Voyage Le Kerala de Ramesh Nair
Natif de cet État du sud de l’Inde, le directeur artistique de Moynat – les sacs aux fameuses courbes et à la qualité intransigeante – nous présente ses sept endroits de prédilection pour découvrir l’âme de cette région.
Il est né dans un petit village au pied des montagnes, entre les jaquiers, les bananiers et les cempedaks, dans l’une des dernières réserves tropicales de l’Inde, le parc national de Silent Valley. Pas d’eau, pas d’électricité, pas de bus. Une enfance « peu sophistiquée », dit-il, mais qui a développé chez lui un sens aigu de l’observation et une imagination féconde. Et parce que Ramesh Nair est un homme profond, il nous propose non pas une visite touristique mais une balade dans les entrailles du Kerala. Lorsque nous lui demandons quelques mots pour définir cette région, il nous répond spontanément : « C’est maman. » Cette balade inédite est aussi une balade intime.
Le fort de Bekal, à Kannur
« Construit au XVIIe siècle, c’est l’un des plus grands forts du Kerala avec une vue éperdue sur la mer d’Arabie. Conçu pour défendre le littoral contre les attaques navales, il est aux trois quarts entouré par la mer. Une mosquée bâtie par Tipû Sultân et un temple hindouiste dédié au dieu-singe Hanumân, plus loin, sont les témoignages de l’harmonie religieuse qui règne au Kerala. »
Le sommet de la montagne Agasthyamalai
« Il atteint 1 800 m d’altitude, entre les frontières du Kerala et de Tamil Nadu, situées dans les chaînes de montagnes des Ghâts occidentaux de l’Inde du sud. Uniquement accessible à pied, c’est une réserve naturelle en péril avec plus de deux mille espèces de plantes utilisées en médecine ayurvédique, mais aussi un lieu de pèlerinage. »
La synagogue Paravur et le musée historique
« C’est la plus grande synagogue du Kerala, avec une architecture unique et locale. Elle n’est plus utilisée pour le culte, mais abrite aujourd’hui un musée rassemblant l’histoire et la culture juives, arabes et hindoues de la région. À proximité se trouve l’église Mar Thoma, fondée par l’apôtre saint Thomas en 52 après J- C., ce qui prouve que le Kerala a toujours été au coeur de nombreux carrefours commerciaux, culturels et religieux. »
Le terrain de Connolly et le canal de Nilambur
« Le lieutenant Henry Valentine Connolly créa ce qui est aujourd’hui la plus ancienne plantation de teck au monde, reliée aux villes voisines par un canal fluvial. La forêt est réputée pour sa beauté et l’on y trouve le plus ancien teck connu, nommé Kannimara. »
Les grottes d’Edakkal, à Wayanad
« Elles datent de l’âge de pierre et abritaient une communauté néolithique. On peut y observer des images et des scènes datant de presque six mille ans. Je conseille la randonnée sur les collines de Wayanad, jusqu’aux rochers et aux grottes. »
Le festival de Pooram à Thrissur
« C’est une tradition vieille de plus de deux cents ans. Cette procession des dieux et des déesses des temples Thrissur donne lieu à une parade avec des éléphants caparaçonnés, des musiciens et d’éblouissantes ombrelles ornementales. Organisé autour des mois d’avril et mai (selon le calendrier lunaire), ce festival est une célébration sensorielle, une fête des sens. »
Les oracles mystiques du Kerala
« J’en ai été témoin lorsque j’étais enfant et depuis, je suis toujours fasciné par les oracles et leurs rituels. Les oracles, appelés “komarams”, sont en contact direct avec la déesse de la guerre Bhagwathi. Ils sont considérés comme des prophètes pour les fidèles. La plupart des villages et des temples du nord du Kerala avaient des oracles traditionnels pendant mon enfance. Vêtus de rouge vif avec leurs cheveux flottant au vent, les fidèles entraient en transe et communiquaient avec le divin, en dansant et en se frappant avec une épée. Cette pratique ancestrale a diminué, mais on peut encore trouver des oracles dans les grands temples, surtout pendant les jours de fêtes consacrés à la déesse Bhagwathi. »