LA NORMANDIE
& la gastronomie française
En 2016, le Musée de Normandie et le Musée d'art et d'histoire de Vire s'associent pour organiser une exposition inédite sur la place de la Normandie dans l'élaboration de la gastronomie française. L'alimentation ne se résume pas à la satisfaction de besoins physiologiques. La qualité des produits, la manière de les accommoder et de les apprécier dans une ritualité partagée-, a fourni le vocabulaire d'une gastronomie élevée au rang d'art national. Terre agricole et maritime par excellence, et plus ancienne destination touristique, la région normande située à proximité de la capitale a pleinement contribué à l'épanouissement de la gastronomie française. L'exposition abordera ce processus à travers l'évocation des figures du gastronome et du cuisinier, du développement des arts de la table et de la littérature gourmande, de la reconnaissance de produits et de plats particuliers, de l'invention d'une cuisine régionale liée à l'essor du tourisme. L'exposition s'ouvre sur une évocation des prescriptions religieuses et médicales qui ont longtemps influé sur les pratiques alimentaires des Occidentaux (contenu et ordre des plats). Les Français ont, les premiers, contrevenus à ces interdits pour élaborer une cuisine centrée sur l'harmonie des saveurs et des textures et créer une gastronomie hédoniste reconnue dans le monde entier. La gourmandise s'émancipe de ces considérations diététiques à partir du milieu du XVIIE siècle. Le gastronome s'apparente progressivement à un esthète du goût qui invente un moment particulier, entouré de nombreux rites et objets destinés à théâtraliser le repas. Le gourmet proclame qu'il ne s'agit pas de goinfrerie (même si un excès de bonne chère peut aboutir à des problèmes de santé…) mais d'un art, d'un savoir et d'un savoirvivre qui le distingue des autres. De grands auteurs, gastronomes ou gastronomes-cuisiniers, publient des ouvrages qui codifient la cuisine et le service. Ils hissent la gastronomie à l'échelle d'art. Les Français créent une concordance entre le goût et le "bon goût". Cependant, le siècle des gastronomes est bien le XIXE siècle. L'élaboration de mets complexes et les raffinements des manières de table ne s'arrêtent plus aux hôtels particuliers des courtisans. Ils s'épanouissent après la chute de l'ancien Régime. Les restaurants, temples de la dégustation, se multiplient. Le cuisinier est reconnu comme un artiste culinaire. Les demeures s'enrichissent d'une pièce particulière, la salle à manger, où s'exposent les arts de la table dans une étourdissante spécialisation du couvert… Nature morte au homard et à la soupière, Guillaume Fouace, Musée Thomas Henry -Cherbourg-en-cotentin.