ÉLOGE DE LA TRANSPARENCE
Dans le parc de la Villa Borghèse, on déambule à travers un étrange édifice, oeuvre d’edoardo Tresoldi.
DANS LE PARC DE LA VILLA BORGHÈSE, ON PEUT DÉAMBULER DEPUIS PEU À TRAVERS UN ÉTRANGE ÉDIFICE, BAROQUE ET FANTOMATIQUE. HALLUCINATION OU TOUR DE MAGIE ? DESTINÉ À RAVIVER UNE MÉMOIRE PERDUE, CET ÉTONNANT CAMBRIOLAGE SENSORIEL A ÉTÉ COMMIS PAR L’ARTISTE EDOARDO TRESOLDI. DÉCRYPTAGE D’UN SOMPTUEUX MENSONGE VISUEL.
De la vallée de Coachella aux jardins de la Villa Borghèse, il y a une longue route que le plasticien italien Edoardo Tresoldi a néanmoins parcourue sans souci. Grand manipulateur de l’espace-temps, celui-ci vient en effet de reconstituer à Rome l’oeuvre monumentale qu’il avait créée pour le célèbre festival pop-rock californien. Réinventée pour l’occasion, cette majestueuse sculpture transparente dialogue désormais avec les arbres du Parco dei Daini, dans le cadre du festival « Back to Nature », destiné à valoriser les espaces verts romains. Tresoldi n’en est pas à son coup d’essai. Ce jeune Milanais féru d’architecture et de design signe depuis 2013 de spectaculaires interventions dans l’espace public ou archéologique. Son matériau fétiche ? Le grillage métallique, dont il apprécie la plasticité, la transparence et le pouvoir de suggestion. Son credo ? Faire dialoguer l’homme et le paysage en utilisant le langage de l’architecture. Sa théorie ? Le cycle architectural est composé de plusieurs états successifs. L’acte créatif matérialise l’union entre la forme et la matière, puis, tôt ou tard, se produit l’abandon, qui déclenche le processus menant à l’état de ruine, voire à la disparition. C’est là, précisément, qu’intervient Tresoldi. Recréant avec du treillis des colonnes, des voûtes, des dômes baroques ou néoclassiques, il fait revivre ce qui a disparu, dans un temps différent. En 2016, il a ainsi ressuscité la basilique paléochrétienne de Santa Maria de Siponto, dans les Pouillles, exploi artistique qui l’a révélé au grand public. « Le langage de la transparence tisse l’inexistant, dit l’artiste, il transforme le déni de matière en une entité tridimensionnelle, pure et éthérée. » Ces «ruines métaphysiques», faites de « matière absente », entament un dialogue continu avec l’environnement contemporain. Lorsque le visiteur déambule parmi elles, les propriétés du grillage créent des effets d’optique, des perspectives irisées, des perceptions inédites.
Entre illusion et réalité, cette expérience féerique réconcilie l’espace et le temps, l’oubli et la mémoire.