Marie Claire

Le questionna­ire Régis Jauffret

- Par Fabrice Gaignault

Dans son émouvant nouveau livre, “Papa”*, le romancier confronte son métier de fabricant d’existences à ses propres souvenirs d’enfance. Sa féroce lucidité, quant à elle, s’illustre dans ses réponses à nos questions, entre fantasmes musicaux, café pamplemous­se et natation.

Aimez-vous votre visage ?

J’y suis habitué. Comme tout le monde.

Êtes-vous garçon ou homme ?

Je dirais homme par provocatio­n car nous sommes dans une société où chacun veut se prendre pour un enfant. Et c’est agaçant parce que ce n’est pas vrai, on n’est pas des enfants.

Dormez-vous la nuit ?

Très mal, depuis presque toujours.

Votre mère était-elle dominante ou soumise ?

Je dirais ni l’un ni l’autre, et sexuelleme­nt, j’en ai aucune idée.

Combien de drogues vous faut-il pour vivre ?

Je n’ai pas tellement d’affinités avec les drogues. J’ai dû fumer une vingtaine de joints dans ma vie. La cocaïne, l’héroïne, je ne connais pas. Je suis assez excité comme ça. Les drogues ne peuvent rien pour moi.

Le plus beau regard que l’on ait posé sur vous ?

Les regards de mes enfants.

Citez trois amants ou amantes rêvées au cours de votre vie.

Une seule. Nico. Le Velvet, la Factory, NY City : tout cet univers autour d’elle m’a longtemps fait rêver. Je l’avais vue en concert. Elle était irrésistib­le, ivre mais presque métaphysiq­ue derrière son petit harmonium, seule au milieu de la scène.

Votre plus grand plaisir simple ?

Nager.

Votre dernière recherche Google ?

Fabrice Gaignault. (Il rit.)

Le meilleur conseil que l’on vous ait donné ?

Du critique Pierre Billard : l’important est de savoir finir un livre. C’est peut- être le moment le plus important dans l’écriture. Tout bon roman n’a qu’un but : réussir sa fin.

La dernière chose que vous ayez bue et mangée ?

Un café et un pamplemous­se.

Le goût dont vous avez honte ?

Par définition, je ne vous le dirai pas. J’ai honte de mes hontes, et c’est donc secret.

Êtes-vous violent ?

Non.

Qu’est-ce que vous ne supportez pas que l’on dise de vous ?

Que l’on mette en doute ma bonne foi, mon honnêteté dans l’écriture.

Aimez-vous votre prénom ?

Oui, et j’ai du mérite.

Fuir, s’adapter ou combattre ?

Combattre, mais dans la réalité on fuit beaucoup et on s’adapte pas mal.

La première fois où vous vous êtes senti libre ?

Quand j’ai eu mon bac.

La place du sexe dans votre vie ?

Ce n’est pas à 64 ans que je vais entreprend­re une carrière de porno star.

Pouvez-vous vous prendre en photo ?

Si vous étiez une fée et que vous pouviez offrir trois dons à un enfant naissant, lesquels serait-ce ?

Je n’en nommerai qu’un : celui d’être un artiste. Il n’y a rien de plus intéressan­t, de plus enviable, de plus fort dans l’intensité de la vie.

(*) Papa, éd. du Seuil.

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