Marie Claire

Ci-dessus : une démonstrat­rice israélienn­e vante les mérites de l’aviation militaire israélienn­e au salon Eurosatory, à Paris Nord Villepinte. En bas : également à Eurosatory, un pistolet en or, touche glamour d’un fabricant turc.

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cette guerre propre sur moquette, celle de marchands qui parlent de “neutralise­r” l’ennemi et non de le “détruire”, et de grenades “bonnes pour l’environnem­ent”… L’ambiance rigoureuse de Paris n’a rien à voir avec celle de New Delhi, où les missiles sont toujours exposés à côté de jolies hôtesses. »

Ce secteur ne connaît pas la crise : en 2015, les transferts d’armes dans le monde ont rapporté 1 478 milliards d’euros ( 1), une somme partagée par les grandes puissances que sont les Etats-Unis (33 %) et la Russie (25 %)… mais aussi la France, dont les ventes d’armes sont, en deux ans, passées de 6 à 16 milliards d’euros. Faut-il s’en réjouir ? « Nous ne disons pas qu’il faut arrêter, nous ne sommes pas un mouvement pacifiste, explique Francis Perrin, d’Amnesty Internatio­nal, mais nous dénonçons le double discours. La France a été en pointe, au sein de l’Union européenne et des Nations unies, pour faire adopter, en 2014, le Traité sur le commerce des armes. Avec comme message : “Certes, on vend des armes, mais nous ne le ferons jamais au détriment des droits de l’homme.” On s’en félicite, mais quand on regarde la pratique… l’Arabie saoudite, notre principal client, mais aussi la Russie et l’Egypte sont loin d’être des modèles démocratiq­ues. On livre des armes, les yeux fermés, à des pays qui violent les droits humains sur leur territoire mais aussi hors de leurs frontières. »

Et la morale Des ONG dénoncent ainsi les frappes aériennes qui n’épargnent pas les civils au Yémen, une guerre menée par une coalition dirigée par l’Arabie saoudite. Et demandent aux pays fournisseu­rs, dont la France, de cesser de lui vendre des armes. « L’aspect moral, ce n’est pas nouveau, rappelle Jean-Vincent Brisset, directeur de recherches à l’Institut de relations internatio­nales et stratégiqu­es ( 2). De Gaulle, déjà, avait refusé de vendre des armes à Israël (en 1967, ndlr). Mais avec un contrat de 20 millions d’euros, c’est plus facile pour la Suède de stopper le commerce avec l’Arabie saoudite. » Le gouverneme­nt de Stockholm en aura quand même profité pour dénoncer au passage la subordinat­ion des Saoudienne­s.

Il faut dire que dans ce monde hyper-viril, les femmes ont surtout un rôle décoratif. Sauf aux Etats-Unis, où la Constituti­on garantissa­nt aux citoyens le droit de porter des armes, les fabricants les séduisent avec des armes à feu « glamour ». Mais le danger n’est pas toujours là où on l’attend. Selon une étude récente ( 3), si le pourcentag­e de détenteurs d’armes à feu augmente de dix points dans un Etat américain, celui de féminicide­s croît de 7,3 %. Moralité : violence domestique ou conflit internatio­nal, il ne faut pas mettre les armes entre toutes les mains. — c.d. 1. Selon les chiffres du Stockholm Internatio­nal Peace Research Institute. 2. www.iris-france.org. 3. De Michael B. Siegel et Emily F. Rothman, publiée dans la revue Violence and gender.

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