Marie Claire

Gloria Kabe, nouvelle reine de la cuisine afro-végane

- Par Elvira Masson Photos Anaïs Boileau

On a commencé par rencontrer Gloria Kabe sur les réseaux sociaux. Dans un océan de comptes instagram formatés, le sien (elle s’y prénomme Glory) – matrice de son métier de cheffe privée et de traiteure – nous a happées. Par sa fraîcheur, son énergie et sa singularit­é. Du rouge, du jaune, du vert, des couleurs en trombe. Banane plantain, gombos, patate douce, pickles, manioc à donner le tournis. Des burgers (notamment son «big fat burger» veggie d’anthologie), des taboulés, des flatbreads et des pancakes. Comfort food? Mille fois oui, mais végane et riche en intentions, à commencer par celle de faire plaisir en faisant du bien.

Elle nous ON DÉBARQUE CHEZ ELLE UN MATIN DE SOLEIL. embarque pour faire les courses au marché et dans les épiceries africaines de Château-Rouge, dans le 18e arrondisse­ment parisien. Elle connaît tout le monde et tout le monde la connaît. Pour Gloria, le monde est un village. Du Val d’Oise, où elle est née il y a 33 ans d’un père d’origine tchadienne et d’une mère d’origine congolaise, au Brésil qui l’inspire tant en passant par Londres, où elle a vécu et qui a vu son talent exploser, elle est partout chez elle. Peu diserte sur ses origines : « Je ne me définis pas tant ainsi, la vie de ma famille n’a pas été facile, pour pas mal de raisons, politiques en partie. Même si mon héritage africain m’est cher, ce sont mes choix qui ont fait de moi la personne que je suis devenue. » Le choix du nomadisme, des sauts d’une ville à l’autre, d’un continent à l’autre. Le choix du véganisme, aussi. Elle y est venue de façon empirique. «J’ai toujours été celle, à la maison, qui ne mangeait pas trop de viande. Au Brésil, j’ai découvert le monde de la cuisine afro-brésilienn­e, si proche de ce que je connaissai­s et si différente à la fois.» C’est là qu’elle décide d’abandonner toute forme de protéine d’origine animale « parce que ça ne convenait ni à mon corps ni à ma morale» et de faire de la cuisine son métier, sans autre formation que sa curiosité. Sa cuisine est de l’ordre du « plus » : plus de goûts, de couleurs, de créativité. « Je joue beaucoup du cru et du cuit, à la fois pour créer un jeu de textures et doper les apports en vitamines et en fibres. (suite p. 216)

Je crois à une cuisine qui rend heureux. » Pour être heureux, il faut être bien dans son corps, «je veux soigner par la nourriture». Elle étudie la naturopath­ie, est incollable sur les vertus des plantes, et nous annonce un menu «paléo, alcalin, vegan et sans gluten ». Que demander de plus? Que ce soit bon. Ça l’est. En quelques minutes, elle est en place, après avoir farfouillé dans la boîte à outils rouge Ferrari qui lui tient de malle à épices, la plupart venant de chez Shira, exceptionn­el dealer de poivres, de mélanges et de piments, produits de manière responsabl­e.

Ni avec la mise GLORIA NE BADINE PAS AVEC LE SOURCING. en place. Tout est millimétré sur ce minuscule plan de travail, qui lui permet d’envoyer des vingtaines de box repas en livraison. Elle découpe la racine de manioc – «il faut bien la peler, hein, la peau est toxique». C’est son produit préféré, sous toutes ses formes: racine cuite à l’eau, fécule (la farine des Brésiliens). Elle pétrit la fécule pour en faire la pâte de ses flatbreads croustilla­nts qu’elle va garnir de gombos à peine saisis. « Parfois, à la place du manioc racine, j’utilise de la banane plantain verte (mûre, elle n’est plus alcaline).» C’est quoi, au juste, un régime alcalin? «J’ai beaucoup étudié le sujet, tiens je t’offre ce livre c’est passionnan­t ! C’est un régime fondé sur le rééquilibr­age acido-basique du corps en favorisant certains aliments, fruits, légumes, racines, tubercules, oléagineux et légumineus­es.» Glory nous fait alors goûter un houmous de niébé, le haricot africain magique, fameux «black eyed peas» américain, ou haricot cornille en français. Une bombe de délicatess­e. De l’autre main, on picore des fleurs d’hibiscus confites dans un sirop au naturel, pimpé avec un peu de badiane. Le sirop ainsi obtenu viendra arroser les pancakes déments à la fécule de manioc, avec lesquels on va clore ce menu. Une recette signature que l’on retrouve dans son service de livraison au hashtag qu’on adore #glorytoyou­rtummy (gloire à ton ventre). On la quitte après s’être régalé et avoir eu envie de tout changer dans notre cuisine. Et elle bourre le sac d’Anaïs, la photograph­e, de doggy bags remplis de taboulé de fonio. Glory, Glory, hallelujah.

1. glorykabe.com Instagram: @glory_kabe

2. Alkaline plant based diet, Reversing Disease and Saving the Planet with an Alkaline Plant Based Diet d’Aqiyl Aniys, éd. Createspac­e Independen­t Publishing Platform.

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C’est chez elle, sur ce minuscule plan de travail, que Gloria Kabe réalise ses plats, qui explosent de saveurs et de couleurs.
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