L’effervescence du café siglé
Scrupuleusement sélectionné, torréfié et servi dans des gobelets au nom des marques de plus en plus nombreuses à ouvrir leur propre lieu, le café n’a jamais été aussi à la mode. Décryptage.
Dans la mode, il est souvent question d’attitude. Une façon de poser sa veste sur les épaules, une manière de tenir son sac et désormais pour les caféïnophiles, le choix du gobelet siglé qu’ils porteront à la main, comme si le café à emporter était devenu un nouvel accessoire. Sinon comment expliquer que certains labels investissent dans le grain à moudre comme extension de leur domaine de créativité ? En septembre dernier, Saint Laurent ouvrait au sein de son magasin amiral de la rue Saint-Honoré, à Paris, un café avec une rutilante Faema E61, la Rolls des machines. A.P.C. a ouvert à Paris un café éphémère, avec un moka torréfié exclusivement pour la marque par Coutume. « Derrière ce café, aucun enjeu stratégique, c’était juste une envie, explique Jean Touitou, fondateur d’A.P.C. Le point commun avec la mode ? Le goût de la qualité et le refus de la camelote. » Car il est question de porter le même soin dans le choix du grain de café que du fil de cachemire. Liz Clayton, coauteure avec Avidan Ross de Where to drink coffee*, abonde dans ce sens : « Ce qui lie les créatures de mode et les snobs du café, c’est l’artisanat, le goût des belles choses soigneusement sourcées mais aussi savoir repérer les marques qui comptent. » À la fois label de mode et de musique, Maison Kitsuné s’est lancé dans le café dès 2013, ouvrant des lieux à Tokyo, Paris, dernièrement New York et Séoul sans oublier l’inauguration récente d’une brûlerie au Japon et toute une gamme de mugs, verres et autres tote bags pour décliner un « art de vivre à 360° ». « Instagram a changé beaucoup de choses. Le premier Café Kitsuné à Paris, dans les jardins du Palais-Royal, c’est notre Joconde, les gens viennent de loin pour faire un post avec leur boisson », constate avec amusement Gildas Loaëc, cofondateur de Kitsuné. Car un joli gobelet laissant apparaître un coeur dessiné avec de la mousse de lait, c’est aussi instagrammable qu’un sac. Et moins cher.
(*) Éd. Phaidon, 25 €.