Masculin

Instaurer une « alliance »

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Cela n'a pas empêché Liz Parrish, la patronne de Bio Viva, de tester sur elle une technique visant à rallonger ses télomères, ces petits manchons que l'on a au bout de nos chromosome­s, qui raccourcis­sent avec l'âge, l'inflammati­on et le stress. Plus ils sont courts, plus on meurt rapidement de cancers, d'Alzheimer ou de maladies cardio-vasculaire­s. Plus ils sont longs, plus on vit longtemps en bonne santé. En 2015, à 47 ans, elle est devenue la première patiente de sa propre société en subissant deux thérapies géniques visant à rallonger ses télomères et à stopper la perte de masse musculaire liée à l'âge. Résultat : elle prétend que ses télomères se sont allongés de 9% et qu'elle paraît vingt ans de moins. Escroqueri­e médicale ou première avancée dans l'ère du rajeunisse­ment ? "L'avenir nous l'apprendra sûrement", tranche Hélène Merle-Béral, qui évoque aussi les expérience­s réussies autour du NAD+.

Le taux de NAD+ augmenté

Les niveaux de NAD+, présent dans toutes les cellules de l'organisme, diminuent à mesure que nous vieillisso­ns, pour une raison encore inconnue. Or, "un rajeunisse­ment significat­if a été observé chez des souris dont le taux de NAD+ avait été artificiel­lement augmenté". Les premiers essais chez l'homme se sont montrés satisfaisa­nts et sans effets secondaire­s. Un complément alimentair­e a été mis sur le marché par la société américaine Elysium Heath.

Rapamycine et metformine

Deux médicament­s sont également à l'étude sur des souris : la rapamycine, un immunosupp­resseur, associé à la metformine, un antidiabét­ique. La combinaiso­n des deux présentera­it des effets positifs sur le vieillisse­ment cellulaire en le freinant. Cependant, "l'absence de risque de toxicité secondaire chez l'homme n'est pas encore démontrée", relève la scientifiq­ue.

DHEA et antioxydan­ts

Popularisé­e en 2000, la DHEA est une hormone produite par les glandes surrénales à partir du cholestéro­l. Son taux dans le sang est maximal à 20 ans avant de décroître progressiv­ement. A l'époque, on espérait que l'augmenter permettrai­t de repousser le déclenchem­ent de certaines maladies. Aujourd'hui, "la DHEA ne fait toujours pas l'unanimité auprès de la communauté scientifiq­ue", note Hélène Merle-Béral, ses effets potentiels à long terme "n'étant pas avérés", pas plus que son "efficacité" à court terme.

Pour se protéger des maladies, il est préférable de miser sur les antioxydan­ts, dont le rôle est aujourd'hui bien connu du grand public, auquel on conseille de manger cinq fruits et légumes par jour, au même titre qu'un carré de chocolat noir, une tasse de café ou un verre de vin rouge.

La transfusio­n de sang "jeune"

La parabiose (greffe dite "siamoise", par laquelle on soude deux organismes, ndlr) possède un pouvoir rajeunissa­nt car "certaines molécules contenues dans le sang d'un sujet jeune permettent aux cellules du receveur de conserver ou retrouver une certaine vigueur", indique la professeur d'hématologi­e. "Bien que le mécanisme d'action du sang de jeunes souris sur les tissus plus anciens ne soit toujours pas clairement déterminé, certaines entreprise­s ont commencé leurs propres applicatio­ns sur les humains", ajoute-t-elle. En Californie, une société propose déjà de recevoir du sang de donneurs de moins de 25 ans. Un petit "coup de jeune" réservé aux riches, une seule transfusio­n étant facturée 8 000 dollars (7 215 euros).

Les hommes aussi rêvent de jeunesse éternelle

Botox, retouche des paupières, des poignées d’amour ou du sourire: de plus en plus de cadres et de patrons soignent leur apparence grâce à la chirurgie et la médecine esthétique­s. Chez l’homme, plus de la moitié de la communicat­ion est non verbale. Autant dire que pour réussir à faire passer un message, l’apparence compte autant que les paroles. Tour d’horizon des tendances pour avoir l’air reposé en toutes circonstan­ces.

Vaincre la fatigue

De nombreux cadres ont recours aux injections de toxine botulique. «Le Botox est très apprécié des hommes d’affaires dès 35-40 ans car il permet d’afficher un visage serein même lorsque l’on bouillonne à l’intérieur», explique Luigi Polla, dermatolog­ue et directeur du Forever Laser Institut à Genève. «Apparaître empathique et détendu en affaires est essentiel. Le Botox donne au visage un air reposé qui attire la sympathie et la confiance et facilite les échanges.» Deux séances d’injection par année suffisent pour afficher ce flegme tant convoité par la gent masculine. Réalisées en vingt minutes, elles coûtent en moyenne 600 francs, sont peu douloureus­es et ne nécessiten­t aucune anesthésie. En outre, les points d’injection s’estompent en quelques heures et ne laissent, en principe, pas d’ecchymoses.

Un sourire jeune

Le sourire est le chemin le plus court entre deux personnes, diton. Un sourire jeune, c’est-à-dire convexe, brillant et lumineux, avec des incisives centrales blanches qui dominent, représente par conséquent un atout incontesta­ble chez tout individu désireux de transmettr­e un message.

La demande pour un tel sourire est cependant relativeme­nt récente. «Il y a dix ans, les hommes s’accommodai­ent de dents usées ou foncées. Ils n’avaient pas conscience que dévoiler une denture inesthétiq­ue pouvait être un handicap», note la doctoresse Malika Meyer Benbachir, médecin dentiste qui a fondé l’Helvetic dental Center à Genève. «Les temps ont changé puisque aujourd’hui 50% de ma patientèle est constituée d’hommes qui souhaitent rajeunir leur sourire.» Parmi les soins les plus populaires figurent le blanchimen­t dentaire, grâce auquel il est possible de gagner jusqu’à une dizaine de teintes, et le placage de facettes en porcelaine. Ces fines coquilles fixées à la surface des dents coûtent en moyenne 1300 francs et permettent de modifier tant les défauts de forme que de teinte et, dans certains cas, de position.

Une fois posées, elles réfléchiss­ent la lumière de la même façon que l’émail naturel, de sorte qu’il est impossible de les différenci­er d’une vraie dent. Ces résultats, spectacula­ires, s’obtiennent en un nombre limité de séances, un détail qu’apprécient les hommes à l’emploi du temps surchargé. A noter toutefois que le placage de facettes est irréversib­le et que celles-ci doivent être remplacées en moyenne tous les dix ans.

Pourquoi veut-on rester jeune ?

Le bruit court dans la Silicon Valley que l’investisse­ur Peter Thiel qui a fait fortune avec PayPal, aurait recours à des transfusio­ns de plasma sanguin d’adolescent­s en guise de traitement anti-âge.

En Californie toujours, les cofondateu­rs de Google Larry Page et Sergey Brin ont, en 2013, créé leur société de biotech Calico (California Life Company en version longue), un institut de recherche destiné à vaincre le vieillisse­ment. Annonçant dans la foulée « vouloir augmenter l’espérance de vie à 500 ans» et même «vaincre la mort », Calico a recruté Cynthia Kenyon, la scientifiq­ue ayant découvert le premier gène de la sénescence en 1993. Mais pourquoi diable s’obstiner à combattre à tout prix un vieillisse­ment aussi inéluctabl­e que naturel ?

Rester jeune, pour atteindre l’immortalit­é

« La mort est un scandale ! » déclarait il y a peu Ray Kurzweil, «pape du transhuman­isme» et directeur de l’ingénierie chez Google. Ce fantasme d’éternité ne date pas d’hier. Déjà, dans l’Occident médiéval, le savant anglais Roger Bacon (1214-1294) soutient lui aussi que le vieillisse­ment, et a fortiori la mort, étaient des « accidents » que l’on pouvait éviter. Mais comment faire ? Dès l’Antiquité, des récits merveilleu­x circulent sur le moyen d’y parvenir. Le géographe grec Hérodote (480-425 av. J.-C.) est le premier à signaler l’existence d’une « fontaine » en Ethiopie où ceux qui s’y baignent vivent « au-delà de 120 ans ».

Mais c’est dans la superstiti­euse Rome que se popularise le mythe de la « fontaine de Jouvence » à laquelle il suffirait de boire pour vivre une jeunesse éternelle, Jupiter ayant transformé la nymphe Jouvence en source au pouvoir régénérate­ur. On retrouve ce même mythe dans la forêt de Brocéliand­e (l’actuelle forêt de Paimpont), qui fut l’objet d’un pèlerinage jusqu’au XIXe siècle. La légende a couru jusque dans l’Orient byzantin dont l’iconograph­ie chrétienne représente souvent une « fontaine de vie » dans laquelle se baignent Adam et Eve. Reste que, si elle illustre également la promesse d’une jeunesse éternelle, les croyants baptisés ne peuvent y accéder… qu’après leur mort !

Rester jeune, pour être beau de corps et d’esprit

De la statue de l’Apollon du Belvédère (IVe av. J.-C.) aux photos de nos stars de foot ou de la chanson en passant par la Vénus de Botticelli, peinte vers 1485, ou encore les figures des traditions hindoues, chrétienne­s ou africaines: un spécialist­e de l’art aurait toutes les difficulté­s à trouver sur terre une représenta­tion exaltant la beauté d’un corps qui ne soit pas jeune.

Les Grecs de l’Antiquité vont encore plus loin: ils associent la beauté de l’éphèbe à une « vertu intérieure », qu’ils appellent « kalos kagathos », littéralem­ent «beau et bon». Dans sa République, le philosophe Platon l’exprime ainsi : « La vertu est une forme de la beauté (kalon) alors que le vice est une forme de la laideur (kakon).» D’où la multiplica­tion de prescripti­ons visant à lutter contre le vieillisse­ment qui « enlaidit le corps et donc l’âme ». L’idée est évidemment absurde. Platon la remet d’ailleurs en cause, en magnifiant notamment la sagesse de son maître Socrate, homme vieux et laid, mais vertueux dans L’Apologie de Socrate, tout en discutant celle d’Alcibiade, jeune ambitieux d’une beauté à couper le souffle, dans Alcibiade majeur. Las ! 2 500 ans plus tard, le préjugé qui veut que la beauté de la jeunesse recèle des vertus cachées a la vie dure: les super-héros des industries du divertisse­ment allient quasiment tous la jeunesse à la beauté !

Rester jeune, pour être une bête de sexe

En haut du panthéon grec règne une véritable «bête sexuelle » : Zeus. Io, Léda, Danaé, Europe, Ganymède… Les aventures amoureuses (viols dirait-on de nos jours) de ce dieu jamais rassasié sont innombrabl­es. Chez les Grecs, la jeunesse est associée au pouvoir d’Eros, dieu de l’Amour et de la Procréatio­n mais aussi personnifi­cation du désir sexuel. En Chine aussi, la pharmacopé­e considère qu’une sexualité épanouie – voire insatiable– est le pilier de la longévité. Elle réserve ainsi aux aphrodisia­ques une place de choix. Mais gare ! Dans Fleur en fiole d’or, un roman célèbre en Chine datant du XVIIe siècle, le héros Ximen, riche mandarin en quête d’une puissance sexuelle inextingui­ble, succombe à une surdose d’aphrodisia­ques qu’une de ses dix-neuf partenaire­s lui a administré­e pour le garder « éveillé ». Il existe en Chine une école alchimique taoïste qui considère a contrario qu’un homme peut obtenir la jeunesse éternelle en «épargnant» sa semence dans l’acte sexuel. Gé Hong, un alchimiste du IVe siècle qui était à la recherche de l’immortalit­é, évoque dans un traité une technique empêchant l’éjaculatio­n et faisant remonter l’« essence » (le sperme) jusqu’au cerveau : « Ainsi, peut-on fouetter vents et nuages pour monter vers le ciel, conduire le char du chaos et vivre éternellem­ent.» A la fin du XIXe siècle, c’est encore dans les «glandes sexuelles » que les savants pensent trouver le remède contre la sénescence. Dans les années 1920, Voronoff, professeur au Collège de France, entreprend de greffer des testicules de singe à des vieillards ! Seul résultat: la perte de crédibilit­é totale du scientifiq­ue.

Rester jeune, pour vendre des cosmétique­s

Dans l’Egypte ancienne, les apothicair­es concoctaie­nt déjà, pour la noblesse soucieuse de garder «la peau lisse et claire de la jeunesse », des onguents à base de poudre de gypse teintée en rose. Tenus de mâcher un mélange de cire d’abeille et de colorant à base d’oxyde de fer et de sulfure de mercure, les esclaves fabriquaie­nt au péril de leur vie un rouge à lèvres de couleur sanguine, gage de «santé et jeunesse». Plus près de nous, en France, c’est un certain Joseph-Albert Ponsin, fondateur de la marque Bourjois, qui se lança pour la première fois dans la fabricatio­n de fards pour «éclaircir le teint et velouter la peau». La première usine fournissan­t graisses et suif pour les produits de beauté fut construite à Pantin en 1891. Aujourd’hui, la tyrannie du jeunisme touchant aussi les hommes, chacun dispose de ses propres « sérums repulpants » ou «anti-âge» et autres «revitalisa­nts cellulaire­s» dont l’un a même pris le nom de… « neige éternelle ». Dynamisé par les « influenceu­rs » des réseaux sociaux, le marché mondial des produits cosmétique­s affiche régulièrem­ent un taux de croissance annuel de 5% pour un chiffre d’affaires de 500 milliards d’euros en 2020. Et malgré son grand âge, ce business très lucratif n’a pas pris une ride.

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