Et si on mettait nos gosses en sourdine ?
Au titre des grandes résolutions de Noël, voici une suggestion : et si nous arrêtions de parler de gosses ? Un défi, je sais. Mais on arrête bien de fumer, de manger, de boire… pourquoi ne pas en finir avec cette addiction qui consiste à soûler la terre entière avec nos enfants ? Je le dis d’autant plus volontiers que ça concerne aussi les hommes. Quand les pères s’y mettent, le couple devient une immense machine à parler susceptible de n’intéresser que d’autres couples « enfants maniaques ». Quand, à près de 35 ans*, je fais le bilan de ma vie sociale de père moderne, je réalise que j’ai consacré un tiers de mon temps et ma salive à parler de mes mômes. A des amis, inconnus, passants, serveuses de restaurant, caissiers de supermarché, agents de police, proches… bref, à tout le genre humain. Ma femme aussi en a fatigué, des malheureux, forcés à écouter. Tout ce temps perdu à parler de couches, de poux, de rougeole, de caca mou, d’orientation scolaire… sans oublier la pédophilie en ligne. Que de temps perdu, quand nous aurions pu nous taire, chanter dans une chorale, apprendre à parler italien ou lire Balzac à des aveugles. Que de temps perdu à parler d’enfants – qui ne perdent pas, eux, le leur à évoquer leurs parents dans la cour de récré. Imaginez qu’ils parlent de nous en permanence : ils se feraient lyncher ! Alors qui sait si vous ne serez pas, en ce mois de décembre, les heureux destinataires de ce présent inestimable : ne plus entendre parler, jamais, des enfants de vos amis, lesquels n’ont jamais demandé à ce que vous veniez au monde, et réciproquement… Si on vous fait un tel cadeau, au moins soyez à la hauteur, sachez exprimer votre gratitude. « Non mais vous êtes fouuus ! On ne peut pas accepter. Non, c’est trop, ça va vous manquer. Vraiment, vous êtes sûr ? Non, franchement on est gêné. Surtout qu’on est arrivé les mains vides… Et avec les enfants ! Mais ils ont déjà dîné. » Plaisir d’offrir, joie de recevoir. (*) Pour toute contestation ou vérification de mon âge, contacter la rédaction.