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NOUVELLE GUERRE FROIDE CONTRE L'OTAN ?
Ukraine: Poutine a-t-il vraiment le doigt sur la gâchette?
Le secrétaire d'État Antony Blinken et le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov se sont rencontrés à Genève vendredi 20 janvier, comme prévu, pour discuter de la possibilité d'une sortie pacifique de la crise ukrainienne. Cette rencontre était annoncée comme le point culminant de plusieurs sessions qui se sont tenues au cours de la semaine passée entre hauts diplomates des États-Unis, de Russie, de l'OTAN et de toute l'Europe, y compris l'Ukraine.
Les enjeux étaient d'importance. Les responsables russes avaient prévenu –et les autres craignaient– que si les États-Unis et l'OTAN ne se pliaient pas à toutes les exigences de leur pays (certaines raisonnables, d'autres non), il n'y aurait plus de raison de poursuivre les négociations. En effet, la diplomatie aurait alors atteint une «impasse», ce qui signifie que Vladimir Poutine, le président russe, pourrait prendre des mesures «technico-militaires» pour garder l'Ukraine dans l'orbite de son pays.
Le statu quo mais pas l'impasse
Blinken et Lavrov se sont parlé pendant quatre-vingtdix minutes. Aucun des deux n'a cédé d'un pouce. Pourtant, ils se sont accordés à poursuivre le dialogue. La diplomatie ne s'est pas heurtée à une impasse, finalement. Et, semble-t-il, Poutine n'est pas encore tout à fait prêt à tenter le tout pour le tout et à envahir l'Ukraine.
Combien de temps ce surplace peut-il encore durer? On a beaucoup lu que la Russie avait 100.000 soldats prêts à l'action à sa frontière avec l'Ukraine, mais ce n'est pas exactement ça.
Pour Poutine, rien ne presse. Et pendant ce temps, il peut continuer à faire monter la pression en Ukraine, en organisant des cyberattaques ou en envoyant des mercenaires.
Selon Michael Kofman, directeur des études russes chez CNA, un centre de recherches d'Arlington, en Virginie, cela fait très longtemps que 55.000 d'entre eux sont stationnés à la frontière de façon permanente. Les 45.000 autres, qui auraient été mobilisés depuis diverses régions de la Russie, n'ont pas bougé en réalité. C'est plutôt leur équipement –des chars, des blindés, de l'artillerie, des missiles tactiques– qui ont été envoyés dans des zones proches de l'Ukraine.
Cela n'a rien d'inhabituel. Souvent, dans les préparations au conflit, armes et véhicules sont «pré-positionnés» dans des lieux proches de la zone de front; les soldats ne bougent pas mais ils peuvent être rapidement envoyés sur place pour rejoindre armes et véhicules, qu'ils sont formés à utiliser, au cas où la guerre deviendrait imminente.
Alors combien de temps ces préparatifs peuvent-ils rester en place? Comme aucun soldat supplémentaire susceptible d'être épuisé, de geler sur place, de crever de faim ou de se démoraliser n'a été expédié, ça peut durer longtemps. Pour Poutine, rien ne presse. Et pendant ce temps, il peut continuer à faire monter la pression en Ukraine, en organisant des cyberattaques ou en envoyant des mercenaires dans des zones contrôlées par les rebelles dans les provinces orientales du pays –tout en mettant à l'épreuve l'unité de l'OTAN en menaçant de couper les robinets énergétiques vers l'Allemagne et d'autres pays d'Europe de l'Ouest.
L'OTAN, ce noeud gordien
Le président Biden et d'autres dirigeants occidentaux peuvent eux aussi faire durer un peu le plaisir en fournissant encore plus d'armes antichars et de missiles anti-aériens à l'Ukraine ou en envoyant d'autres soldats dans les pays d'Europe de l'est de l'OTAN, surtout en Pologne et dans les pays baltes, dont les populations se sentent très exposées face à la résurgence de la Russie.
Des propositions d'adhésion à l'OTAN pourraient également être agitées sous le nez de la Suède et de la Finlande, nations occidentales neutres de longue date sur le flanc nord-ouest de la Russie et dont les dirigeants caressent l'idée d'une adhésion en réaction aux récentes initiatives de Poutine. La question est de savoir quelles pressions, d'un camp ou de l'autre, auront le plus rapidement un fort impact politique –à supposer qu'elles aient le moindre effet.
En attendant, de quoi parle-t-on? La Russie a exposé plusieurs exigences concernant ce qu'elle qualifie de «garanties de sécurité», dont la plus pressante semble être que l'Ukraine ne soit jamais autorisée à entrer dans l'OTAN. Les Russes sont nombreux à considérer que l'Ukraine est vitale pour leur pays – historiquement, culturellement, économiquement et en tant qu'État-tampon qui les protège des intrusions occidentales. Poutine est allé jusqu'à dire que l'Ukraine n'était «pas un pays» et qu'elle faisait, avait toujours fait et ferait toujours partie de la Russie.
Si l'Ukraine a progressé dans tous ces domaines, elle est encore loin de remplir les critères exigés par l'OTAN.