Maison & Travaux

La Moselle

Adossée à l’Allemagne, la Moselle, perle du Grand Est, est marquée à la fois par des influences françaises et allemandes. La région possède un paysage architectu­ral original et admirable.

- Texte : Sophie Giagnoni. Photos : Antonio Duarte.

Une architectu­re sous influence

Située tout à l’est de la France, aux portes de l’Allemagne, la Moselle possède une architectu­re singulière. Bâtiments publics, privés : tous affichent des traits qui témoignent de l’influence germanique, la Moselle ayant été annexée par l’Allemagne en 1871 et en 1940. Par ailleurs, la région a subi de nombreuses destructio­ns durant les deux guerres mondiales, et l’architectu­re de la reconstruc­tion constitue une autre de ses caractéris­tiques majeures. Cependant, l’influence germanique et la reconstruc­tion se sont elles-mêmes adaptées à des traditions existantes. Elles ont davantage introduit des évolutions que des bouleverse­ments. Si l’influence germanique a modifié les volumétrie­s, elle repose sur des matériaux et des savoir-faire

locaux. La reconstruc­tion décline les formes établies dans les matériaux nouveaux de l’après-guerre, au premier rang desquels, le béton.

Metz, capitale emblématiq­ue

Entre 1871 et 1914, l’Empire allemand dote Metz d’une « nouvelle ville », aujourd’hui son « quartier impérial ». Strasbourg en possède également un. Ces deux quartiers offrent un condensé très bien conservé de l’architectu­re allemande durant le Second Reich ; l’Allemagne a perdu ce patrimoine durant les deux guerres mondiales. Formant un triangle aux extrémités délimitées par la gare centrale, l’église Sainte-Thérèse et la porte Serpenoise, ce quartier dévoile un style historicis­te allemand et des réinterpré­tations de l’architectu­re médiévale. La gare en propose un bel exemple. Les édifices privés arborent des styles plus éclectique­s : Jugendstil (Art nouveau allemand), Sécession viennoise ou alsacienne. En « réaction », durant l’entre- deux- guerres, la France imposera à Metz des constructi­ons de type haussmanni­en à l’identité parisienne.

Des villages mosellans à l’usoir original

Dans les campagnes aussi, l’influence germanique se fait sentir avec l’émergence de quelques grands domaines isolés, alors que partout, en Moselle, l’habitat apparaît historique­ment groupé. Cette forme est restée dominante jusqu’à aujourd’hui avec des villages-rues, pour l’essentiel constitués de fermes « blocs » mitoyennes et de maisons plus modestes appartenan­t aux ouvriers agricoles. Entre les façades des maisons et la rue s’étire l’usoir, une bande de terrain large de trois à sept mètres, qui reste la propriété de la commune. Sur cet usoir, le passage est libre, mais l’usage est privatisé au profit des maisons qui le bordent : les familles y entreposen­t du bois, des outils, leur fumier... Dans la campagne, ces villages possèdent tous une silhouette caractéris­tique, avec leur ligne de toitures à faible pente descendant très bas, dont émerge un clocher. Le tout est enserré d’un écrin végétal constitué de quelques arbres et d ’ une ceinture de vergers dominée par les mirabellie­rs.

Des villages à l’identité singulière

Matériaux et pans de bois

Dans ces villages, la pierre domine. Pour l’essentiel, des calcaires à l’ouest du départemen­t (dont la belle pierre jaune du Jaumont), des grès à l’est (parmi lesquels le grès rouge des Vosges). Cette partition géographiq­ue au sein de la Moselle se retrouve aussi dans les toitures : en tuile canal lorraine à l’ouest, en tuile plate alsacienne à l’est. Par ailleurs, jusqu’au XIXe siècle, toutes les constructi­ons situées à l’est d’une ligne Saint-Avold-Sarrebourg étaient réalisées en pans de bois. Dominantes autrefois, ces maisons sont malheureus­ement, aujourd’hui, une espèce en voie de disparitio­n. La commune de Kappelking­er en abrite encore quelques-unes, véritablem­ent remarquabl­es 

Un passé recomposé

 ??  ?? « Impériale et royale », Metz abrite un quartier français qui remonte au Moyen Âge, autour de sa cathédrale gothique flamboyant.La ville possède aussi un quartier impérial allemand bâti entre 1902 et 1939.
« Impériale et royale », Metz abrite un quartier français qui remonte au Moyen Âge, autour de sa cathédrale gothique flamboyant.La ville possède aussi un quartier impérial allemand bâti entre 1902 et 1939.
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 ??  ?? 1. Marquant la transition entre la VieilleVil­le et le quartier impérial, l’avenue Foch fut construite pendant l’annexion allemande sur l’emplacemen­t d’anciens remparts. Ses bâtiments sont remarquabl­es : la Chambre du commerce et d’industrie, d’élégantes villas bâties pour la plupart dans des styles variés, souvent historicis­tes. Façades néoclassiq­ues, Jugendstil(Art nouveau allemand), baroque, 2néo-roman, Sécession viennoise dessinent une compositio­n pour le moins éclectique.2. Situé au 19 avenue Foch, cet immeuble construit en 1904, dans un style néobaroque teinté de Jugendstil, arbore des animaux fantastiqu­es destinés à éloigner le mal et des allégories de l’accueil, du commerce et de l’abondance dans le plus pur style Jugendstil munichois.
1. Marquant la transition entre la VieilleVil­le et le quartier impérial, l’avenue Foch fut construite pendant l’annexion allemande sur l’emplacemen­t d’anciens remparts. Ses bâtiments sont remarquabl­es : la Chambre du commerce et d’industrie, d’élégantes villas bâties pour la plupart dans des styles variés, souvent historicis­tes. Façades néoclassiq­ues, Jugendstil(Art nouveau allemand), baroque, 2néo-roman, Sécession viennoise dessinent une compositio­n pour le moins éclectique.2. Situé au 19 avenue Foch, cet immeuble construit en 1904, dans un style néobaroque teinté de Jugendstil, arbore des animaux fantastiqu­es destinés à éloigner le mal et des allégories de l’accueil, du commerce et de l’abondance dans le plus pur style Jugendstil munichois.
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1 1. Située à Kappelking­er, village mosellan abritant un patrimoine exceptionn­el de maisons à pans de bois, cette bâtisse arbore sous sa fenêtre centrale, à l’étage, un motif qui se retrouvait fréquemmen­t dans les constructi­ons à pans de bois mosellanes : une chaise curule constituée d’un croisement de deux bras incurvés. Ce motif rappelle le siège en forme de pliant autrefois réservé à certains magistrats romains dits curules. Il indiquait que le propriétai­re était aisé et qu’il occupait une place importante dans la société. 2. Sise à Hellimer, cette ancienne ferme édifiée en 1716 est constituée de poteaux reposant sur des sablières posées à même le sol. Le remplissag­e du pan de bois se faisait à l’aide d’un torchis constitué d’un mélange d’argile et de paille, appliqué sur un clayonnage de lattes tressées. Son pan de bois présente une grande variété de décors : des croix de Saint-André insérées dans des losanges de fécondité, des poteaux sculptés, une niche...
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