Marie Claire

LE QUESTIONNA­IRE DE ISABELLE CARRÉ

Alors qu’elle publie son troisième roman (1), dont l’héroïne se redécouvre à la faveur d’une usurpation d’identité, la comédienne (2) se dévoile sans fard entre tartines de marshmallo­ws, torride enthousias­me pour Penélope Cruz et nostalgie des années 80.

- Par Fabrice Gaignault

AIMEZ-VOUS VOTRE VISAGE? Oui, j’aime le voir vieillir car il me raconte davantage de choses que lorsqu’il était plus jeune.

Il a longtemps été un peu trop lisse à mon goût.

ÊTES-VOUS FILLE OU FEMME? J’ai l’impression d’être femme depuis l’adolescenc­e. J’ai été les parents de mes parents.

DORMEZ-VOUS LA NUIT?

Pas assez. Quand je joue au théâtre, je m’endors tard et me lève très tôt parce que j’emmène ma petite dernière à l’école. Je dois cuisiner dès 7 heures du matin pour préparer les lunch boxes de mes enfants parce qu’ils n’ont pas de cantine. Je dormirai quand je serai bien vieille ! (Elle rit.)

VOTRE MÈRE ÉTAIT-ELLE DOMINANTE OÙ SOUMISE? Soumise. On pourrait croire que ma mère reproduisa­it un vieux modèle féminin, mais c’était en fait une façon de faire fonctionne­r son couple un peu bancal.

COMBIEN DE DROGUES VOUS FAUT-IL POUR VIVRE?

Le théâtre, définitive­ment: j’en ai besoin pour vivre. Le vin : toujours deux verres, pas moins, pas plus, après une représenta­tion. Ça m’est indispensa­ble pour l’atterrissa­ge. L’écriture : quand on met les mains dans le cambouis, on ne peut plus les enlever! Enfin, les sourires et les odeurs de mes enfants, ainsi que les mots échangés avec eux.

LE PLUS BEAU REGARD QUE L’ON AIT POSÉ SUR VOUS? Celui de mes enfants.

CITEZ TROIS AMANTS ET AMANTES RÊVÉ·ES

AU COURS DE VOTRE VIE.

J’en ai quatre. Le magnifique Joaquin Phoenix, le drolatique Bill Murray, le beau Barack Obama et la renversant­e Penélope Cruz, qui me donnerait presque envie de virer ma cuti.

VOTRE PLUS GRAND PLAISIR SIMPLE ?

Regarder les vagues se casser sur la plage, à Saint-Jean-de-Luz ou ailleurs.

VOTRE DERNIÈRE RECHERCHE GOOGLE ?

Barack Obama. Je voulais vérifier notre différence d’âge. Dix ans, ça va encore pour être amants ! (Elle rit.)

LE MEILLEUR CONSEIL QUE L’ON VOUS AIT DONNÉ. Il vient de Jean Cocteau : «Ce qu’on te reproche, cultive-le, c’est toi. »

LA DERNIÈRE CHOSE QUE VOUS AYEZ BUE ET MANGÉE?

Des Chamallows fondus sur une tartine (recette de ma cadette) et un kir royal.

LE GOÛT DONT VOUS AVEZ HONTE ?

Justement… le kir royal, depuis qu’un soir, un grand chef m’a dit que c’était complèteme­nt ringard comme apéritif. J’assume. Je sais que ça fait très

années 80, mais c’est pour ça que ça me plaît beaucoup. J’aime l’esthétique et l’ambiance de ces années-là.

QUE NE SUPPORTEZ-VOUS PAS QUE L’ON DISE DE VOUS?

Des réflexions sexistes où l’on devine une certaine condescend­ance. Le côté : «Ce n’est qu’une petite actrice, de quoi se mêle-t-elle ? »

Je me sens quand même assez costaude mais j’ai parfois l’impression qu’on veut m’expliquer la vie. Et ça ne passe pas.

ÊTES-VOUS VIOLENTE ?

Je le suis rarement, mais quand ça m’arrive, je retourne systématiq­uement cette violence contre moi. Je m’énerve et je pleure en même temps. J’en veux presque plus à moi-même qu’à l’autre.

POUVEZ-VOUS PRENDRE UNE PHOTO DE VOUS?

POUVEZ-VOUS SORTIR SANS MAQUILLAGE DANS LA RUE? Oui, tout le temps! Je ne me maquille que pour travailler. J’aime bien sentir le vent sur mon visage. C’est agréable de ne pas avoir de couches sur la figure.

AIMEZ-VOUS VOTRE PRÉNOM? Je l’accepte bien, même s’il fait années 80, d’ailleurs plus aucune petite fille ne se prénomme ainsi. Ça ne me dérange pas qu’il passe pour daté.

FUIR, S’ADAPTER OU COMBATTRE?

J’ai commencé par fuir puis par m’adapter. Maintenant, je me sens prête à combattre. On possède plutôt l’âme combattant­e à l’adolescenc­e, mais je ne me sens réellement forte qu’aujourd’hui. Vieillir possède d’énormes avantages de ce point de vue.

LA PLACE DU SEXE

DANS VOTRE VIE?

Je dirais: un peu, beaucoup, passionném­ent, à la folie, pas du tout, mais pas dans cet ordre.

SI VOUS ÉTIEZ UNE FÉE ET QUE VOUS POUVIEZ OFFRIR TROIS DONS À UN ENFANT NAISSANT, LESQUELS SERAIT-CE ?

La confiance, la créativité et l’empathie.

1. Le jeu des si, éd. Grasset, 19 €.

2. Dans Les amants de la Commune de Laurent Seksik, avec aussi Pierre Deladoncha­mps, les vendredis, samedis et dimanches jusqu’au 24 avril au théâtre Antoine. theatre-antoine.com

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