fontainebleau ou Cluny. Pour nous montrer combien les artistes, les modèles, les techniques et les inspirations ont de tout temps voyagé entre Orient et Occident, et combien la péninsule arabique, au carrefour de grandes routes marchandes de l’encens, de l’ivoire, de l’or ou de la myrrhe, a toujours été un hub artistique majeur. Cela est flagrant dans la vitrine dédiée à l’art céramique. Ou dans celle des bijoux, où une parure en or bretonne du IIE millénaire avant Jésus-christ discute avec un pendentif de Ras al-khaimah, tout aussi beau et ancien. De quoi faire réfléchir ceux qui voient uniquement les Émirats comme un bouquet de gratte-ciel jailli avant-hier.