Laetitia Colombani
Deux ans après “La tresse” et son succès immédiat, la romancière raconte une nouvelle fois les femmes et leurs combats dans “Les victorieuses”*. Un roman qui documente ces vies fragiles qui ont trouvé refuge au Palais de la femme, à Paris.
Incendie
Elle grandit en banlieue bordelaise, entre un père ingénieur et une mère documentaliste. Pour s’échapper, Laetitia dévore les livres. « Un jour, le CDI du collège dont s’occupait ma mère a pris feu. C’est une des seules fois où je l’ai vue pleurer. Elle ne voulait pas jeter les livres, alors elle les a rapportés. Je me souviens de l’odeur de brûlé des couvertures. »
Actrice
Collégienne, elle intègre la compagnie Mikado, une troupe de comédie musicale, et y consacre tout son temps : « On jouait, on faisait des claquettes, on participait à l’écriture des spectacles, c’était très professionnel. On enregistrait même des disques ! » L’été, les enfants partent en tournée et elle rêve de devenir actrice. « Comme je m’intéressais aux costumes et aux décors, le metteur en scène me voyait plutôt monter des spectacles. »
Psychiatrique
Etudiante à l’école LouisLumière, elle consacre son mémoire au thème de la folie au cinéma. Elle arpente également les couloirs des hôpitaux psychiatriques et se construit une petite bibliothèque spécialisée. « J’ai commencé par Cinq psychanalyses de Freud avant d’étudier Hommage fait à Marguerite Duras, du ravissement de Lol V. Stein, de Lacan. » Pour son diplôme, elle écrit son premier scénario qu’elle réalisera dans la foulée : A la folie… pas du tout.
Cancer
A 25 ans, Laetitia décide de couper ses cheveux qu’elle porte jusqu’à la taille. « Quand la coiffeuse m’a demandé si ça me plaisait, je me suis effondrée en larmes. Aujourd’hui, je regrette de ne pas avoir donné mes cheveux à une association qui fabrique des perruques destinées aux malades. » Il y a trois ans, quand sa meilleure amie découvre qu’elle est atteinte d’un cancer, Laetitia l’accompagne choisir une perruque. « Ce moment a changé ma vie », avoue l’auteure de La tresse.
Bombay
En 2007, elle voyage à Bombay, invitée par un producteur qui veut faire un remake de A la folie… pas du tout. Sa femme la guide dans la ville. « Nous avons croisé une communauté de hijras, des transgenres qui vivent de mendicité. Le lendemain, elle m’a fait visiter des plateaux de cinéma. Pendant quelques jours, nous sommes ainsi passées d’un extrême à un autre. »
Ava
Depuis la naissance de sa fille Ava, elle s’interroge sur la société dans laquelle elle évoluera. « Pour mon prochain roman, j’ai envie d’écrire le personnage d’une petite fille. Ce sont elles les mamans de demain, celles qui porteront le monde. » Ava fut déjà l’inspiratrice de la petite fille qui refuse d’être humiliée par son instituteur dans La tresse.
Couvent
Il y a deux ans, elle découvre le Palais de la femme, bâtiment du 11e arrondissement. « J’ai tout de suite été intriguée par son nom. J’ai ensuite découvert que ce foyer pour femmes créé par l’Armée du salut avait été construit sur les ruines d’un couvent. » Elle assiste à la permanence d’un écrivain public qui aide les résidentes. « L’une d’elles a fait une demande insolite : écrire à la reine d’Angleterre pour obtenir un autographe. » Episode qu’elle reprendra dans son livre Les victorieuses, situé au Palais de la femme. (*) Ed. Grasset.