GÉANTE DE PAPIER

L’angoisse de la page blanche? Pour cette virtuose du ciseau qui fait naître de simples feuilles des oeuvres de papier aux détails inouïs, c’est tout le contraire.

De ses années passées à façonner des robes dans des ateliers de couture parisiens – elle a notamment travaillé pour Louis Féraud – cette quadragénaire allemande, installée à Anvers, a gardé une chose : les ciseaux. Lassée du prêt-à-porter et devenue styliste pour des magazines, elle s’évertue à embellir les scènes de shooting avec des petits objets qu’elle confectionne sur son temps de pause. Ce sont de simples photophores de papier qui vont changer sa vie. “Tout le monde voulait que je lui en fasse ! Moi qui n’étais pas du tout formée à l’art, qui ne me sentais absolument pas légitime, je me suis dit : après tout, pourquoi pas?” Qu’elle sculpte une envolée de fleurs ou d’oiseaux ou la copie conforme d’une machine à écrire Remington, Sabrina n’a besoin que de papier, de colle et d’un cutter pour s’exprimer. Son travail tout en ombre et lumière a rapidement séduit le monde du luxe – Hermès, Vuitton, Chanel, Dior, Miu Miu ou encore Ruinart – pour lequel elle met en scène décors de publicité ou vitrines. Mais toujours en blanc. “Trop de choix tue le choix ! rigole-t-elle. En n’utilisant que du papier immaculé, je peux jouer sur les contrastes et les ombres, me concentrer sur les détails.” Légèrement obsessionnelle, elle peut passer jusqu’à six semaines, jours et nuits, pour voir naître de ses mains l’objet tel qu’elle l’a imaginé. “Le plus fascinant avec le papier, c’est que contrairement au tissu qui passe de mode, il ne vieillit pas. J’ai dans mon bureau un mur de fleurs que j’ai fait il y a plus de dix ans mais qui n’a pas bougé. Il a vieilli avec moi, mais conserve une belle patine.” A. S.

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