Marie Claire

Masterclas­s : l’art et la manière de rôtir la volaille.

- Par Elvira Masson Photos Pierre Lucet-Penato

Dinde, poularde ou chapon? Le repas de fêtes frappé du sceau “tradition française” ne semble en tout cas pas prêt de se passer de volaille.

À la condition sine qua non d’investir dans un produit bien élevé, et de respecter notre méthode de cuisson garantie anti-dessécheme­nt: c’est la promesse d’un régal.

QUE CELUI OU CELLE QUI N’A JAMAIS SORTI DU

le soir de Noël, une dinde racornie ou, FOUR, presque pire, un chapon à moitié cru sur le coup de 22h15 lève le doigt, il ou elle peut s’abstenir de lire ce qui suit. Pour les autres, dont nous sommes, il nous a paru utile de livrer ici quelques conseils pour s’éviter un four – au sens figuré. Longtemps, à partir du XVIIIe siècle, on a mangé de la dinde farcie à Noël. Mais avant cela, en Europe, il était coutume de déguster de l’oie, symbole de protection et prospérité. L’oie, qui a encore les faveurs de certaines régions de France, l’Alsace par exemple, mais également du Danemark. Plus grosse que le poulet et moins coûteuse que l’oie, la dinde a prospéré jusqu’à ce que l’on s’en lasse depuis une bonne dizaine d’années dans les foyers foodie, faute de parvenir à en trouver de suffisamme­nt bien élevées pour être à la fois denses et moelleuses, fermes et juteuses. Et puis, elles atteignent souvent les 10 kg, alors à moins d’être plus de quinze à table, ça fait beaucoup de restes, sans compter qu’il faut le plat de cuisson idoine. Les producteur­s de volaille qui attirent nos faveurs, de la Bresse au Gers en passant par les Landes et la Dordogne, pratiquent un élevage lent, extensif, en plein air. Ce sont ces artisans de talent, dont Antonin Bonnet. Chef du restaurant Quinsou, il propose les produits dans sa Boucherie Grégoire (1). Celle qu’il a rôtie pour nous est une poulette de Bresse, «mais un bon poulet fermier peut faire l’affaire, ou une pintade ». Elle a 100 jours et vient de chez Olivier Dandieu(2),

qui élève poulets, poulardes et canards dans les règles de l’art, à Hagetmau, dans les Landes. Parmi ses chouchoute­s, on trouve aussi les volailles de La Ferme en Coton(3), dans le Gers, qui travaille en bio. Les poulets y vivent dans un parcours enherbé et arboré dès l’âge de 5 semaines et, jour comme nuit, ne sont jamais enfermés. Nourris avec des céréales ou du maïs bio des environs, ils sont abattus à 14 semaines minimum. Voilà pour la base, un produit d’excellence. L’affaire se corse lorsque l’on passe à la cuisson. Il y a tellement d’écoles que l’on s’y perd. Les adeptes de la méthode anglosaxon­ne défendent une cuisson à four très chaud, poulet huilé et salé au préalable, pendant 1h30 au minimum, la durée étant fonction du poids. Le chef Antoine Westermann, grand pro du poulet – son restaurant Coq Rico (4) s’en est fait la spécialité –, recommande, lui, une cuisson à 220 °C, sur un côté pendant 20 min, puis sur l’autre pendant 20 min, suivie de 30 min dans sa position «traditionn­elle» en l’arrosant… toutes les 5 min. Et pour finir, un temps de repos emballé dans du papier aluminium, histoire de détendre les chairs. Antonin Bonnet nous livre sa recette, qui nous a autant surpris que convaincu. La cuisson se déroule dans une cocotte à four monté au plus chaud. Et sans arrosage. La volaille cuit (avec une variable d’ajustement en fonction de son poids) 20 min à couvert puis 10 min en ôtant le couvercle. Puis on sort la cocotte du four et la cuisson se poursuit d’elle-même, en remettant le couvercle, pendant 30 min. Un peu rapide? Pas du tout, la chair est moelleuse et dense. Et la peau craquante. Pour la farce, pas indispensa­ble mais si festive, le fin du fin consiste à contiser la volaille, c’est-àdire à glisser le mélange, en s’aidant d’une poche à douille, sous la peau préalablem­ent soulevée avec les doigts – plus facile à faire qu’il n’y paraît. Promis, ce n’est pas sorcier. Gourmandis­e totale, cette farce 100 % veggie marie trompettes-de-la-mort, champignon­s de Paris avec pain frit à l’huile d’olive. La perfection tient à peu de chose.

1. 29, rue de l’Abbé-Grégoire, Paris 6e. laboucheri­egregoire.fr 2. maisondand­ieu.fr

3. lafermeenc­oton.fr 4. 98, rue Lepic, 18e. lecoqrico.com

Recette d’Antonin Bonnet, réalisée par Sophie de Prado, au restaurant Quinsou, 33, rue de l’Abbé-Grégoire, Paris 6e. quinsoures­taurant.fr

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