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Elles ne sont que 17 % à la tête de nos communes. À la veille des élections municipales des 15 et 22 mars, des réseaux de femmes travaillent à ce que la parité devienne une réalité dans nos mairies.
C’est une bataille inhabituelle qui s’affiche sur les tableaux électoraux de la ville de Nantes : toutes les têtes de listes – six au total – des municipales sont des femmes. « Ce n’est pas le hasard, sourit Johanna Rolland. J’ai été la première femme à être élue maire à Nantes en 2014. L’égalité est ma boussole, mais nous sommes encore trop peu en politique, nous sommes deux femmes à diriger une métropole sur les vingt-deux que compte la France. » Aujourd’hui, seul 17 % des maires sont des femmes. En juillet dernier, Marlène Schiappa, secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, lançait ce mot d’ordre : « Mesdames, devenez
(1) maire ! » Un objectif que partage ÉluesLocales, le plus grand réseau transpartisan d’élues actuelles et potentielles, présent dans cinquante départements. « On a voulu lutter contre l’effet “élue pot de fleurs” suite à la loi sur la parité, explique Joséphine Delpeyrat, animatrice nationale des réseaux. On est venu chercher des candidates en leur mentant : “C’est juste un soir par semaine, on veut entendre ce que tu as à dire.” Beaucoup ont découvert la charge mentale et les activités chronophages de leur fonction, voire l’hostilité quand elles ont voulu sortir de la zone
qu’on leur avait assigné. Elles ont arrêté la politique après leur premier mandat. Grâce à leurs réseaux, elles sont dans la transparence, la franchise et l’entraide. En Marche est le seul mouvement politique à le faire officiellement, ailleurs, c’est plus souterrain. »
« Candidate entre deux machos qui arrachent mes affiches »
Ce matin pluvieux de janvier, elles sont une dizaine de candidates aux municipales réunies pour une séance de mentoring collectif avec Sibeth Ndiaye 2), porte-parole du gouvernement,
( et Olga Trostiansky, présidente du Laboratoire de l’égalité, conceptrice de ce programme #ToutesPolitiques au sein d’En Marche. Les échanges sont animés, entre coups bas – « Je suis candidate entre deux machos qui arrachent mes affiches » –, conseils pratiques – « Mettez du verre pilé dans la colle, ça tiendra », « Oubliez l’agressivité, les trucs de mecs à la Henri Krasucki, apportez de la bienveillance » – et vision politique – « De quoi a besoin votre ville ? Où la voyez-vous dans quinze ans ? Incarnez le projet que vous portez ! » Pour Sibeth Ndiaye : « Elles ont eu beaucoup de courage de faire cette démarche. LREM a moins de 30 % de candidates, c’est la preuve que c’est le mandat par excellence où les femmes ont du mal à se mettre dans le bain. Elles ne croient pas être à la hauteur de la tâche. Je trouve cela troublant. » C’est parce que de nombreuses femmes la sollicitaient pour qu’elle les coache qu’Olga Trostiansky, ancienne adjointe au maire de Paris, a voulu briser l’autocensure pour qu’elles s’engagent dans les municipales. Et osent même être tête de liste. « On a un vivier de femmes à “mentorer” et de nombreu(ses)x député(e)s, ministres, élu(e)s pour les accompagner, individuellement ou collectivement. On leur donne des clés de compréhension. » Sur les codes et les usages du monde politique, les adversaires et les alliances à connaître, le calendrier électoral, les indemnités financières. « Quand les hommes sont coachés, ils demandent à progresser sur leur art oratoire, leur positionnement, poursuit Olga Trostiansky. Les femmes aussi, avec en plus les questions sur leur légitimité et la conciliation avec leur vie familiale. »
Pour Élueslocales et #ToutesPolitiques, ces municipales sont pour cette nouvelle génération de femmes politiques le marchepied vers les départementales, les régionales, et pourquoi pas les sénatoriales. L’ambition est assumée : « Vous allez beaucoup découvrir sur vous-mêmes et sur les autres, assure Sibeth Ndiaye. Vous serez de bonnes dirigeantes politiques… pour la suite. »
1. Le Parisien, 7 juillet 2019.
2. Lire son interview sur marieclaire.fr