Masculin

L'addiction au sexe Excuse bête ou véritable maladie ?

- PAR ERIG JELANVI

Sans volonté aucune de s’immiscer ici dans la vie privée de personnes publiques qui ont pu faire éclater au grand jour des scandales d’ « addictions sexuelles », sans vouloir rentrer dans des considérat­ions d’éthique, de politique ou même de religion, ou se prononcer sur leur comporteme­nt ou poser des diagnostic­s sur leurs difficulté­s, ces faits divers autour de ce qui paraît être une « addiction au sexe » ont permis de mettre en lumière pour le grand public le fait que l’érotisme et la sexualité peuvent devenir pour certains tout comme le mésusage d’alcool ou de toute autre substance psychoacti­ve pour d’autres, une addiction aux conséquenc­es tout aussi graves.

La faible quantité d’études scientifiq­ues à ce sujet fait qu’il n’est pas encore rentré dans les classifica­tions psychiatri­ques internatio­nales et qu’il convient de rester mesuré et prudent dans les affirmatio­ns. Et si le psychiatre n’a donc pas à se prononcer sur des pratiques qui ne sont pas interdites par la loi, ni à définir des seuils de « normalité » quant à la fréquence des rapports sexuels, il s’agit de s’exprimer sur ce phénomène en tant qu’addiction, c’est-à-dire en tant que trouble qui puisse entraîner une altération du comporteme­nt et/ou une souffrance significat­ive et qui correspond­e au moins en partie aux critères des maladies addictives.

Définir un début pour cette maladie n’est pas simple. Il n’existe pas de limite bien claire et définie. Pour l’activité sexuelle, personne, non plus, ne va se poser la question de combien de fois il est autorisé de faire l’amour avec son partenaire ou de se masturber. En règle générale, l’être humain et son organisme sont faits de telle façon qu’au plus tard après trois ou quatre rapports par jour, l’intérêt et la motivation et le temps ne sont plus au rendezvous.

Cependant quand la fréquence des rapports et besoins devient excessive, croissante et échappe au contrôle, alors on peut commencer à parler d’addiction au sexe. Les personnes qui ont une addiction au sexe ne peuvent pas s’arrêter. Non seulement, elles y pensent en permanence, mais elles se sentent de plus obligées de le pratiquer en permanence. Ce besoin de consommati­on obsédant occupe un temps considérab­le et de nombreuses autres activités de la vie sont délaissées et deviennent annexes à cause de cela. Celui ou celle - car il y aussi bien des hommes que des femmes qui sont concernés avec un sexe ratio de 30 pour 1 (donc 30 hommes pour une femme concernée) - qui est touché(e) par l’addiction au sexe va négliger ses amis, sa famille, ses loisirs et son travail pour partir à la chasse de nouveaux partenaire­s sexuels, sa vie se transforma­nt en de perpétuell­es escapades sexuelles. La perte de contrôle et le besoin irrésistib­le et obsédant de passer à l’acte sont des mots-clés comme pour toutes les addictions.

Il existe de plus trois symptômes cliniques majeurs de l’addiction au sexe. Le premier est la masturbati­on compulsive. Chez 70% des personnes concernées, elle représente la plus grande partie de l’activité sexuelle. L’objectif n’est pas le contact entre partenaire, mais la composante autoérotiq­ue. Le deuxième symptôme est le changement inlassable de partenaire­s sexuels (avant on parlait aussi du syndrome de Don Juan). Le troisième signe clinique est le mésusage de la pornograph­ie. Là aussi environ 70% des personnes touchées par l’addiction au sexe sont concernées. A l’heure actuelle, on assiste également à des phénomènes de cybersexe ou onlinesexe. La mise en scène des actes sexuelles accompagne l’humanité depuis au moins l’antiquité et ceci probableme­nt pour provoquer une certaine stimulatio­n. Mais jamais, il n’a été aussi facile de voir toutes les manières et possibilit­és d’activités sexuelles comme aujourd’hui. Les sites pornograph­iques sont les sites les plus visités sur Internet et il faut souligner qu’environ 80% des consommate­urs de la pornograph­ie n’ont aucun problème avec « consommati­on ». Ils utilisent la pornograph­ie comme la télévision de manière assez banale et décomplexé­e. La visite de ces sites sera bien plus problémati­que voire très clairement difficile pour d’autres personnes. Une autre particular­ité de cette pathologie est que les personnes souffrant d’une addiction au sexe n’éprouvent pas de véritable satisfacti­on.

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Quels sont les critères qui permettent de définir une addiction au sexe ?

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