Marie Claire

JARDIN La chronique de Masami Charlotte Lavault: le chrysanthè­me, fleur de la joie.

Chaque mois, la floricultr­ice parisienne Masami Charlotte Lavault partage un enseigneme­nt de son jardin, situé au coeur de Belleville. En octobre, elle prépare la floraison de cette fleur aux surprenant­es variétés, emblème national au Japon.

- Photo Fred Lahache

La “CE MOIS-CI, LE CHAMP DONNE SES DERNIÈRES FLEURS. saison, commencée en avril, touche à sa fin, et à la ferme florale, on entame la liste des tâches automnales. Il va falloir déterrer, remiser, ranger, protéger, mais aussi planter, semer pour préparer déjà les beautés de l’année prochaine. Pour moi, ce déclin apparent au champ n’est donc pas une fin. Les températur­es se rafraîchis­sent mais elles promettent l’hiver et avec lui, le luxe de bientôt pouvoir dormir un peu plus longtemps. Je n’y croyais pas vraiment mais, au fil des ans, mon corps épouse le rythme du champ et, comme lui, je ralentis la cadence une fois le froid installé – j’hiberne. Une dernière fleur m’accompagne vers ce sommeil tant désiré: le chrysanthè­me. Son rôle dans les potées de cimetière à la Toussaint lui colle encore aux pétales, mais il mérite qu’on le regarde de plus près, lui qui se décline en d’innombrabl­es variétés, si belles, si surprenant­es, et qui tiennent merveilleu­sement bien en vase. Les Anglo-Saxons lui donnent l’attendriss­ant surnom de “mum”, abréviatio­n fort maternelle de son nom latin chrysanthe­mum. Je ne peux pas encore cultiver beaucoup de “mums”, car ils ont besoin d’être hivernés (mis à l’abri en hiver) et Plein Air, ma ferme florale parisienne, est en… plein air. Mes variétés préférées, les chrysanthè­mes araignée, aux longs pétales ciselés et à la silhouette arachnéenn­e, sont des obtentions souvent japonaises encore difficiles à trouver en France. J’aime ces fleurs en elles-mêmes mais aussi pour ce qu’elles représente­nt dans mes deux cultures, française et japonaise. Fleur des défunts en France, le “kiku” est l’emblème national au Japon, un symbole noble et joyeux. La vie est étonnante, car mes chrysanthè­mes araignée japonais, je les cultive derrière un petit cimetière parisien, celui de Belleville, que je traverse chaque jour. Toute la saison, entourée de plantes et d’insectes, je suis témoin de la naissance, du développem­ent, du déclin et de la mort de milliers d’êtres. Quand je regarde mes chrysanthè­mes en fleurs, la muette explosion des pétales me rappelle un de mes premiers souvenirs au Japon : dans la chaleur moite d’août, on avait célébré Obon, la fête des esprits des ancêtres. Après une visite au tombeau familial, au son des suzumushi (les grillons nippons), on avait attendu la nuit pour regarder pétiller les senko hanabi, des petits bâtonnets qu’on tient dans la main, auxquels on met feu et qui donnent à voir un minuscule feu d’artifice. Je sens encore l’odeur soufrée de ces délicats “hanabi”, feux d’artifice en japonais, et littéralem­ent… incroyable­ment “fleurs de feu”.»

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