C’EST LE MÉTIER QUI COMPTE !
On ne s'improvise pas constructeur de maisons normandes S'il est des professions qui exigent compétence et expérience, il s'agit bien de celles-là, si essentielles à la pérennité de la maison, autant qu'à son esthétique. Il est donc impératif de confier ces travaux de charpente et de couverture à des entreprises chevronnées qui sauront construire, restaurer rénover et remanier avec l'expérience que leur confèrent bien souvent des années, voire des décennies de savoir-faire.
En Normandie, la tradition des maisons à pans de bois obéit à certaines règles comme l’usage systématique du chêne massif
Très présent dans les forêts de la région, ce bois noble a servi depuis longtemps à construire les habitations, chaumières et manoirs de la région. Les logis des XVIE et XVIIE siècles qui ont victorieusement traversé les épreuves du temps en témoignent assurément. Estimé pour sa dureté et sa longévité, ce bois remarquable dispose de qualités qui le rendent indispensable, notamment pour les pièces verticales de la charpente, que l'on appelle poinçons. Ces éléments relient l'entrait, la pièce horizontale, à la jonction des deux arbalétriers, les deux pièces obliques formant la triangulation de la ferme. Le choix du chêne pour le poinçon se justifie par le fait que cette pièce travaille en compression debout, et que le chêne, en raison de ses fibres courtes, résiste bien à la compression. Ces beaux spécimens d'arbres étaient, selon la tradition, coupés à la bonne lune, à la sève descendante ; bien informés par l'héritage des Anciens, l'on prenait soin d'enlever l'aubier qui représente l'enveloppe extérieure tendre dans laquelle les insectes peuvent s'incruster, tandis que le bois dur (le liber), ne le leur permet pas.
Pour la protection des bois extérieurs, on utilisait l'huile de lin quand on le pouvait car, selon les historiens du XIXE siècle, celle-ci était souvent onéreuse et rare. De nos jours, ajoutée aux nombreux produits du commerce, l'huile de lin, bien plus abordable, peut être utilisée pure ou mélangée à un solvant, tel que l'essence de térébenthine, par exemple. Pour les pans de bois et les éléments de charpente, on peut s'en servir pour l'huiler et protéger ainsi les assemblages, tenons et mortaises, de la pourriture ; cela demande bien entendu de l'appliquer avant l'assemblage des différents éléments de la structure. Si les bois apparents et menuiseries des portes et fenêtres, ont été peints, il est inutile de les passer à l'huile de lin. Par contre, l'huile de lin, si on la mélange par exemple à du brou de noix, peut se montrer un excellent colorant. Pour ce qui concerne l'ancienneté de la maison, il ne faut pas trop se fier au linteau qui surmonte la porte d'entrée, et sur lequel figure parfois une date. Elle peut avoir été inscrite lors d'une rénovation ou d'un héritage, le nouvel occupant s'empressant ici de signifier son accession dans les lieux et gommant de la sorte tout le passé de la maison.
L’huile de lin protectrice pour les assemblages, tenons et mortaises
Le roseau de Camargue ou de Baie de Seine couvre aujourd’hui les chaumières de Normandie
La charpente ne nous informe pas davantage sur l'âge de la maison si ce n'est les traditionnelles inscriptions des compagnons, marques destinées à situer l'emplacement de chaque poutre dans la structure. A l'inverse, ce sont souvent les ouvertures qui nous renseignent. Pour savoir si la date portée par votre maison est sa véritable date de construction, regardez comment sont conçues ses fenêtres. Si elles sont surmontées de linteau en segment d'arc, par exemple, on peut supposer la façade a été construite au XVIIIE siècle. Pour les couvertures normandes historiques, impossible de ne pas évoquer les chaumières qui au XVIIE et au XVIIIE furent longtemps couvertes de paille de seigle. Les risques d'incendie et les édits royaux en proscrivant l'usage ont conduit à remplacer ce matériau par de l'ardoise. Pour opérer ce changement, il fut nécessaire de redresser l'inclinaison de la toiture, l'ardoise ne nécessitant pas d'être posée sur des versants aussi abrupts que le chaume de seigle. Remplaçant le seigle dont la culture en France a quasiment disparu, le roseau de Camargue ou de Baie de Seine couvre aujourd'hui les chaumières de Normandie…
Extension d'une habitation de charme, avec toiture en chaume et création de velux, charpente en colombages de récupération, entre-colombage en torchis fait à l'ancienne, soubassement en silex, et aménagement intérieur et extérieur comprenant la création d'une cuisine, salon, trois chambres et trois salles de bain, le tout dans l'esprit traditionnel de conservation de l'architecture augeronne. Études et travaux supervisés par la société Normex architecture représenté par Guillain Rendu, Architecte D.P.L.G.
Mélanger les tuiles anciennes et les tuiles neuves qui se patineront avec le temps
En dehors du roseau, on trouve le plus souvent la tuile plate sur les toitures normandes. Lorsque certaines d'entre elles sont détériorées et que vous ne pouvez en récupérer en quantité suffisante pour couvrir votre toit, que faut-il faire ? Il faut savoir que, lors de la dépose d'une couverture ancienne, un certain nombre d'éléments sont envahis par les mousses poreuses. Les connaisseurs les examinent alors, une à une, les font sonner, car elles doivent produire un son clair. Des tuiles abîmées, peuvent parfois être ainsi récupérées, coupées sur leur longueur ou sur leur largeur, et servir pour les rives du toit où la moitié d'une alterne avec une tuile entière. Les propriétaires se demandent, aussi, s'il est possible de mélanger tuiles mécaniques et tuiles plates sur différents versants de toitures. Pour des raisons esthétiques, cela n'est pas souhaitable, mais pas seulement, il faut également tenir compte de la différence de poids. Cette question du poids de la tuile de remplacement doit toujours se poser, car cela met en jeu la charpente et son adaptabilité à ces modifications de charge. Reste la solution qui consiste à mélanger tuiles plates anciennes et tuiles plates neuves à la condition que l'aspect des neuves ne jure pas trop avec celui des anciennes. Après, le temps fera son oeuvre de patine…