L’OASIS ET LE JEBEL
Aujourd’hui, il faut 1 h 30 pour atteindre Al Aïn par la route, où la vitesse est limitée à… 160 km/heure. Autrefois, les caravanes qui reliaient la côte à Oman mettaient sept jours pour y parvenir. Si l’unesco a inscrit la deuxième ville de l’émirat au patrimoine mondial, c’est que ses sites archéologiques racontent comment les hommes sont parvenus à se fixer dans le désert, à l’apprivoiser et même à le cultiver. À l’origine, les populations vivaient de la chasse, de la pêche et de la cueillette sur les rives de grands lacs qui se formaient ici à la saison des pluies. Mais, à l’âge du bronze, les températures ont augmenté, l’atmosphère s’est réchauffée, les pluies et les lacs se sont évaporés, et les hommes ont dû inventer, pour survivre, le falaj. Ce système d’irrigation extrêmement ingénieux, fait de tunnels et de rigoles, permet d’aller capter l’eau des profondeurs de la montagne de Jebel Hafeet, à une vingtaine de kilomètres de là, et de l’acheminer vers les six palmeraies d’al Aïn. L’eau ainsi recueillie était ensuite équitablement répartie entre les propriétaires. On estime qu’il pousse 147 000 palmiers de toutes sortes à Al Aïn. À l’aube, quand les premiers rayons du soleil caressent les palmiers-dattiers bruissant de chants d’oiseaux, l’oasis est un paradis. Un jardin nourricier où les orangers, bananiers et manguiers poussent à l’ombre du meilleur ami de l’homme : le Phoenix dactylifera. Avec la fibre qui entoure son tronc, il fabrique des cordes et des ficelles. Il confectionne des canisses en feuilles de palmier ficelées entre elles : c’est le fameux barasti. Il tresse de grandes nattes avec ses feuilles, mais aussi des paniers de toutes tailles. Les dattes lui donnent le sucre, la mélasse et la farine. Les coeurs de palmier finissent en salade. L’huile de palme en savon. Dans le désert, rien ne se perd. Au sein du vieux fort d’al Jahili, on remarquera la charpente en troncs de palmier coupés en quatre, et le barasti qui isole le bâtiment de la chaleur en été et de la pluie en hiver. Le Centre des monuments historiques d’al Aïn, dirigé par Omar Salem Al-kaabi, qui a suivi ses études d’histoire de l’art à Strasbourg, a pour projet de rénover une centaine d’autres vieux édifices militaires ou religieux abandonnés afin de les transformer en lieux d’exposition ou en résidences pour artistes. C’est ainsi que le fort Al Qattara est devenu un Centre d’art communautaire en 2011.