L’objet du débat : le sac plastique Céline
Apparu sur le défilé printemps-été 2018 de la maison, il enflamme la Toile et interroge la notion même de luxe.
L’argument
En mars, nombre de tweets outrés et d’articles acrimonieux – The Sunday
Times en tête – fustigent une hérésie : Céline aurait poussé l’inconséquence jusqu’à vendre un sac plastique 400 euros. Problème : c’est faux. Le sac de course, certes siglé, n’est que le packaging de la pochette en agneau qu’il contient. Il ne peut être vendu séparément.
L’esprit du temps
L’accusation, pour injuste qu’elle soit, est à imputer à la circonspection dans laquelle plongent certaines marottes mode récentes. L’absurde est désormais possible à condition d’être connivent, de la brique Supreme aux Crocs compensées de Balenciaga. Que Céline associe son image vénérable à la trivialité des courses en supermarché ne fait que creuser le sillon de la réappropriation des codes populaires par le luxe. En outre, le sac plastique, appelé à disparaître pour cause de désastre écologique, fait ici l’objet d’un salut ironico-nostalgique.
La clientèle
Si rien n’oblige à trimballer la pochette en agneau dans son packaging superette, les « Philophiles » – dévots fétichistes au plus mal depuis l’annonce du départ de la pythie Phoebe – arborent déjà le combo sur les photos de street style, hommage à l’un des derniers gestes créatifs de Philo pour Céline. Dans Le
snobisme (éd. Plon), Adèle Van Reeth et Raphaël Enthoven énoncent ceci : « Le snobisme apparaît à la seconde où un individu a le sentiment de dire vrai en sachant qu’il raconte n’importe quoi. »