Marie Claire

Lous and the Yakuza, à couteaux chantés

Volontiers romantique, le R’n’B de cette jeune Belge sait aussi se faire combatif sur un premier album à l’intensité héroïque.

- Par Charline Lecarpenti­er

loin de mes chaînes et des gens «SI JE LE POUVAIS, JE VIVRAIS SEULE, que j’aime », chantait Lous and the Yakuza sur Dilemme, le titre qui l’a révélée l’an dernier et qui dit beaucoup de l’ambiguïté de cette fascinante Belge née il y a 24 ans en République du Congo. Sa voix est aussi douce que ses textes sont parfois cruels, symptômes d’une nostalgie entretenue par une jeunesse dont elle dit que le titre Sodade de Cesaria Evora résume parfaiteme­nt tout le sentiment. «Ma simple existence dans cette industrie musicale fait vivre tout un discours qui était inexistant, en tant que femme noire, en particulie­r en France où peu d’entre elles sont exposées. J’essaie de faire de mon mieux pour donner un exemple sans vouloir être exemplaire », explique-t-elle avec magnétisme dans un recoin de l’hôtel Grand Amour où on la rencontre, à Paris. Le lieu ne pouvait être mieux choisi pour cette romantique insomniaqu­e qui s’assume. « Je pense que je me ferai juger jusqu’à la fin de ma vie, mais ça ne me stoppe pas. On critique souvent mon intensité, mais je ne pense pas qu’elle soit forcément négative», affirme-t-elle. Cette tornade d’émotions qu’elle enserre depuis l’enfance dans ses cahiers et journaux – elle aurait déjà écrit trois romans épistolair­es – irrigue un premier album nécessaire et généreux pour une nouvelle génération de femmes encore trop absentes des charts pour chanter leurs luttes. En plus du titre 4 heures du matin narrant d’une voix blanche une agression dans la rue, la pochette du single de Bon acteur affiche un dessin de clitoris : «Il est peu représenté dans les manuels scolaires et plus généraleme­nt dans notre société misogyne. J’ai voulu montrer qu’il existe et qu’il n’y a rien de tabou là-dedans. Il y a encore l’excision en Afrique, qui nous touche de plus ou moins loin et qui reste un vrai sujet. C’était ma façon de popularise­r cette image », explique-t-elle avec l’aplomb d’une héroïne dont la mission ne fait que commencer.

Gore (Columbia), sortie le 16 octobre.

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