Pourquoi “Le bureau des légendes” nous captive
Les espions mélancoliques d’Eric Rochant sont de retour. L’occasion de décrypter comment cette création s’est imposée comme la meilleure série télé française contemporaine.
Une intrigue géopolitique réaliste
Située au siège de la Direction générale de la sécurité extérieure et s’attachant à décrire la vie compliquée de ses espions mélancoliques, Le bureau des légendes est dès l’origine apparu comme une création singulière. Plus statique et cérébrale au départ, la série télé a évolué vers un équilibre parfait entre psychologie et action, adrénaline du terrain et chuchotements dans les bureaux gris du contre- espionnage français. Avec pour constante de se montrer, à l’instar de Homeland par exemple, ultra-précise géopolitiquement, ce qui est peu courant. Entre la crise syro-irakienne, le contre-terrorisme et la cyber-guerre ( pour cette nouvelle saison), la série tape rarement à côté.
Une réalisation collégiale
Le créateur et show runner du Bureau, Eric Rochant, a dès le début mis en place une méthode d’écriture collégiale calquée sur le modèle américain des « writers’ rooms ». Une douzaine de scénaristes travaillent sur la série et lui garantissent efficacité, réalisme et, avant toute chose, subtilité des intrigues et des ressorts dramatiques. On ajoutera que cinq réalisateurs se partagent ces dix nouveaux épisodes : Eric Rochant, Pascale Ferran, Anna Novion, Antoine Chevrollier et Laïla Marrakchi. Oui, vous avez bien lu : cela fait une majorité de femmes ! Ce qui est hautement réjouissant.
Un casting subtil
Avec leurs noms de codes savoureux (Malotru, Marie-Jeanne Duthilleul, Moule à gaufres, la Mule…), les pensionnaires du Bureau des légendes nous aimantent plus que les autres, grâce à la subtilité de leurs personnalités complexes et singulières, servies par un casting quatre étoiles : avec Sara Giraudeau, Florence Loiret-Caille ou Jonathan Zaccaï, jamais une réplique ni une mimique ne sonne faux, ce qui est rare en fiction française. A noter, cette saison : l’arrivée de Mathieu Amalric en chef sournois de la sécurité interne, chargé de faire le ménage au sein de ce bureau parfois trop sentimental avec ses propres agents… Sueurs froides en perspective. Quant à l’autre Mathieu (Kassovitz), présent depuis la première saison, il n’en finit pas de nous subjuguer, traçant son chemin de croix dans cette série où il est devenu un « damné », selon les mots d’Eric Rochant. Figure tragique, rescapé de Daech, rejeté par la France, réfugié dans un Moscou peu accueillant, il promène sa présence très physique, à l’américaine, alliée à une intériorité opaque qui fait tout son mystère. Et le plus beau personnage de fiction vu à la télévision française. Le bureau des légendes, saison 4, à partir du 22 octobre sur Canal+.