De la big arnaque ?
C'EST CE QUE BEAUCOUP PENSENT !
Comprendre l'affaire Madoff
Comment Bernard Madoff a-t-il escroqué les plus grandes institutions financières ? Décryptage du scandale qui frappe la planète finance.
Qui est Bernard Madoff ?
Le courtier au coeur du scandale était une légende de Wall Street, ainsi qu'une incarnation du rêve américain. Ce maître nageur à Long Island a créé son fonds d'investissement à l'âge de 22 ans, avec 5 000 dollars. Réputé intuitif, ultra-rapide mais aussi très "éthique", il avait fini par s'imposer dans la communauté financière. Au point de devenir président du Nasdaq, la prestigieuse Bourse des valeurs technologiques, de 1990 à 1991. Mondain, jovial, il parvenait à capter la confiance de ses futurs clients. Figure de la communauté juive newyorkaise, le "génial" financier était très présent dans les activités caritatives et culturelles.
Comment a-t-il escroqué ses clients ?
M. Madoff recevait par le biais de son fonds (Bernard Madoff Investment Securities) des capitaux à gérer, qu'il investissait dans des hedge funds (fonds d'investissement à risque), dont la performance était réputée supérieure à la moyenne. Lorsque la performance n'était pas au rendez-vous, au lieu de diminuer le rendement distribué aux investisseurs, il prenait tout simplement l'argent des nouveaux investisseurs et l'utilisait pour payer les anciens. De ce fait, il donnait l'impression d'une performance exceptionnelle, sur la base de laquelle il attirait de plus en plus d'investisseurs, mais année après année, il dilapidait le capital que ceux-ci lui avaient confié.
Quand la crise boursière éclate, nombre d'investisseurs veulent récupérer leur mise. Trop en même temps. M. Madoff ne peut pas rendre l'argent. Il fait part de la situation à son fils, qui prévient les autorités. Le 11 décembre, Bernard Madoff est arrêté par le FBI.
Qui s'est laissé prendre ?
De riches particuliers, de grandes institutions financières (américaines, japonaises, suisses, espagnoles, françaises, britanniques...), des fondations comme celle du Prix Nobel Elie Wiesel ou du cinéaste Steven Spielberg figurent parmi les perdants. Certains de ces investisseurs ont directement confié leurs fonds à la société de M. Madoff. D'autres ont confié des sommes d'argent à des fonds d'investissement qui les ont placés chez M. Madoff.
La banque espagnole Santander est la plus exposée à la fraude : elle risque de perdre 2,33 milliards d'euros. Côté français, Natixis évalue à 450 millions ses pertes potentielles, BNP Paribas à 350 millions, AXA à 100 millions, Dexia à 85 millions. Le Crédit agricole, Groupama et la Société générale enregistrent un préjudice de 10 millions d'euros.
En France toujours, l'Autorité des marchés financiers estime que les pertes des petits épargnants pourraient atteindre 40 millions d'euros. Selon le secrétaire général du régulateur boursier, Gérard Rameix, "une centaine de fonds français ont effectivement acheté des fonds Madoff". Mais aucun d'entre eux "n'a été distribué massivement dans le grand public en France", assure-t-il.
Comment Bernard Madoff a-t-il échappé aux contrôles ?
La Securities & Exchange Commission (SEC, gendarme de la Bourse) est pointée du doigt pour ses graves défaillances. En huit ans, trois enquêtes ont été diligentées par le régulateur américain des marchés contre Bernard Madoff Investment Securities, sans que rien ne ressorte. En toute illégalité, la société n'était plus enregistrée auprès de la SEC depuis 2006, et son commissaire aux comptes était un minuscule cabinet de l'Etat de New York. Autant de signes qui auraient dû mettre la puce à l'oreille, en plus des rendements exceptionnels et étrangement constants réalisés par le fonds d'investissement. Barack Obama, qui estime que les régulateurs "se sont endormis au volant", a d'ores et déjà annoncé le remplacement du président de la SEC.
Où sont passés les 50 milliards de dollars ?
Quand Bernard Madoff a été démasqué, il a affirmé aux enquêteurs que son fonds a perdu 50 milliards de dollars (36,6 milliards d'euros).