Poils et guiboles molles
LES BERMUDAS = ANTI SEX- APEAL POUR LES MECS ?
Jacquemus, jeune créateur français, a présenté fin juin dans les calanques marseillaises son premier défilé homme. Sorte d’ode à l’homme du Sud, sa collection baptisée «Gadjo» (en référence à la culture gitane) plaçait le curseur à mi-chemin entre «caillera cagole» et «beauf solaire». Et forcément, on y retrouvait des bermudas.
Et même des pantacourts, le symbole ultime du mauvais goût estival, du non-style et de la «décathlonisation du monde» (en référence à l’enseigne de matériel sportif numéro un en France). Évidemment, les hipsters et autres influenceurs à barbe de trois jours ont depuis longtemps conquis le terrain miné du bermuda. Ces «bermudistas» le portent avec une chemise classique aux manches savamment retroussées et des mocas.
Tabou du poil masculin
Vincent Grégoire, qui capte l’air du temps au bureau de tendances NellyRodi, est formel: «Pour porter un bermuda, il faut avoir de belles jambes, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Et si on a des cannes de serin, ça fait pensionnat ou scout». Il est vrai que pendant longtemps, le bermuda était un vêtement destiné aux enfants (les fameuses «culottes courtes» des gastronomes de la pub Kiri).
Au XIXe siècle et jusqu’au milieu du XXe, nos chers bambins le portaient avec des chaussettes hautes, parfois même en hiver (ça faisait des économies de pantalon à repriser au genou). «Plus sérieusement, je pense que le vrai problème au port généralisé du bermuda, c’est que pour beaucoup d’hommes cela ne fait pas viril, déclare Vincent Grégoire. Il y a encore un tabou au dévoilement de la jambe masculine. Le souci c’est le poil! Pour beaucoup d’hétéros, ça fait sale, ou pire, singe. Certains se rasent, comme pour discipliner leur animalité. Et puis montrer ses jambes, ça fait tout de suite gay. Encore plus si le bermuda est un peu moulant.
Quoiqu’on en dise, on est encore dans des postures archaïques de dominant/dominé et l’homme a du mal à se dévoiler, voire à s’offrir dans un rapport de séduction.» Seuls quelques sportifs méga burnés, tel le joueur de basket NBA Russell Westbrook, s’autorisent le port du bermuda fashion sans que l’on remette en cause leur hétérosexualité.
Car oui, la jambe de l’homme est érotique, et il n’y a aucun mal à ça. Il y a quelques mois, Call Me By Your Name de Luca Guadagnino faisait fureur. Véritable festival de bermudas et de shorts eighties, le film est aussi une déclaration d’amour aux jambes d'Armie Hammer, le doctorant statuesque qui séduit le jeune Thimotée Chalamet. On ne s’en est toujours pas remis.
Alors messieurs, qu’elles soient fines ou musclées, poilues ou glabres, sentez-vous libres, montreznous vos guiboles!