LA CONVERSATION AVEC Tory BURCH
La créatrice américaine fête les 20 ans de sa marque. Plus que jamais, elle travaille ses vêtements en pensant à leur durabilité. Et promeut aussi l’entrepreneuriat féminin à travers la fondation qui porte son nom.
Cette saison, vous avez voulu une collection qui « libère l’esprit », quelles en ont été les inspirations ? Dans ce monde chaotique, je voulais repenser l’idée de l’«effortless» dont j’ai développé une nouvelle approche. Choisir des matières stretch pour libérer le mouvement, repenser le « tailoring », puiser dans le vestiaire masculin, créer du volume sans ajouter de poids et, surtout, imaginer des pièces qui durent, que chacune peut mélanger avec sa garde-robe.
Votre marque a 20 ans, comment abordez-vous cet anniversaire ?
Dans mes collections, je m’autorise enfin à livrer une vision plus personnelle. J’ouvre un nouveau chapitre et c’est excitant ! Cette envie de montrer que la marque est différente de ce qu’on en attend m’a guidée pour réimaginer nos pièces signature en les ancrant dans l’époque. Je reste attentive aux innovations, que ce soit dans le choix des tissus comme le Tencel organza de ma prochaine collection, la commercialisation, la dimension environnementale, l’IA mais aussi les jeunes créateur·rices, à l’image de ce programme d’upcycling avec des étudiant·es de la Parsons School of Design à qui nous avons confié nos stocks dormants.
Pourquoi avoir choisi de ne plus cumuler les fonctions de PDG et de directrice créative ?
J’ai été cheffe d’entreprise pendant quatorze ans, je suis fière du travail accompli et des décisions prises. En 2004, lorsque j’ai lancé le site d’e-commerce, personne n’y croyait, cela ne m’a pas empêchée de suivre mon instinct. Mais devoir tout gérer signifie parfois manquer de temps pour faire les choses correctement. Avoir passé les rênes de PDG à mon mari (Pierre-Yves Roussel, ex-PDG de LVMH
En 2009, vous avez lancé la Tory Burch Foundation, dédiée à l’entrepreneuriat au féminin…
Cette fondation faisait partie du business plan. Lorsque j’ai cherché des fonds pour le lancement de ma marque, il n’y avait que des hommes autour de la table et je comprends que j’ai eu de la chance car les femmes rencontrent beaucoup de difficultés lorsqu’elles montent leur société : accès aux fonds, différences de rémunérations, réseau… La Tory Burch Foundation est née en 2009. Aujourd’hui, 90 millions de dollars ont aidé à financer des projets menés par des femmes et via nos partenariats comme celui avec Bank of America, cinq mille six cents entrepreneuses ont bénéficié de 100 millions de dollars de prêts à taux bas. Chaque année, nous en sélectionnons cinquante dans différents domaines – mode, gastronomie, cinéma… Nous les suivons en mentorat pendant une année et nous les aidons à créer des réseaux.
On parle beaucoup de « la Parisienne », son équivalent new-yorkais existe-t-il ?
C’est une ville éclectique, alors les silhouettes diffèrent! Et puis la New-Yorkaise a plein de facettes, sa façon de s’approprier le sportswear, son côté décontracté, son envie de s’habiller pour sortir… Je suis attachée à cette ville car j’y vis et j’y présente mes collections pendant la Fashion Week. Mais je suis aussi inspirée par la France et, avec mon mari français, nous traversons souvent l’Atlantique. Qui sait, peut-être qu’un jour nous défilerons à Paris?