Cap sur le Sud et ses nouveaux lieux d’exposition.
1. LE PLUS EXPÉRIMENTAL: LA FONDATION LUMA, À ARLES
Ce n’est plus l’Arlésienne. Après des années de travaux, la Fondation Luma a bien ouvert le 26 juin dernier, avec sa tour de verre et de métal torsadés conçue par l’architecte américain superstar Frank Gehry, qui a déjà signé la Fondation Louis-Vuitton, à Paris. Cet édifice de 56 m de haut est le phare de ce complexe artistique et culturel, qui compte aussi 11 ha de parc, un vaste étang et d’immenses anciens ateliers ferroviaires convertis en espaces d’expositions et de performances. La Fondation Luma, impulsée par la collectionneuse suisse Maja Hoffmann, va constituer l’un des grands laboratoires de l’art contemporain en France. Et ambitionne de réunir les créateur·rices du monde entier, reconnu·es ou émergent·es. The place to see… and to be. luma-arles.org 2. LE PLUS CHIC: LA GALERIE HAUSER & WIRTH, À MONACO Quand la galerie Hauser & Wirth décide de créer une nouvelle antenne, le monde de l’art contemporain retient son souffle. C’est la galerie des plus grands, de Cindy Sherman à Annie Leibovitz, en passant par Mike Kelley et Subodh Gupta… Elle dispose déjà de quatorze adresses dispersées partout dans le monde (New York, Los Angeles, Hong Kong, Londres, Zurich…) et voici qu’elle vient se poser sur le rocher de Monaco. L’espace, qui dispose de 9 m sous plafond, est à deux pas du célèbre Hôtel de Paris Monte-Carlo, et s’offre pour son inauguration une exposition « Louise Bourgeois. Maladie de l’Amour. » Une de ses oeuvres fameuses, une énorme « Araignée » en bronze de plus de 3 m (1996), orne pour tout l’été le jardin qui fait face à la galerie. hauserwirth.com 3. LE PLUS MINIMALISTE: LA FONDATION CAB, À SAINT-PAUL-DE-VENCE
Le village de Saint-Paul-de-Vence bénéficiait jusqu’à présent d’une renommée mondiale grâce à la Fondation Marguerite et Aimé Maeght, consacrée aux grands noms de l’art moderne. Désormais, on se rendra aussi à Saint-Paul pour visiter la Fondation CAB, dont la collection est centrée sur l’art minimaliste, avec des fers de lance tels que Sol LeWitt, Donald Judd, Robert Morris, François Morellet ou Yvonne Rainer… Cette nouvelle antenne française de la fondation mère, qui se trouve à Bruxelles, est installée dans un superbe bâtiment des années 50, cerné d’un jardin arboré, avec vue sur le cap d’Antibes. Du coup, les quatre chambres d’hôtes et le restaurant qui complètent les espaces d’exposition ont de fortes chances d’être pris d’assaut. fondationcab.com 4. LE PLUS DÉMOCRATIQUE: LE CENTRE DE LA PHOTOGRAPHIE, À MOUGINS
Il n’y avait pas de grand musée de la photo dans le sud de la France. Le Centre de la photographie, qui ouvre le 3 juillet dans le joli village de Mougins sur la Côte d’Azur, vient donc combler un manque. Et la ville a vu les choses en grand: deux plateaux d’exposition dédiés en priorité à la création contemporaine, un centre de documentation, une résidence d’artistes et un espace consacré aux ateliers pédagogiques, s’adressant en priorité à la jeune génération, qui devrait ainsi apprendre à décrypter le flux d’images qui font notre quotidien. La photographe espagnole Isabel Muñoz ouvre le ban avec une galerie intense de portraits de yakuzas et de danseurs de butō, et des tirages platine confondants de beauté. ¡Olé! cpmougins.com
Depuis trente ans, cette photographe ghanéenne-russe parcourt le monde pour saisir le quotidien des diasporas noires. Les Rencontres d’Arles (1) nous offrent cet été l’occasion d’explorer le travail passionnant de celle qui a décroché le prix Women in Motion 2021. Décryptage.
UNE EXPÉRIENCE DE LA MIGRATION
Née en 1964 en Bulgarie d’un père ghanéen et d’une mère russe, Liz Johnson Artur a grandi en Allemagne avant de passer par New York et de s’établir à Londres. Autant dire que la photographe est un « pur produit de la migration », comme elle le confie. Sans doute est-ce pour cette raison qu’elle documente depuis trente ans les communautés noires, au gré de leur quotidien, leurs réjouissances et leurs rites. Elle a nommé ce corpus composé de centaines de tirages «Black balloon archive».
UNE OUVERTURE SUR LE MONDE
Après une jeunesse dans des environnements blancs, Liz Johnson Artur, à 20 ans passés, a découvert Brooklyn, à New York, où se concentre la communauté afroaméricaine. Devenue photographe et portraitiste de stars (Lady Gaga, Amy Winehouse, Mos Def, les Spice Girls…) pour des magazines comme Vibe, Faber et i-D, elle a voyagé partout dans le monde, profitant de ses équipées en Europe, en Afrique ou aux Caraïbes pour enrichir son travail sur les diasporas noires.
DES QUESTIONNEMENTS SUR LA MASCULINITÉ À Arles, Liz Johnson Artur participe cet été à «Masculinités. La libération par la photographie » (2), une exposition collective qui analyse le concept de masculinité de 1960 à nos jours via les oeuvres de cinquante artistes. Parce que ses images s’inscrivent dans les problématiques du moment – patriarcat, stéréotypes masculins, perception des hommes par les femmes, politiques raciales –, elle a reçu en 2021 le prix Women in Motion, qui salue la carrière d’une photographe emblématique.
UNE APPROCHE COLLABORATIVE
Tandis que les médias ont tendance, selon la photographe, à déshumaniser les Noir·es, son travail réfute tout cliché et reflète la capacité de ses sujets à déterminer comment ils se présentent. Elle produit ainsi des portraits qui la renvoient à ses questionnements sociétaux – comment rendre compte de communautés invisibilisées? – mais aussi sur sa pratique photographique – comment établir un rapport dépourvu de domination entre elle et les personnes qui posent devant son objectif?
1. Rencontres de la photographie d’Arles, du 4 juillet au 26 septembre 2021. rencontres-arles.com
2. À Mécanique Générale. Elle participe aussi à l’exposition collective «The new black vanguard. Photographie entre art et mode», à l’église Sainte-Anne.