Vecteur de liberté
D'EXPRESSION ET VALEUR AJOUTÉE AU MODERNISME ?
Jupes ou robes, ils ont franchi le pas
Mark Bryan, influenceur mode de 61 ans aux 413.000 followers sur Instagram, ose poser devant les photographes en portant des jupes. Il déclare que ce vêtement lui «offre plus que le traditionnel pantalon d'homme». Mark Bryan dit recevoir très peu de commentaires négatifs («environ 5%») sur sa tenue vestimentaire lorsqu'il est en déplacement. La majorité des gens réagit positivement. «Quelques femmes m'abordent et me disent que j'ai l'air bien, raconte-t-il. Elles me demandent généralement où je trouve mes chaussures. Si un homme m'aborde, il demandera quelque chose comme: “Comment pouvez-vous marcher avec des talons?”» Les hommes porterontils un jour la jupe comme ils portent aujourd'hui un jean? «Pour devenir vraiment grand public, les jupes pour hommes devraient combiner la jupe crayon avec un pantalon de travail à poches multiples», estime le professeur Andrew Groves, directeur des archives de vêtements masculins de l'université de Westminster. De son côté, Ludivic de Saint Sernin affirme qu'il faudra probablement un peu de temps avant que ce ne soit plus une surprise de voir un homme en jupe dans la rue.
Ces clichés qui empêchent les hommes de porter des bermudas en été
Le port du bermuda sur le lieu de travail, une affaire sérieuse. L’été dernier, les chauffeurs de bus nantais avaient fait le buzz en venant travailler en jupe (empruntée à leurs collègues femmes) pour protester contre l’interdiction qui leur était faite de porter le bermuda au volant. Ils avaient eu gain de cause. Mais en 2001, la fameuse «affaire du bermuda» avait mal tourné pour Cédric Monribot.
Pour éviter le coup de chaud en pleine canicule, cet agent technique à la Sagem de Saint-Étienne-duRouvray (Seine-Maritime) est venu travailler à l’usine du groupe électronique en bermuda beige (simple, basique). Sommé à plusieurs reprises d’enfiler un pantalon, il refuse. Et finit par recevoir sa lettre de licenciement. Motif? Non-respect du code vestimentaire de l’entreprise.
Débouté par les prud’hommes, le «bermudiste» forcené se pourvoira en cassation, mais sera débouté deux ans plus tard, la cour estimant que «la liberté de se vêtir à sa guise au temps et au lieu du travail n'entre pas dans la catégorie des libertés fondamentales» . Avait-il de jolies jambes? L’histoire ne le dit pas.
Mathieu, 26 ans, travaille dans le luxe. Ces derniers jours, il a pensé fort au bermuda. Pourtant, il ne peut en porter au bureau: «Si je travaillais dans une start-up par exemple, je pourrais me le permettre, mais là, ça ne colle pas avec le contexte professionnel, ça ne fait pas sérieux! Est-ce que je confierais mon argent à mon banquier s’il me recevait en bermuda? Je trouve aussi qu’il y a une inégalité hommes-femmes assez inédite. Quand il fait hyper chaud, les femmes peuvent porter des jupes légères ou des débardeurs, alors que nous les mecs on transpire en pantalon de costume et chemise à manches longues». Benoît, 44 ans, travaille dans le tertiaire. Lui aussi est interdit de bermuda: «Le vrai problème à mon sens est que pour l’employeur, le bermuda signifie relâchement vestimentaire. Et qui dit relâchement vestimentaire dit relâchement de la productivité. Bref, t’es pas au boulot pour faire touriste!».
Cinquante nuances de bermuda
Trop casual, trop informe, trop beauf: le bermuda est un mal-aimé du vestiaire masculin. Et pourtant, chaque été, il refait son apparition sur les trottoirs des mégapoles, et ce même à plus 300 kilomètres de toute plage. «Inventé» au début du XIXe siècle par les militaires de Sa Majesté stationnés dans l’archipel caribéen des Bermudes, ce vêtement est à l’origine un uniforme raccourci au-dessus du genou. À l’époque, les militaires de la Royal Navy le portaient avec des chaussettes montantes, une cravate et un blazer, pour conserver le caractère formel.
D’abord cantonné aux militaires sous les tropiques, le port du bermuda contamine bientôt le reste de la société avec l’essor du sportswear dans la deuxième moitié du XXe siècle. Il quitte alors gymnases et plages pour envahir les villes. Multi-poches, à palmiers, kaki, bleu Oxford… Tous les bermudas ne se valent pas sur l’échelle de la fashion. D’ailleurs, quelle est la différence entre un bermuda et un short? Quelques centimètres de tissu: au-dessus ou en-dessous du genou c’est un bermuda, à mi-cuisse c’est un short. Nombre de créateurs se sont depuis longtemps emparé du problématique vêtement, tentant des propositions mode plus ou moins convaincantes.
Le styliste new-yorkais Thom Browne, qui s’est fait une spécialité du bermuda, imagine carrément un total look veste de costume + bermuda. Difficile à porter à la réu benchmark du lundi.