Maison Côté Sud

PLANÈTE FAUVE

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Il faut se lever à 5 heures, puis marcher, s’enfoncer dans la nuit finissante et les premières dunes… Il est important d’être déjà loin quand le soleil se lève, éclaire les palmiers de Liwa et les crénelages du Qasr Al Sarab. Dans une échancrure des sables, l’hôtel apparaît alors comme un triple mirage, à la fois fortin arabe, village bédouin et décor de carton-pâte pour un épisode lointain de La Guerre des étoiles. Non, ce n’est pas une coïncidenc­e : les scènes qui se passent sur la planète Jakku dans Le Réveil de la force ont été tournées ici. La lumière du petit matin dessine chaque grain de sable et fait ressortir les différente­s nuances. Par endroits, c’est comme si le vent avait jeté des poignées de pigment rouge sur un corps nu. Car la palette des sables est grande.

Cinquante nuances d’ocre, de beige, d’orange, de jaune ou de rose, voire de blanc et de pourpre si des dépôts de sel ou de fer affleurent non loin. Sur certaines dunes, le vent a dessiné des fronces, des ourlets, des plissés très textiles. Sur d’autres, on voit des ventres côtelés de baleines, des ronds dans l’eau sans eau, des craquelure­s de gâteau trop cuit, des pics de meringue. C’est à perte de vue un univers étrange, et pourtant familier, si bien que la peur de s’y aventurer est vite évacuée, remplacée par l’envie d’aller voir derrière la dune suivante. On pourrait plonger, marcher jusqu’à Mascate ou Salalah. Car le Rub Al Khali partage ses 650 000 km2 avec trois autres pays : le sultanat d’oman, le Yémen et l’arabie saoudite. On songe avec admiration à

Wilfred Thesiger, l’explorateu­r britanniqu­e qui, avec ses compagnons bédouins, a traversé deux fois ces étendues de sable. D’abord, en 1946, l’aventurier avait relié Salalah à Liwa en six mois. « Naviguant sur une immensité informe avec juste une boussole et un dessin en guise de carte », il s’en fallut de peu qu’il ne manquât l’oasis, ce qui aurait signé l’arrêt de mort de sa petite troupe assoiffée et épuisée. Ensuite, il avait marché du Yémen à Al Aïn, où le sheikh Zayed, alors tout jeune, l’avait hébergé quelques jours, lui avait fourni vivres, guides et dromadaire­s, scellant une amitié à vie que l’exposition permanente du fort Al Jahili nous conte avec de belles images en noir et blanc. Ainsi requinqué, Thesiger avait poursuivi sa route jusqu’à Abu Dhabi, qu’il avait finalement atteinte en mars 1948.

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 ??  ?? ATTRACTION TERRESTRE
Ces paysages évoquent les grands tirages photograph­iques vus chez Warehouse4­21, signés d’obaid Albudoor, golden-boy dubaïote qui reçut l’appel de la nature. « Un jour, devant un océan de dunes et un coucher de soleil vermillon, j’ai été submergé, écrit-il. L’odeur du feu de camp, la caresse du vent sur ma peau : j’ai compris que je ne pouvais plus prendre ces trésors à la légère. » Depuis, il les photograph­ie.
ATTRACTION TERRESTRE Ces paysages évoquent les grands tirages photograph­iques vus chez Warehouse4­21, signés d’obaid Albudoor, golden-boy dubaïote qui reçut l’appel de la nature. « Un jour, devant un océan de dunes et un coucher de soleil vermillon, j’ai été submergé, écrit-il. L’odeur du feu de camp, la caresse du vent sur ma peau : j’ai compris que je ne pouvais plus prendre ces trésors à la légère. » Depuis, il les photograph­ie.

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