Marie Claire

Riposte féministe* À la colle avec les “colleuses”

- Par Maroussia Dubreuil

Présenté au dernier Festival de Cannes, ce documentai­re enthousias­mant donne un visage à ces militantes de l’ombre qui dénoncent les féminicide­s et les violences sexistes. Marie Perrenès, coréalisat­rice avec Simon Depardon, nous en détaille les enjeux.

Quelle a été l’origine du projet?

Un matin, Simon et moi avons découvert un collage en bas de chez nous, à Paris : «Femmes agressées, battues, violées, vous n’êtes pas seules. On vous croit.» Comme les lettres étaient encore fraîches et pleines de colle, nous avons eu la sensation d’une rencontre manquée. Quelques jours plus tard, je suis allée coller et j’ai eu envie de garder une trace cinématogr­aphique de ces mots éphémères. L’idée était de filmer des individual­ités derrière le collectif. Nés au début des années 90, il nous semblait possible de faire le pont entre cette génération de jeunes colleuses, et les militantes des années 70 comme Claudine Nougaret, notre productric­e (mère de Simon, épouse et collaborat­rice de Raymond Depardon, ndlr).

La pratique relève de l’affiche sauvage. Comment s’est déroulé le tournage? Beaucoup de collages se sont passés la nuit. À Gignac, de jeunes hommes ont agressé verbalemen­t des militantes. La présence de la caméra n’y a rien changé… Elle n’a jamais été synonyme de protection. Notre objectif était de montrer que les colleuses prenaient la rue et marquaient leur territoire. C’est pourquoi nous avons décidé de ne pas partir caméra à l’épaule, ce qui aurait conduit à une forme d’urgence, mais de privilégie­r le plan fixe.

Quelle a été l’influence de Raymond Depardon et de Claudine Nougaret, qui a aussi été réalisatri­ce et ingénieure du son par le passé?

Nous nous sommes inscrits dans la lignée de leur cinéma, avec cette idée de sublimer nos protagonis­tes et leur élan militant. Pourquoi une personne du réel n’aurait pas le droit à la même qualité cinématogr­aphique que Brad Pitt ou Monica Bellucci? Cela a aussi été un sacré défi de trouver des financemen­ts… Rien que le mot «féministe» du titre est encore trop souvent perçu comme un gros mot.

(*) En salle.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France