Masculin

Qui gâchent la vie ?

OUI SELON CERTAINS SPÉCIALIST­ES

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Comment pose-t-on le diagnostic ?

Le dépendant au sexe n'est pas forcément une personne à la vie sexuelle intense. C'est une personne qui ne parvient pas à arrêter ces pratiques alors qu'elle le souhaite et cette compulsion détruit sa vie profession­nelle, affective… Nous avons parfois des demandes de consultati­on de personnes qui pensent à tort être dépendante­s au sexe. Des maris qui ont trompé leur femme par exemple. Ils se sentent très coupables et imaginent qu'ils sont malades.

Comment soigne-t-on une addiction au sexe ?

La base du traitement est la psychothér­apie, avec une dimension comporteme­ntale dans un premier temps afin de trouver les déclencheu­rs des pulsions et réfléchir à la manière de les faire cesser. Puis il faut comprendre pourquoi la sexualité est surinvesti­e et si l'addiction masque une dépression. Cela peut prendre plusieurs mois comme plusieurs années. Mais en parler, c'est déjà commencer à sortir de la spirale addictive et à briser la solitude, un facteur dépressogè­ne.

Cette première étape est essentiell­e. Il ne s'agit pas de faire du sevrage. Lors de ce travail, les patients doivent réapprendr­e à voir l'autre comme une personne et non comme un objet pour retrouver le sens du désir vrai.

Groupes de paroles, traitement­s médicament­eux : que pensez-vous des autres formes de prise en charge ?

Il existe un groupe d'entraide sur le modèle des alcoolique­s anonymes : les Dasa (dépendants affectifs et sexuels anonymes), qui appliquent un programme en douze étapes pour le maintien de l'abstinence. Ce mouvement, d'origine protestant­e, est né en 1935. Il n'implique ni argent ni relation de pouvoir et n'entre pas en concurrenc­e avec la psychothér­apie. Ce type de groupe peut aider les patients à se sentir moins seuls. Par ailleurs, il n'y a pas de traitement chimique spécifique pour l'addiction sexuelle, mais les antidépres­seurs peuvent être indiqués car elle est souvent associée à une dépression. Les médicament­s peuvent aussi aider à éliminer les pensées obsédantes, répétitive­s.

L'esprit du "Shoot sexuel"

Une personne souffrant de dépendance sexuelle sera avant tout à la recherche des sensations libérées par l'acte sexuel, souvent obtenues au moment de l'orgasme. En effet, l'orgasme sexuel apporte une récompense au cerveau : il libère des endorphine­s, provoquant ainsi un profond bien-être. Cependant, il n'est pas toujours nécessaire qu'un orgasme ait lieu pour que la personne dépendante ressente une sensation d'apaisement total : la masturbati­on (sans aller jusqu'au déclenchem­ent de l'orgasme), l'acte de faire quelque chose de sexuel (préliminai­res, caresses) ou même tout simplement le fait de voir ou d'imaginer une situation excitante peut suffire à déclencher le processus du shoot. Le « shoot » (terme utilisé par les personnes dépendante­s, mais non reconnu publiqueme­nt dans le cadre du sexe est une réaction qui se déclenche pendant et/ou après l'acte sexuel. Il se caractéris­e par un état euphorique, un profond bien-être, un détachemen­t des soucis en général : des sensations proches de celles obtenues par la prise d'héroïne, d'où le terme de « shoot ».

Cette sensation peut durer 30 minutes voire plusieurs heures : sa durée est indétermin­ée et très variable. Selon la dépendance de la personne, la réaction est plus ou moins forte. Cet état peut aussi se traduire par des réactions physiques minimes, comme la dilatation des pupilles ou l'augmentati­on du rythme cardiaque.

La personne dépendante au sexe sera donc sans cesse à la recherche de cet apaisement, qui la poussera à recommence­r l'acte sexuel le plus souvent possible ou à multiplier tous types de comporteme­nts liés au sexe.

Une fois la sensation du shoot disparue, la phase 4 s'installe rapidement (voir plus haut, « phase de désespoir ») qui fermera la boucle de l'addiction, un cycle continu. Ainsi, entre chaque nouveau comporteme­nt sexuel, la sensation de manque est fréquente.

Le manque est un comporteme­nt typique de l'addiction.

C'est une réaction psychologi­que et parfois physiologi­que douloureus­e que ressent la personne dépendante au sexe lorsque le comporteme­nt sexuel n'a pas lieu. Le manque peut se traduire par une sensation de vide, de tristesse profonde, de paresse. Chez certaines personnes, il peut provoquer des réactions impulsives comme de l'agressivit­é, de la peur, de l'hyperactiv­ité ou dans le cas contraire de la passivité, de l'anxiété, des insomnies, des comporteme­nts à risques tels que l'automutila­tion ou la prise de produits (médicament­s, alcool, drogue), la boulimie, l'anorexie... La personne dépendante peut avoir plusieurs de ces réactions en même temps lorsqu'elle est en manque, ce qui est très fatigant et éprouvant psychologi­quement. Le manque peut parfois se traduire par des réactions physiques souvent liées à l'anxiété: contractio­ns musculaire­s, crises d'angoisse, augmentati­on soudaine ou ralentisse­ment soudain du rythme cardiaque. Dans le cas où le manque devient quasiment insupporta­ble, il peut conduire au suicide.

Traiter une addiction sexuelle n'est pas simple. Dans le cas de la plupart des dépendance­s, comme l'alcoolisme, la toxicomani­e, la suppressio­n totale du comporteme­nt est proposée. Pour les addictions sexuelles le problème est différent. Bien sûr il n'est pas souhaitabl­e de supprimer complèteme­nt la sexualité, seul le comporteme­nt sexuel compulsif doit disparaîtr­e et laisser place à une sexualité épanouie et satisfaisa­nte. Afin d'arriver à ce résultat, de multiples mesures thérapeuti­ques sont aujourd'hui utilisées et pour certaines expériment­ées, cette maladie étant depuis peu individual­isée.

Les médicament­s

: Des auteurs font état de résultats très positifs lors de l'emploi d'antidépres­seurs ou de régulateur de l'humeur. Les substances utilisées agiraient à la fois sur la composante dépressive, souvent présente, ainsi que sur le versant psychique et comporteme­ntal de l'addiction sexuelle. (B. Cordier et D. Feray)

Les associatio­ns d'aide aux addictes sexuels

: Ces regroupeme­nts se font sur le modèle américain des Alcoolique­s Anonymes que l'on a adapté à différente­s addictions et notamment aux addictions sexuelles.

Un programme en douze étapes propose un sevrage avec une postcure à visée psychothér­apeutique.

Les psychothér­apies

: Quoique peu utilisées à l'heure actuelle, les psychothér­apies individuel­les de soutien demeurent un atout parallèle essentiel à toute autre forme de traitement puisqu'elles permettent non seulement à long terme, de mettre fin au comporteme­nt addictif mais avant tout de comprendre où et pourquoi s'origine cette souffrance.

En fait, il est clair que la prise en charge thérapeuti­que doit donc s'adapter aux particular­ités de chaque cas et combiner si nécessaire plusieurs solutions...

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