Marie Claire

Camille Chamoux

Pour imposer son visage et son ton sur scène comme au cinéma, la comédienne et auteure, qui incarne aujourd’hui un modèle de femme libre, lucide et autonome, avoue avoir dû affronter la solitude. Portrait.

- Par Emily Barnett (*) Le ciel étoilé au-dessus de ma tête d’Ilan Klipper, avec aussi Marilyne Canto, Laurent Poitrenaux, sortie le 23 mai.

Depuis toute petite, elle observe les gens. Elle capte les tics, les voix, les comporteme­nts, elle les décortique et les absorbe. « Ce vice de l’observatio­n m’a prise très tôt. J’ai commencé par des imitations dans ma chambre. Puis j’ai compris que je n’avais pas d’autre choix que d’être comédienne, autrement je serais deve

nue sociopathe. » Depuis dix ans, Camille Chamoux analyse les expression­s de l’humanité pour « les re

transcrire au plus juste » au théâtre et au cinéma. Tout a démarré en 2006, quand elle a monté le spectacle « Camille attaque », un succès qu’elle réitère en 2012 avec « Née sous Giscard ». Dans ses shows, l’humoriste raille les bobos, le machisme et la mollesse

politique. C’est drôle, grinçant et cash, comme chez ses consoeurs Blanche Gardin ou Camille Cottin. En parallèle de ses one woman shows, Camille Chamoux a été révélée au public en 2014 par le film Les

gazelles, où elle jouait une trentenair­e célibatair­e

décomplexé­e. « On a pensé ce film comme une radiograph­ie de la jeune femme d’aujourd’hui. C’est-à-dire pas un fantasme masculin ni une icône du cinéma, mais une vraie meuf. Les gazelles off rait un éclairage sur sa vie, pas seulement ses histoires de cul, mais les mille facettes à explorer chez une femme libre de 30 ans en milieu urbain. » L’actrice et auteure insiste sur le fait que cette liberté « a un prix ». L’autonomie et l’accès au pouvoir se paient parfois par « la solitude, la nécessité de faire des choix ».

Ni leur cerveau, ni leur pénis

Camille Chamoux a décidé de ne pas choisir : entre la scène et le cinéma, les comédies et des rôles plus premier degré. Sa prestation en psychiatre dans Le ciel étoilé au-dessus de ma tête, farce sur la dépression,

est très convaincan­te. « Notre défi, à Ilan Klipper et moi, était de ne pas se faire avaler par la fonction. Ne pas surjouer la psy, mais laisser venir la personne, me laisser surprendre sans forcer la parole. » Observer, toujours. Aiguiser son regard sur chaque personne, les différente­s catégories d’êtres humains. Sur ces hommes qui continuent d’incarner un vieux patriarcat par exemple. La comédienne fustige la notion de « paternalis­me » : « C’est un résidu de la misogynie sans son apparence. Sous des dehors gentils, on infantilis­e les femmes, on leur dit de rester à leur place. » Féministe, solidaire du mouvement #MeToo, Camille Chamoux a participé au rassemblem­ent autour de la Fondation des femmes (qui soutient les victimes de violences) et se félicite de cet élan collectif. « Il faut que les hommes se rassurent : ils ne vont perdre ni leur cerveau, ni leur pénis. Aucune tête ne va tomber. Mais il faut mettre un stop à la violence et à l’impunité. »

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“J’ai compris que je n’avais pas d’autre choix que d’être comédienne, autrement je serais devenue sociopathe.”

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