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INSTALLATIONS ET RECETTES Giulia Miller PHOTOS Nathalie Baetens TEXTE Martine Duteil
En Corse et ailleurs, Giulia Miller imagine des moments dans des lieux où elle vient inscrire un décor et un repas sur mesure.
C’est un talent dont elle a fait son métier. Giulia Miller imagine des moments dans des lieux où elle vient inscrire un décor et un repas sur mesure.
Une installation éphémère dans le respect d’une nature à préserver et dont il ne restera que le souvenir. La Corse, ses paysages, ses parfums, les liens solides et intenses qu’elle y a noués, sont pour elle, une source inépuisable d’inspirations.
La tour génoise de Campomoro, l’église de Murato, la campagne de Valicella près de Figari, le plateau du Cuscionu et ses pozzines, l’omu di Cagna, ce rocher suspendu qui surplombe toute la baie de Figari et dont on dit qu’il veille sur la montagne, la plage de Roccapina surmontée de son rocher-lion, les paysages qui alternent mer et montagne…», Giulia Miller est intarissable sur ces sites vertigineux de beauté. Elle en égrène les noms dans le désordre, une vue, un souvenir se superposant à un autre. Mar e monti. Les deux sont indissociables lorsque l’on évoque la Corse. Ces sites ont marqué son enfance, façonné son existence. Elle y a rencontré Jean-pierre Marcellesi, père de ses deux filles, qui chante l’île et toute la Méditerranée, mais accompagne aussi parfois les moments qu’elle compose. C’est lui qui a ouvert son regard sur la Corse et ses esprits libres, de l’alta Rocca, une région de moyenne montagne située entre les massifs de Bavella, de l’ospédale et du plateau du Cuscionu jusqu’en Balagne et en Castagniccia. Partir à la rencontre de la nature, en souligner ses richesses, conjuguer magie et talents, célébrer les saveurs méditerranéennes, les associer à l’intensité des goûts et des traditions d’ici, décliner la convivialité dans toutes ses expressions… C’est là le talent de cette créatrice de moments rares. L’origine de ce don est directement associée à sa mère, «elle avait un sens inné du beau et du bon ». Fille de médecins installés dans le Nord, l’appel de la maison d’été devient très tôt une force attractive. Les deux mois de vacances y sont synonymes de liberté. Un sentiment qui ne la quittera plus. Si aujourd’hui, elle a choisi deux lieux pour illustrer deux facettes de cette Corse du Sud, elle sait en composer bien d’autres. Et si une petite crique sert de point d’ancrage à un pique-nique, le plateau de Luvio, dans l’alta Rocca, avec vue sur le golfe de Porto-vecchio retient son attention pour «sa lumière au soleil couchant, pour ses pins laricio sculptés par le vent, ses herbes folles, ses graminées… Mais surtout pour la puissance de ses montagnes, l’intensité de la couleur de la roche à côté de la fragilité des petites fleurs que l’on retrouve dans l’assiette ». Terre de contrastes, d’accueil qui inspire ces tables autour d’une sélection d’objets et d’accessoires bruts, authentiques, recyclés et de pièces en harmonie avec les idées de Giulia. Ainsi, les céramiques de Sabrina Binda (Grèce), celles de Nicoletta Primagiore (Italie), de Léa Brodiez (Provence), de Paule Faticcioli (Corse), la vannerie de Noëlle Figarella (Corse), les textiles teints de Laëtitia Costechereyre de l’atelier Simone (Aix-en-provence), les verreries de La Soufflerie, d’ostraco et de Q de bouteilles, les meubles et objets d’atmosphères d’ailleurs, la vaisselle de Malo Atelier, de Fernando Alcade (Espagne), les pièces en bois sculpté de Kasia Kmita, d’oros (Marseille), les couteaux Ceccaldi (Corse)… célèbrent toute la Méditerranée et au-delà. Au menu, la focaccia verte, les galettes d’aubergine et de mozzarella, le chèvre frais aux herbes du maquis, les courgettes farcies au bruccio et à la menthe fraîche, les madeleines au miel de Quenza, les figues à la crème d’amande rôties… Quand la nature se fait source d’inspirations et de créations, avec toujours en ligne de mire la volonté de la respecter, sans jamais la dénaturer.