Marie Claire

Féministe ta mère

Chaque mois, la journalist­e Giulia Foïs s’attaque à un stéréotype qui colle à la peau du mouvement #MeToo. Et, parfois, au cerveau de sa mère, pourtant bien constitué.

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«Berry, elle s’en foutait. PPDA, depuis sa fausse interview de Castro, elle le conchiait. Mais Duhamel, ça lui a foutu un coup. “Oh non, pas lui…” répétait ma mère à la sortie du livre de Camille Kouchner*. Pas celui qui, à force de s’inviter chez elle, par la télé, par la radio, y était comme chez lui. Elle avait acquiescé, souvent, quand il avait parlé. Aurait-elle pu, voire dû, se douter que? Ben oui et non, Mam’s. Non, parce que les violeurs portent rarement un pin’s annonçant la couleur. Mais oui, parce qu’on les trouve à tous les étages de la société, diplômés ou décérébrés, vieux ou jeunes, noirs ou blancs. Qu’avec 94 000 femmes violées chaque année et trois à cinq enfants par classe victimes de violences sexuelles, ça nous fait un paquet de violeurs ou d’agresseurs. Sous le nez. “Oui mais lui, il avait l’air de comprendre si bien le monde… Il nous donnait l’espoir de le changer.” Oui et non, Mams’! En fait, il le comprenait si bien qu’il n’avait aucune envie de le changer. Il savait, consciemme­nt ou pas, qu’il appartenai­t à une catégorie sociale dominante, chose qui lui permettait de disposer du corps de ceux qu’il dominait et ce, dans une quasi totale impunité, puisque 1 % seulement des violeurs finissent condamnés aux Assises… Alors il s’est gavé. De son beau-fils, comme d’autres l’ont fait de leur fille, de leur femme, ou de la minette du coin de la rue. Mais le monde a changé et il ne l’a pas vu venir. Le sien s’est peu à peu écroulé. Son pouvoir s’est effrité. Et lui, comme les autres, a mis du temps à s’en rendre compte. Ça, je te l’accorde, Mams’, c’est un peu décevant, de la part d’un mec intelligen­t.»

(*) Suite à la parution, une enquête a été ouverte par le parquet de Paris.

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