“La France s’engage sur le droit de la femme à disposer librement de son corps et de sa sexualité”
Quel est votre rôle en tant qu’ambassadrice ?
Aux Affaires étrangères, où il existe des ambassadeurs sur des thématiques transversales, le poste pour les droits des femmes a été créé en 2019, j’en suis la première titulaire. Je porte la voix de la France sur l’égalité et la défense des droits des femmes dans toutes les instances internationales. On est tout le temps dans la négociation sur des textes et des résolutions au Conseil des droits de l’homme à Genève, à l’ONU, et au sein de l’Union européenne où des États conservateurs contestent aujourd’hui l’expression « gender equality ». Je suis une vigie aux côtés de mes collègues diplomates.
Vous êtes aussi secrétaire générale du Forum Génération Égalité. Organisé par l’ONU, il se tiendra à Paris…
Ce Forum Génération Égalité est en soi l’incarnation de notre politique féministe puisque le président a souhaité que la France l’accueille. Un moment historique car ce sommet n’a pas eu lieu depuis l’édition de Pékin, il y a vingt-six ans. On va lancer des coalitions d’actions et prendre un certain nombre d’engagements. On a réussi à mobiliser, dans le contexte actuel de recul des droits des femmes et de montée en force des conservatismes, de nombreux États qui ne sont pas les habituels bons élèves féministes comme la Suède, le Canada, mais des pays comme l’Argentine, l’Afrique du Sud, le Kenya, la Corée du Sud, le Burkina-Faso, l’Arménie…
Mais d’autres pays, comme l’Arabie Saoudite, la Turquie, la Pologne, ne participent pas au Forum Génération Égalité…
La porte est ouverte à tous les États mais avec une condition forte, une première pour un sommet diplomatique: l’obligation de prendre des engagements concrets et ambitieux sur les cinq prochaines années, et devenir ainsi redevables devant la communauté internationale et leur société civile. Des chefs d’État s’engagent, mais aussi des ONG, des organisations de la jeunesse, des fondations philanthropiques, et ça, c’est vraiment inédit. Travailler avec la société civile, accompagner, financer, mettre en réseau de solidarité les militant·es met la pression sur les gouvernements.
La France a choisi de défendre la santé et les droits reproductifs et sexuels…
On a six coalitions, aux États de choisir leur thématique: les violences basées sur le genre, l’émancipation économique, les femmes et le climat, la place des femmes dans les technologies et l’innovation, les droits et la santé sexuels et reproductifs, et le leadership féministe. La France, pays hôte, s’engage sur le droit de la femme à disposer librement de son corps et de sa sexualité. On voit les attaques concertées et violentes dans des pays voisins, on sent monter chez nous une petite musique de conservatisme sur l’avortement. Les pays plus progressistes ont compris qu’il fallait être beaucoup plus offensifs aujourd’hui.
Pourquoi tenez-vous à préciser que vous êtes enceinte ?
Je suis enceinte de sept mois et en réaction à un certain nombre de réflexions, je veux rappeler qu’on peut être élue de la nation, ambassadrice, PDG et avoir une carrière compatible avec une maternité. On parle peu de la grossesse. Et j’ai la chance de faire partie de la première promotion de femmes dont les conjoints vont bénéficier du congé de paternité.
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