L’arrivée de la cosmétique sans eau
Rouges à lèvres, shampoings solides, gommages poudres : portés par une prise de conscience écologique, les produits de beauté ne contenant pas d’eau connaissent un engouement grandissant. Explications.
L’élément qui compose à plus de 70 % la plupart des crèmes et des shampoings est-il devenu l’ennemi public numéro un ? A l’origine de la disparition progressive de l’eau dans les formules cosmétiques : les consommateurs. « Aujourd’hui, une marque qui n’a pas d’engagement est déconnectée, surtout des jeunes. En plus d’être écologique, le sans eau s’intègre à la tendance des produits épurés, sans lactose ou sans gluten dans l’alimentaire, sans eau, donc sans conservateurs, en cosmétique », analyse Alexandra Jubé, de l’agence de conseil en stratégie de marque du même nom. D’autant que « plus il y a d’eau dans un produit, plus il est dilué, plus il faut ajouter de conservateurs pour le rendre stable », explique Alessandro Commisso, créateur de cosmétiques chez Lush. Ainsi, 50 % de l’offre de la marque anglaise, qui vient d’ouvrir boutique à Milan et Berlin, est solide. Car si « sans eau » dit sans conservateurs, c’est aussi sans contenant plastique – qui pollue 83 % de l’eau mondiale* –, et donc moins lourd en transport. D’où l’apparition de gommages en poudre chez Oh My Cream, de shampoings solides chez Cut by Fred ou Christophe Robin, et même d’un masque en tissu sec chez la maquilleuse britannique Charlotte Tilbury. « Les consommateurs veulent tout : être écoresponsables, bien sûr, mais sans céder sur l’expérience », confirme Alexandra Jubé. Un des défis de La Bouche Rouge, jeune maison de maquillage française dont les rouges à lèvres ne contiennent pas d’eau, et n’en gaspille pas non plus pour leur production : « Nous nettoyons nos machines à l’alcool et avons remplacé par du métal les moules en silicone à usage unique, utilisés pour couler les rouges à lèvres », explique Nicolas Gerlier, son fondateur. Ce qui n’empêche pas la marque, qui offre 100 l d’eau potable au Togo par produit vendu, de proposer un rouge à lèvres luxueux. « Un bel objet peut convaincre de changer d’habitude », conclut-il. (*) Orb Media 2017.