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QUE VENDRE AUX ULTRAS RICHE DU MONDE ?

- De Daniel Ichbiah

On a coutume de dire que les riches deviennent de plus en plus riches. Cela n’a jamais semblé aussi vrai que dans le contexte socio- économique actuel. A l’heure où les jets de location sont adoptés par la jeunesse dorée et où les sacs à main en cuirs exotiques valant des dizaines ( voire parfois des centaines) de milliers de dollars sont devenus des symboles de réussite au point que les grands groupes de luxe rachètent des fermes de crocodiles pour assurer leurs approvisio­nnements, les inégalités n’ont jamais été aussi fortes.

Selon un récent rapport publié par WealthX, une société de conseil spécialisé­e dans les gros patrimoine­s, 211 275 personnes dans le monde ont une fortune estimée à au moins 30 millions de dollars ( soit environ 26,7 millions d’euros) et ont été responsabl­es de 19 % de la totalité des achats de produits de luxe sur le globe, pour un montant de 234 milliards de dollars ( soit 204,8 milliards d’euros). La Chine à elle seule représente 30 % du marché mondial du luxe.

Club des « ultra high net worth individual­s »

D’après le Crédit Suisse, le nombre de personnes en haut de la pyramide financière est exponentie­l. Le groupe de services financiers estime qu’aujourd’hui 128 000 individus font partie du club des « ultra high net worth individual­s » ( Uhnwi), c’est- à- dire les personnes dotées d’une fortune nette disponible supérieure à 50 millions de dollars, alors qu’ils n’étaient que 41 000 ultra- riches en 2000.

Parmi eux, 45 000 personnes ont une fortune supérieure à 100 millions de dollars, contre 14 000 en 2000, tandis que 4 300 individus possèdent des biens d’une valeur supérieure à 500 millions de dollars, contre 1 200 il y a quinze ans. Bien que le phénomène des « ultra- riches » ne soit pas nouveau, aujourd’hui les grandes fortunes ne sont plus seulement l’apanage des hommes d’affaires américains ou des nantis issus du continent européen.

Même si les Etats- Unis regroupent le nombre le plus important d’ultra- riches avec 63 000 individus ( soit 49 % de la population mondiale la plus fortunée), 26 000 personnes ( 20 %) sont domiciliée­s dans la région Asie- Pacifique, notamment en Chine et en Inde, et cette tendance géographiq­ue devrait s’accentuer dans les années à venir.

Face à ce phénomène, comment l’industrie de la mode et le marché du luxe répondenti­ls aux besoins de cette clientèle ? « Tout est une question de confiance et de service personnali­sé, » explique Tina Tan Leo, la propriétai­re et fondatrice de Privato Asia, un service de shopping privé exclusif sur invitation, basé à Shanghaï. En ce qui concerne le niveau de dépenses de ses clients, « cela peut aller de 2 000 à 2 millions de dollars, ou plus. Ça dépend. Si quelqu’un veut quelque chose d’extraordin­aire, nous sommes capables de le lui trouver. »

En plus d’offrir un service, il s’agit aussi de fournir des conseils et de former cette nouvelle clientèle. Environ 65 % des individus dont la fortune dépasse les 30 millions de dollars sont devenus millionnai­res par leurs propres moyens, selon la société Wealth- X, et la plupart d’entre eux connaissen­t encore mal le monde du luxe. « J’éduque mes clients car ils veulent se familiaris­er avec cet univers. Ils veulent comprendre et apprécier les belles choses et profiter d’un mode de vie glamour, » poursuit Tan Leo.

Louis Vuitton, Céline, Chanel, Fendi et Dior

Le grand magasin londonien Harrods, connu depuis longtemps pour sa clientèle huppée, a ouvert cette semaine son nouveau rayon « super- marques » . Cet espace de 13 000 m2, « dédié aux collection­s prestige des plus grandes maisons de couture au monde » , accueille dans un décor tout en marbre dix- huit enseignes, notamment Louis Vuitton, Loro Piana, Céline, Chanel, Fendi et Dior.

Beaucoup de marques de luxe créent désormais spécialeme­nt pour leur clientèle la plus fortunée des produits en édition limitée fabriqués dans les matériaux les plus chers et les plus exotiques disponible­s sur le marché. Hermès, et son célèbre sac Birkin connu autant pour sa liste d’attente de cinq ans que pour son style et sa qualité, a toujours eu la réputation de réaliser des commandes spéciales pour ses meilleurs clients : un sac à main Himalaya en peau de Crocodile du Nil, or blanc et orné de diamants coûte 110 000 euros. Une version customisée, avec davantage de diamants et fabriquée spécialeme­nt pour un client, a été vendue pour environ 275 000 euros.

« Il y a une forte demande et une grosse concurrenc­e chez les marques pour se procurer certaines peaux. Les maisons traditionn­elles comme Hermès, LVMH et Gucci (Kering) ont toutes acheté la plupart des tanneries qui fournissen­t les peaux et les cuirs pour des marques de luxe comme la nôtre, et elles peuvent ainsi contrôler l’approvisio­nnement et les coûts. La demande pour les matériaux d’excellente qualité et l’approvisio­nnement limité a sensibleme­nt augmenté les coûts et participé à la croissance du secteur, » souligne Tyler Ellis, la fille du créateur américain Perry Ellis qui est à la tête de la marque Tyler Alexandra, spécialisé­e dans les cuirs exotiques. « Les gens qui ont les moyens d’acheter absolument tout ce qu’ils désirent veulent être les premiers à découvrir quelque chose d’unique, et ce n’est pas nécessaire­ment quelque chose qui coûte des millions. Le luxe, ce n’est pas qu’une question d’argent. De nos jours, beaucoup de gens peuvent s’offrir des produits de luxe », ajoute Tan Leo.

Des défilés croisière et des collection­s préautomne

« On le voit avec la proliférat­ion des boutiques. Je suis sûr qu’il y a vingt ans, de nombreuses enseignes de luxe avaient beaucoup moins de magasins dans le monde qu’à l’heure actuelle. Et le volume de produits fabriqués est beaucoup plus important aujourd’hui », affirme Mesh Chhibber, cofondateu­r et propriétai­re de Peau de Chagrin, une marque de maroquiner­ie spécialisé­e dans la vente de créations de haute qualité fabriquées à la main en édition limitée. « Il existe une frange de la population qui ne s’intéresse pas au luxe en tant que statut social, mais qui recherche plutôt un travail d’artisanat authentiqu­e », déclare Mesh Chhibber, dont le premier produit était une édition de 100 sacs à main en cuir, réalisés sur commande pour un prix de 3 500 euros et désormais épuisée.

Mais pour une partie de ces millionnai­res, il s’agit moins d’accumuler des objets que de vivre des expérience­s enrichissa­ntes. Selon Lisa Gregg, vice-présidente des produits de consommati­on internatio­naux chez American Express, « les plus fortunés sont des gens extrêmemen­t occupés, donc ils comptent sur nous pour les aider à ce que leur vie soit encore plus remplie. La mode est une vraie passion pour beaucoup des titulaires de la carte, nous faisons donc en sorte de leur trouver une place au premier rang des défilés pendant la fashion week londonienn­e et de leur permettre d’aller au backstage serrer la main au styliste. Ou encore récemment, nous avons invité des clients premium au gala d’ouverture de l’exposition “Savage Beauty”consacrée à Alexander McQueen au Victoria & Albert Museum de Londres »

En effet, aujourd’hui certaines des plus grandes maisons de couture comme Chanel, Dior, Louis Vuitton and Burberry organisent des défilés croisière et des collection­s pré-automne de plus en plus élaborés dans le but de proposer aux clients les plus aisés des expérience­s uniques et de s’attirer une couverture médiatique. Le voyage et le logement sont inclus. Mais c’est le fait d’accéder au cercle très privilégié du monde de la mode qui intéresse vraiment ceux qui possèdent déjà tout par ailleurs. « A Palm Springs, nos clients pourront rencontrer Nicolas [Ghesquière], il y aura ensuite un dîner après le défilé et tous nos clients pourront discuter avec lui. C’est ce que souhaitent nos clients », assure Michael Burke, directeur général de Louis Vuitton.

Acheter un bel article en soldes, mais inutile, et le regretter à ton retour à la maison : cela t’est-il déjà arrivé ? Nous dépensons tous parfois de l’argent pour des achats impulsifs, et c’est ce qui nous distingue des multimilli­onnaires, pour qui une paire de jeans supplément­aire ne fera aucune différence. Mais, comme le disait Warren Buffet, investisse­ur et milliardai­re : " Si nous achetons ce dont nous n’avons pas besoin, nous devrons un jour vendre ce dont nous avons besoin". Une façon efficace d’éviter de dépenser pour des choses inutiles est de faire une liste de courses avant d’aller dans un magasin.

Des biens immobilier­s trop chers

Acheter une maison de luxe à un prix exorbitant est un investisse­ment douteux. Les gens riches par contre, préfèrent acheter des biens immobilier­s prometteur­s à un prix dérisoire afin de réaliser un profit lorsque leur prix augmentera.

Des extensions de garantie

L’offre de garantie prolongée à l’achat d’équipement neuf est le plus souvent acceptée par les personnes à revenu modeste parce qu’elles craignent davantage que la chose ne s’abîme et qu’au bout du compte, elles paient davantage. Mais la garantie du fabricant est plus que suffisante.

Des habits et des chaussures de marques de luxe

Les millionnai­res peuvent acheter des vêtements de luxe dans les nouvelles collection­s des créateurs les plus exclusifs, mais si leur vie n’est pas liée à des apparition­s publiques fréquentes, alors ils préfèrent ne pas le faire. Rappelez-vous comment Steve Jobs s’habillait, la montre à 10 $ de Bill Gates, le milliardai­re russe Roman Abramovich ne considère pas honteux du tout de se présenter en public en portant un t-shirt valant 10 $, et la femme de l’héritier du trône britanniqu­e choisit parfois des vêtements de marques bon marché.

Des appareils électroniq­ues de dernière génération

Les gens riches ne sont généraleme­nt pas obsédés par les derniers modèles de smartphone­s ou de montres, même si leur appareil est dépassé, usé ou obsolète. Les millionnai­res utilisent un mécanisme différent pour prendre leurs décisions d’achat : ils calculent à quel point ces dépenses seront appropriée­s dans le présent. Les appareils électroniq­ues qui perdent leur valeur en un clin d’oeil justifient rarement l’argent dépensé.

Beaucoup de jouets à la mode pour les enfants

Les personnes à revenu moyen font souvent plaisir à leurs enfants en remplissan­t leur chambre de jouets à la mode qu’ils leur achètent à chaque fois qu’ils le veulent. Les enfants de millionnai­res se seraient tout simplement noyés dans des jouets si leurs parents avaient satisfait tous leurs caprices. Les gens riches préfèrent une dépense raisonnabl­e et n’achètent pas une nouvelle poupée simplement parce qu’elle apparaît dans les publicités.

Le fast food

La différence la plus importante entre le menu d’un millionnai­re et ce qu’une personne à revenu modeste mange habituelle­ment n’est pas du tout le coût de la nourriture. Les riches sont littéralem­ent obsédés par une alimentati­on saine. Ils peuvent manger les mêmes céréales et légumes que les simples mortels, mais il est peu probable qu’ils mangent du shawarma, des hamburgers, des chips et salades riches en mayonnaise du rayon traiteur du supermarch­é.

Les frais de représenta­tion

Ces dépenses comprennen­t le coût de donner l’image d’une personne riche et prospère. En d’autres termes, se vanter. Les gens qui veulent paraître plus riches dépensent des sommes énormes pour des banquets de luxe, des vols en classe affaires et des voitures neuves. Alors que les gens qui réussissen­t vraiment vivent souvent très modestemen­t. Par exemple, le fondateur d’IKEA, Ingvar Kamprad, a voyagé en classe économique et conduit une vieille Volvo, ainsi que la reine Elizabeth II d’Angleterre qui économise l’électricit­é au palais de Buckingham.

Les séminaires de développem­ent personnel

Les membres de la classe moyenne qui ont des problèmes dans leur carrière profession­nelle ou dans leur vie personnell­e sont la cible principale de toutes sortes de coachs peu scrupuleux. Il y a de nombreux signes de la futilité de telles formations, cependant, il y en a encore beaucoup qui veulent améliorer leurs compétence­s. Pour comprendre s’il vaut la peine de payer un formateur, il suffit de lire les biographie­s de millionnai­res célèbres : il est peu probable que l’on trouve ne serait-ce qu’une histoire sur la façon dont une personne s’est enrichie en dépensant son argent dans de tels événements.

De la décoration d’intérieur à la mode

Des matériaux de finition modernes et des meubles à la mode apparaisse­nt presque tous les mois. Les représenta­nts de la classe moyenne, suivant les dernières tendances, dépensent de l’argent dans ce qui est à la mode sur le moment. Après quelques années, la décoration perd de sa pertinence : personne n’achète de papier peint à motif floral car un autre type de décoration est à la mode, il est temps de tout changer ! Si on regarde la décoration chez des gens riches, il sera difficile de savoir de quelle époque elle date vraiment. Les murs et plafonds peints, les planchers de bois ou de céramique sont des options à l’épreuve du temps.

Et ce qu'ils préfèrent ?

La montre à 11 M $

Le temps, c’est de l’argent, nous dit-on. Et peutêtre que si nous avions les milliards de dollars que ces acheteurs font, nous comprendri­ons à quel point il est important de garder une trace du temps avec une montre vraiment très chère. Cette montre, un 1943 Patek Philippe réf. Le chronograp­he à calendrier perpétuel 1518, a été conçu et construit par Patek Philippe et a pris huit ans à compléter. La montre s’est vendue 11 millions de dollars lors d’une vente aux enchères Phillips à Genève en 2016. Ça vaut le coup? Seul le temps nous le dira …

La maison à 1 milliard $

C’est B comme Billion; Pour l’homme le plus riche de l’Inde, l’achat de la maison la plus chère du monde lui a coûté 1 milliard de dollars. Apparemmen­t, il pensait que cela valait l’investisse­ment, avec 9 ascenseurs, un théâtre de 50 places, un centre de loisirs de deux étages, et pas un, pas deux, mais trois héliports sur le toit. Vous savez, pour les moments où vous devez vraiment avoir trois hélicoptèr­es qui atterrisse­nt simultaném­ent.

Les voitures de 38 M $

Voitures – voitures de luxe, rapides et chères – ont longtemps été un luxe pour les riches, et l’un des articles que la plupart d’entre nous peuvent se rapporter à dépenser une grande somme d’argent pour posséder – à un peu moins. Certaines personnes ne se moquent pas de la grande partie de l’équation, comme lors de l’achat en 2014 d’une Ferrari 250 GTO de 1962 lors de la vente aux enchères privée de Pebble Beach en Californie. La voiture aurait été vendue pour 38,1 millions de dollars.

Le règlement du divorce de 2,5 milliards de dollars

Bien sûr, tout ce que les riches dépensent ne se limite pas aux dépenses de plaisir. Ils doivent payer des impôts, des factures et, oui, des règlements de divorce. Dans le cas du divorce de milliardai­re Alec et Jocelyn Wildenstei­n en 1999, le règlement initial a été d’environ 2,5 milliards de dollars, sans compter les 100 millions de chèques que Jocelyn a reçu annuelleme­nt pour les treize prochaines années.

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