Marie Claire

Woodkid raconte la scène, le public, le live.

- Propos recueillis par Loïs Flayac Illustrati­on Claire Martha

Que se passe-t-il sous la casquette du musicien quelques minutes avant un concert? Bientôt en tournée pour présenter son impression­nant nouvel album*, il nous parle de son rapport à l’exercice. Et nous livre ses astuces personnell­es pour un “live” réussi.

“MES RITUELS

Comme en plongée sous-marine, un sport que je pratique, j’ai surtout des rituels techniques : scotcher la liste des morceaux, vérifier les bouteilles d’eau (pas gazeuses, à températur­e ambiante), enclencher tel bouton… Manger aussi. Un plat de pâtes, en général. Et puis juste avant d’entrer en scène, Covid ou pas, on se tape toujours le coude, pas la main, avec mes musiciens, justement pour éviter les maladies… Ce qui n’a aucun sens puisqu’ensuite, on dort tous ensemble dans le tour-bus !

MA MEILLEURE VOIX

La justesse, chez moi, c’est un terrain glissant: quand je vois des vidéos YouTube de mes lives dans lesquelles je chante faux ou de manière inconforta­ble, je le vis assez mal. Alors, je travaille la voix bien en avance: échauffeme­nts, exercices de diaphragme, vocalises. D’autant que sur cet album, je monte très haut. Idéalement, pour très bien chanter, il faut être très heureux. Sinon la voix se serre, le timbre s’atténue. Une note chantée en souriant, c’est beaucoup plus beau. Sans pour autant arborer un air niais sur le visage!

MON CONCERT CULTE

En juin 2014, j’ai fait l’ouverture du Montréal Jazz Festival, un concert gratuit sur la place des Arts devant 150 000 personnes, diffusé sur écrans géants dans toute la ville. Hyper-impression­nant! Toute la semaine, il avait plu. Sauf ce jour-là. Alors les gens étaient super-heureux, comme si l’on donnait ensemble le coup d’envoi de l’été. Et ils chantaient si fort par-dessus ma voix, comme une énorme chorale, que j’en étais submergé.

MON RAPPORT AU PUBLIC

Avant que j’entre en scène, il y a une intro pendant laquelle j’écoute le public : c’est une prise de températur­e qui me dit tout de suite s’il y a de la fièvre dans la salle. Quand les spectateur­s suivent l’encéphalog­ramme de la musique, entrent dans sa pulsation, ça donne de grands moments. Mais parfois on n’y arrive pas. En festival, par exemple, c’est plus dur : les gens ne sont pas forcément là pour vous, ils parlent haut, alors il faut aller les chercher au forceps, avec plus de violence que de tendresse. Mais ça vous procure des sentiments forts.

MON CORPS SUR SCÈNE

La danse me passionne : j’adore Crystal Pite et Damien Jalet ; j’ai bossé avec Sidi Larbi Cherkaoui et on va travailler à nouveau ensemble. Moi-même, sur scène, je bouge beaucoup. Avec des contrastes entre les moments d’introspect­ion et de furie. Le pouvoir du live, c’est de faire sauter les gens, leur arracher leur pudeur, mais pour cela, il faut se mettre soi-même à nu. Se montrer en état de fragilité. Comme dans une relation amoureuse : avant de s’engager intensémen­t, on doit d’abord baisser la garde.

MON OBJET FÉTICHE

Je n’ai pas de grigri, je ne suis pas du tout superstiti­eux et n’ai aucun problème de trac. Mais j’ai quand même toujours avec moi ma casquette: noire, sans motif, sans rien, basique. Pour le reste, c’est Nicolas Ghesquière qui va créer les tenues du prochain live. (*) S16 (Barclay). Le 9 octobre à Marseille (Fiesta des Suds), le 16 au Havre (Ouest Park Festival), le 7 novembre au Mans (festival Bebop), les 2 et 3 février à Paris (Seine musicale). Toutes les dates sur woodkid.com ”

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