Judith Milgrom
Saison après saison, la fondatrice de Maje affine son vestiaire féminin et urbain. Pour nous, elle évoque sa mère, sa première muse, son expérience d’entrepreneure et ses derniers projets.
Vous venez de lancer une capsule active wear avec Varley, comment avez-vous découvert cette marque ?
Grâce à une amie de Los Angeles. En regardant le site, j’ai adoré l’univers, cette façon de mélanger de l’active wear avec des pièces de ville. Spontanément, j’ai contacté la fondatrice Lara Mead dont j’ai aimé l’approche écoresponsable. Notre collaboration a demandé beaucoup de travail pour que la collection corresponde à nos deux approches mais je suis enchantée du résultat. Aujourd’hui, les frontières entre les vestiaires sont devenues fluides. On débute sa journée en faisant du sport, on garde ses leggings, on enfile un beau manteau et on poursuit sa journée. L’active wear est entré naturellement dans nos garde-robes.
Votre sac best-seller, le M, fête ses 5 ans. Comment expliquez-vous sa longévité ?
À l’époque, on nous pressait pour faire de la maroquinerie. J’ai mis du temps à trouver une forme qui épouse la silhouette Maje. Je déteste les sacs de dame qui encombrent, je voulais un modèle qui accompagne la Parisienne active, qu’elle « l’oublie » en le portant en bandoulière pour travailler, accompagner les enfants à l’école, aller au marché le week-end. Depuis son lancement, on s’amuse en le déclinant en pailleté, argenté, patchwork, crochet, avec des clous… Pour cet anniversaire, on en a imaginé des versions très mode comme le mini avec des franges XXL, qui accessoirise une tenue comme le ferait un beau bijou.
Vous avez fondé Maje en 1998. Quel regard portezvous sur votre expérience de cheffe d’entreprise ?
J’ai la chance de faire un métier que j’aime, je n’ai jamais eu l’impression d’aller au labeur. Et puis je travaille en famille depuis le début, c’est une force. Quand Maje a commencé à prendre de l’ampleur, il a fallu s’entourer des bonnes personnes, consolider ce que j’avais créé pour le faire grandir et le développer à l’étranger. J’ai choisi de partager l’aventure avec des talents. Cela peut engendrer des frustrations car on n’est pas toujours d’accord mais cela m’a évité d’être prise dans le piège de tout porter seule et que cela devienne un fardeau. J’ai toujours été sûre de moi professionnellement, plus que dans ma vie privée d’ailleurs où je peux me sentir inquiète.
Quand on devient une marque internationale, cela change-t-il la façon de concevoir les collections ?
Pas vraiment, car si l’on y réfléchit, à quelques nuances près, la vie des femmes aujourd’hui est la même que lorsque j’ai commencé. Elles vont au bureau, sont actives, s’occupent de leur famille. Je ne dessine pas en pensant à mes envies. Quand je suis au studio, j’enfile ce que j’appelle mon «bleu de travail» pour imaginer des vêtements pour les femmes Maje. La première d’entre elles a été ma mère. Elle était tellement contrainte par la vie qu’elle faisait passer ses désirs après sa famille. Quand j’ai commencé, je dessinais pour elle, pour qu’elle soit toujours jolie et apprêtée sans que cela ne lui complique la vie.
Vous avez à coeur de réduire au maximum votre impact environnemental. Quel est l’objectif ?
Nous avons commencé avec nos jeans il y a quatre ans, nous développons les tissus écoresponsables et le coton bio, nous minimisons notre impact carbone. À terme, je voudrais que 100 % de la collection soit éco-conçue. Je viens d’une famille où l’on n’achetait que des matières premières. Du bois pour fabriquer nos meubles, de la laine pour tricoter nos pulls, de la farine pour faire du pain… Cette façon respectueuse de consommer est ancrée dans mes gènes et je suis fière d’avoir réussi à la transmettre à mes enfants.