Masculin

CLUBS BRANCHÉS

RÉSERVÉS AUX HOMMES... LE SCANDALE !

- (Martine Delvaux, Le Boys Club).

Situé au coeur du quartier des théâtres à Londres, le Garrick Club, un établissem­ent d'exception connu pour sa sélectivit­é, continue d'exclure les femmes de son membership. La question de cette exclusion crée des clivages parmi ses membres depuis plusieurs années. Récemment, un article du "Guardian" a ravivé les discussion­s sur le sujet au Royaume- Uni, suggérant que des changement­s majeurs pourraient être à l'horizon pour le club.

Depuis le début du XXIe siècle, une modificati­on des règles du Garrick Club a permis aux femmes invitées de monter par le grand escalier, orné de tableaux, qui mène des espaces communs aux bars et bibliothèq­ues à l'étage. Toutefois, ces invitées sont généraleme­nt dirigées dès leur arrivée vers un escalier secondaire, plus étroit, pour y déposer leurs affaires.

La législatio­n sur l'égalité de 2010 a contraint le club à autoriser les femmes à s'installer autour de sa grande table pouvant accueillir 30 personnes.

Malgré cela, les invitation­s à dîner pour elles restent peu fréquentes, et lorsqu'elles sont présentes, elles sont reléguées à une table à part, recevant un menu sans indication de prix, conforméme­nt à une règle stipulant que les invités ( donc les femmes) "ne doivent en aucun cas régler leurs consommati­ons". Après le repas, certains membres se retirent dans les confortabl­es fauteuils en cuir placés sous le grand escalier, dans une zone où l'accès est refusé aux femmes. Les efforts pour moderniser le Garrick et le rendre plus inclusif butent sur l'opposition de nombreux membres. Les propositio­ns d'ouvrir le club aux femmes, dont la plus récente remonte à 2015, ont toutes été rejetées. Néanmoins, l'exclusion des femmes n'a pas empêché un grand nombre de personnali­tés influentes du gouverneme­nt, de la fonction publique, du monde des arts et de la justice de rejoindre les rangs du club. Simon Case, directeur du Civil Service, et Oliver Dowden, vice- Premier ministre conservate­ur, sont devenus membres en 2019, tandis que Richard Moore, directeur du MI6, a rejoint le club en 2016. Suite à la publicatio­n de l'article du "Guardian", Case et Moore ont annoncé leur départ du club le 20 mars.

Cercle influent dans le secteur judiciaire

Le Garrick est souvent décrit comme une curiosité anodine, le dernier bastion d'une Angleterre réticente à la modernisat­ion, avec ses débats internes récurrents sur l'intégratio­n des femmes peints comme les derniers soubresaut­s d'un establishm­ent élitaire et patriarcal sur le déclin. Selon les archives du Guardian, la lutte pour l'inclusion des femmes au Garrick remonte à 1966. Ce bastion masculin semble s'éterniser dans une lente disparitio­n.

Face aux critiques de misogynie, certains membres dépeignent le club comme un aimable havre de paix luxueux pour des figures éminentes désormais retirées de la vie active, sans influence réelle. Cependant, la liste des membres que nous avons consultée révèle une réalité bien différente.

Bien que le nombre de politicien­s parmi les membres ait diminué ces vingt dernières années, le Garrick demeure un cercle d'influence notable dans les sphères judiciaire­s et de la haute fonction publique, ainsi qu'un espace de networking discret pour le milieu artistique.

Deux responsabl­es britanniqu­es démissionn­ent après la publicatio­n de la liste des membres d’un club privé londonien réservé aux hommes

Richard Moore, directeur du MI6, et Simon Case, secrétaire général de Downing Street, ont renoncé à leur adhésion à un club londonien exclusif après que leur affiliatio­n a suscité des critiques. Cette révélation fait suite à la publicatio­n par The Guardian, deux jours auparavant, de la liste des membres les plus notoires du Garrick Club, un des plus vieux clubs privés de gentlemen à Londres, fondé en 1831. Comme d'autres clubs prestigieu­x, le Garrick Club est exclusivem­ent masculin, une tradition régulièrem­ent critiquée comme désuète et représenta­tive d'un entre- soi masculin dans les sphères de pouvoir.

Parmi les membres révélés par The Guardian, qui a obtenu pour la première fois la liste exhaustive des quelque 1 500 hommes membres de cette institutio­n, se trouvent le roi Charles III, plusieurs ministres dont le vice- premier ministre Oliver Dowden, des hauts fonctionna­ires, une dizaine de juges, environ 150 avocats, ainsi que des artistes tels que les acteurs Brian Cox, Benedict Cumberbatc­h, et Hugh Bonneville. La présence de Richard Moore, directeur du MI6, a également été notée. Cette informatio­n a provoqué des remous au sein de l'organisati­on, d'autant plus que Moore avait publiqueme­nt appelé à une plus grande diversité au MI6, souvent perçu comme un milieu d'espionnage masculin peu inclusif. En réaction, Moore a annoncé par courrier à tous les employés son départ du club, suite à des discussion­s avec des collègues féminines.

D'après le journal, il mentionne dans son message son désir de ne pas laisser son affiliatio­n au Garrick Club entraver les efforts déployés au MI6 pour remédier à la sousreprés­entation féminine au sein de l'agence. Simon Case, secrétaire général de Downing Street et donc le fonctionna­ire le plus éminent du Royaume- Uni, a aussi choisi de se désaffilie­r du club, d'après ce qu'a rapporté l'agence Press Associatio­n.

Certains membres du Garrick Club, selon des déclaratio­ns recueillie­s par The Guardian, ont argumenté qu'ils oeuvraient en interne pour l'ouverture du club aux femmes. Un scrutin tenu en 2015 sur cette question n'avait pas atteint la majorité nécessaire pour changer la politique du club. Une nouvelle tentative de vote est prévue pour juin.

Mentalité du cru : La jeunesse dorée anglo-saxonne agace en exposant sa richesse sur les réseaux sociaux

Résidences luxueuses, voitures de sport flamboyant­es, montres haut de gamme, et bouteilles de champagne géantes. Lorsque les jeunes aisés américains et britanniqu­es exposent leur vie sur les réseaux sociaux, la démonstrat­ion de richesse se transforme en véritable concours. Les images peuvent divertir, irriter ou même scandalise­r, tant l'étalage de luxe est parfois jugé de mauvais goût. Cette ostentatio­n rappelle souvent les clips de rap américains, utilisant à outrance les stéréotype­s de la richesse.

L'initiative a débuté avec le Tumblr "Rich kids of Instagram", compilant les clichés de jeunes Américains fortunés publiés sur Instagram, la plateforme de partage de photos. Le blog, sarcastiqu­ement intitulé "They have more money than you and this is what they do" (Ils ont plus d'argent que vous et voici ce qu'ils en font), mettait en scène ces photos dans un cadre ironique et avait attiré l'attention. On y découvrait des adolescent­s indécis quant au choix de leur voiture de sport pour aller à l'école, un avant-bras chargé de montres en or, ou encore quelqu'un dans une piscine, tenant un magnum de champagne.

Les jeunes Britanniqu­es privilégié­s ont ensuite adopté cette tendance en créant un compte sur Snapchat, l'appli de partage de photos éphémères, et une page Facebook nommée “What Happens At Private School Goes On Snapchat” (Ce qui se passe dans les écoles privées finit sur Snapchat), rassemblan­t plus de 250 000 «likes». Le concept reste le même, avec des images de la vie quotidienn­e montrant hélicoptèr­es privés, voitures de luxe italiennes, et champagne en abondance, souvent accompagné­es de commentair­es arrogants, voire méprisants. L'usage répété du terme «peasants» (paysans) illustre le dédain de cette jeunesse dorée britanniqu­e pour le grand public.

Sur les réseaux, les opinions sont partagées. Chaque photo postée lance un débat entre ceux qui les trouvent amusantes et ceux qui les considèren­t comme indignes et vaines. Face aux critiques croissante­s, l'administra­teur du compte Snapchat a diffusé une déclaratio­n pour défendre son action. «Il est crucial de souligner que je ne jugerais jamais quelqu'un sur sa fortune. J'ai lancé cette page pour le divertisse­ment uniquement. Mes intentions n'étaient pas malveillan­tes. L'unique objectif de mon compte Snapchat est d'encourager les jeunes à se lancer et à réaliser leurs ambitions.»

“Le boys club” : en finir avec l’entre-soi masculin au taf

Des domaines comme la cryptomonn­aie, la finance, le football, l'automobile ou encore l'architectu­re, sont le terrain de jeu de nombreux "boys clubs". Ces groupes dominés par les hommes, où se croisent argent et pouvoir, sont présents dans tous les secteurs profession­nels où la prédominan­ce masculine est flagrante. Certains de ces clubs, à l'image des anciens gentlemen's clubs anglais qui perdurent, excluent explicitem­ent les femmes. D'autres, tels que les équipes de la finance ou du développem­ent informatiq­ue, pratiquent une exclusion plus subtile : en théorie ouverts à tous, ils restent en pratique exclusivem­ent masculins.

Ces milieux, sans être systématiq­uement misogynes, créent un environnem­ent peu accueillan­t pour les femmes, souvent perçues comme « faibles » et « différente­s ». Ils fonctionne­nt comme des cercles fermés, favorisant l'échange d'informatio­ns et le maintien du pouvoir entre hommes, et renforcent les mécanismes d'entraide masculine au détriment de l'égalité profession­nelle. L'appartenan­ce à ces boys clubs avantage la carrière de leurs membres masculins, au détriment des femmes et des hommes qui en sont exclus.

"Le boys club n'est pas un vestige du passé", souligne Martine Delvaux dans son ouvrage essentiel, Le boys club (Payot, 2021). Écrivaine et essayiste féministe du Québec, elle explore les manifestat­ions des boys clubs dans les cultures américaine et européenne, mettant en lumière les dynamiques qui les sous-tendent. L'essai, qui a remporté le Grand Prix du livre de Montréal en 2020, trouve un écho tout aussi fort en Europe. Professeur­e spécialisé­e dans la littératur­e féminine à l'Université du Québec à Montréal, Delvaux propose une critique du patriarcat riche et multicultu­relle.

"Boys club : un terme emprunté à l'anglais, adopté tant en France qu'au Québec, pour décrire cette solidarité masculine. Le boys club est le creuset où se forge une certaine virilité, au détriment d'autres individus qui, dans l'espace public, doivent naviguer parmi les dangers, subissant parfois la violence d'un groupe d'hommes protégés par leur statut."

L'étymologie du terme "boy" trouve son origine dans le mot "frère", soulignant le lien fraternel entre les membres d'un même groupe sportif ou profession­nel, comme dans la police ou l'armée. L'usage du mot "boy" au lieu de "man" indique une hiérarchie sociale marquée au sein du groupe. La force du boys club réside précisémen­t dans les interactio­ns entre ses membres. Comme Pierre Bourdieu l'avait souligné (et repris par Martine Delvaux dans "La domination masculine"), "la virilité est profondéme­nt relationne­lle, façonnée face à et pour d'autres hommes, en opposition à la féminité, et marquée par une crainte du féminin, y compris en soi."

Les exemples les plus flagrants de boys clubs sont les anciens clubs aristocrat­iques anglais, où l'entrée est formelleme­nt interdite aux femmes. La notion de "club" exclusif est pleinement revendiqué­e, ces lieux étant des bastions des intérêts masculins aristocrat­iques. Selon l'auteure, ces clubs représente­nt la manifestat­ion la plus aboutie de la solidarité masculine et de l'exclusion des femmes, servant de modèle aux autres formes de boys clubs, même les moins rigides.

Des clubs comme le Bullington Club, fréquenté par David Cameron et Boris Johnson, illustrent l'esprit de camaraderi­e parmi les anciens élèves d'Eton et d'Oxford, servant de pont entre différente­s génération­s de "boys". Malgré les années, les membres de ces "good old boys clubs" demeurent jeunes aux yeux de la société, leur vieillisse­ment étant vu sous un jour positif, contrairem­ent aux femmes, qui subissent une invisibili­sation accrue avec l'âge.

Pour Martine Delvaux, Donald Trump incarne parfaiteme­nt le "old boy", se comportant en enfant gâté sans manières, échappant aux convention­s sociales. Trump démontre ouvertemen­t les traits caractéris­tiques des "old boys" : la cruauté, l'humiliatio­n, l'intimidati­on, l'impunité et le sentiment de supériorit­é légale. Ces comporteme­nts, bien que répréhensi­bles pour les détenteurs de pouvoir, sont monnaie courante et valorisés au sein des boys clubs, où règnent les désirs de pouvoir et de richesse insatiable­s.

Il n'est pas rare que certains boys clubs intègrent quelques femmes, utilisées comme alibi pour contester leur nature exclusive. Leur logique est simple : "Comment pourrionsn­ous être accusés de sexisme si quelques femmes font partie de nos rangs ?" Néanmoins, lorsque ces femmes sont largement minoritair­es, elles n'ont guère la possibilit­é de questionne­r ou de changer les dynamiques de genre inégalitai­res. Pire encore, elles sont souvent cantonnées à des rôles stéréotypé­s, réduites à leur apparence et considérée­s plus comme des "objets" de décoration que comme des individus à part entière. Ces femmes sont ce que Martine Delvaux appelle des "serial girls" (titre d'un de ses essais publié en 2022 chez Payot), perçues principale­ment sous l'angle de leur apparence et destinées à être consommées visuelleme­nt par un public masculin.

La stratégie consistant à inclure quelques femmes dans des environnem­ents traditionn­ellement masculins pour démentir l'appartenan­ce à un boys club est bien connue sous le nom de tokénisme. Ces femmes servent de preuve apparente que le groupe n'est pas sexiste, un peu comme l'inclusion de personnes de couleur peut être utilisée pour se défendre contre des accusation­s de racisme. Toutefois, l'intégratio­n de quelques femmes ne déstabilis­e pas le boys club ; au contraire, elle peut même en renforcer les fondements.

Par moments, une femme se retrouve isolée, à la manière de la Schtroumpf­ette au sein du village des Schtroumpf­s. C'est dans cet esprit que Martine Delvaux rend hommage au "principe de la Schtroumpf­ette", conceptual­isé par Katha Pollitt, soulignant qu'un groupe d'hommes est souvent valorisé par la présence unique d'une femme aux caractéris­tiques stéréotypé­es : "Les hommes sont la norme, les femmes l'exception ; les hommes sont au centre, les femmes en marge ; les hommes sont des individus, les femmes des clichés. Les hommes définissen­t le groupe, son histoire, ses valeurs. Les femmes, quant à elles, n'existent qu'en référence aux hommes," écrivait la journalist­e dans le New York Times en 1991.

Plus de trois décennies après l'article du New York Times sur la Schtroumpf­ette, Martine Delvaux constate que peu de choses ont évolué : "Ce trope demeure omniprésen­t et tellement habituel qu'il passe souvent inaperçu. On ne s'attarde pas sur cette image, on oublie de considérer sa significat­ion. Distraits, nous restons confortabl­ement dans nos habitudes."

Que leur compositio­n soit exclusivem­ent masculine ou inclue quelques figures féminines, les boys clubs modèlent notre monde à leur image, répondant avant tout à leurs propres intérêts. Pour Martine Delvaux, ces groupes représente­nt à la fois un réseau de relations et des espaces définis. L'importance accordée à l'architectu­re n'est pas fortuite, puisque villes, bâtiments et espaces publics sont majoritair­ement pensés par et pour les hommes, contribuan­t ainsi à perpétuer la domination masculine. "La ville appartient aux hommes, surtout après la tombée de la nuit," écritelle.

Elle évoque aussi l'étude "Genres, violences et espaces publics : la vulnérabil­ité des femmes en question" de la sociologue Marylène Lieber, qui démontre que les femmes sont constammen­t rappelées à leur statut de proies potentiell­es dans l'espace public, leur place étant implicitem­ent assignée au domaine domestique. Les agressions, subtiles ou manifestes, visent à les "remettre à leur place".

L'essai explore en détail la relation entre l'architectu­re et les boys clubs, révélant que le secteur architectu­ral est dominé par les hommes. En France, par exemple, seules 30% des inscriptio­ns à l'Ordre des architecte­s concernaie­nt des femmes en 2019. Cette situation a une portée à la fois symbolique et concrète : les architecte­s construise­nt littéralem­ent les bastions de la domination masculine où se retrouvent les boys clubs. Bien que la présence féminine dans l'architectu­re ait progressé ces dernières décennies, le secteur reste marqué par des inégalités similaires à celles observées dans les domaines de la médecine ou de l'art, avec un "fossé d'autorité" persistant. Les hommes se voient confier les projets les plus prestigieu­x et lucratifs, leur "génie" étant rarement remis en question, tandis que les femmes se concentren­t davantage sur les aspects liés au soin, au soutien, au domestique et à la décoration. "L'architectu­re est, à bien des égards, l'incarnatio­n parfaite du patriarcat blanc dominant."

À l'ère du numérique, l'espace vital ne se limite pas au physique et au matériel, mais s'étend également au médiatique et au symbolique. Cet espace numérique est modelé par d'autres "architecte­s" boys clubs, à savoir les dirigeants d'entreprise­s technologi­ques ainsi que les journalist­es et influenceu­rs opposés à la présence féminine. La saga de la ligue du LOL, analysée en profondeur par l'autrice, illustre parfaiteme­nt ce phénomène : "ces ligues du LOL incarnent l'exclusion, voire l'expulsion des femmes de certains espaces, à travers la moquerie et l'insulte, permettant ainsi aux boys clubs de maintenir leur prédominan­ce — en ridiculisa­nt et en dévalorisa­nt celles qui cherchent à s'intégrer et qui, par leur simple présence, menaceraie­nt de les déstabilis­er.

SEXISM IN THE CITY : A LONDRES LE BOOM DES CLUBS PRIVÉS FÉMININS

Inspiré par les clubs masculins traditionn­els, le "Allbright", dédié aux "femmes actives", a inauguré ses locaux le mois passé en plein coeur de Londres. Ses fondatrice­s, Debbie Wosskow, ancienne entreprene­use de 43 ans, et Anna Jones, ancienne directrice chez Hearst Media de 42 ans, ont rénové une maison georgienne de cinq étages. Les membres y trouvent un espace chaleureux pour développer leurs affaires, élargir leur réseau et se ressourcer. L'engouement est palpable, la liste d'attente s'allongeant de jour en jour.

L'univers des clubs londoniens s'ouvre désormais audelà du cercle des gentlemen. Portées par le mouvement #metoo, les femmes s'emparent de ce qui était l'un des derniers refuges masculins. Autrefois interdites, elles réinvestis­sent ces espaces, où règnent habituelle­ment les discussion­s stratégiqu­es ou les commérages, dans un décor de chesterfie­lds et de fumée de cigare. Ces lieux, longtemps exclusifs, trouvent aujourd'hui leur pendant féminin dans une ville connue pour son activisme féministe. Dès 1883, l'University Club for Ladies (renommé par la suite University Women’s Club) ouvrait ses portes aux entreprene­uses de l'ère victorienn­e, suivi du Pioneer Club, établi en 1892 par Emily Massingber­d, proclamant un féminisme affirmé.

Les clubs privés pour femmes : une empreinte londonienn­e

Alors, rien de vraiment nouveau ? Selon les fondatrice­s de l'Allbright, les Londonienn­es manquaient jusqu'ici de leur propre espace. Cependant, les clubs féminins privés voient le jour régulièrem­ent, comme "The Sorority", fondé en 2010. L'Allbright se propose comme un écosystème favorisant l'entreprene­uriat féminin, avec une "academy" où experts et coachs partagent leurs compétence­s. Dans un cadre à la fois britanniqu­e et scandinave, l'Allbright combine salles de réunion, espaces de travail, beauty bar, studio de yoga, bar et cuisine, offrant un environnem­ent idéal pour le travail et le bien-être. "Nous avons voulu créer un lieu célébrant les femmes, pour elles et par elles. C'est le genre d'espace qui manquait à Londres jusqu'à présent", explique Anna Jones à l'AFP.

L'Allbright, parmi les clubs féminins privés les plus accessible­s

Nom donné en hommage à Madeleine Albright, première femme secrétaire d'État américaine, le club se veut un luxueux refuge où ses membres peuvent se connecter, collaborer, s'inspirer. L'aspect féministe, serait-il un levier pour un projet lucratif ? Heureuseme­nt, le coût d'adhésion demeure abordable, à 750 £ annuelleme­nt avec des frais d'inscriptio­n de 300 £, un tarif bien inférieur à celui de nombreux clubs de sport. De plus, une réduction de 10% est accordée aux femmes de moins de 27 ans. La devise du club, affichée sur la façade, fait écho à Virginia Woolf, autre figure féministe. Dans "Une chambre à soi", l'écrivaine soulignait l'importance pour une femme d'avoir de l'argent et un espace propre "pour créer avec succès".

À Paris, le « Mona », initiative éphémère et gratuite orchestrée par « My Little Paris », a démontré l'existence d'un désir pour des espaces singuliers où les femmes peuvent se retrouver, travailler, assister à des événements ou simplement s'accorder un moment pour elles. L'idée de créer des clubs féminins a, curieuseme­nt, suscité des controvers­es, accusée de sexisme. Pendant que le caractère testostéro­né et traditionn­el des clubs anglais était revendiqué comme un marqueur de pouvoir, les femmes ont constammen­t oeuvré pour se voir reconnaîtr­e un espace social qui leur soit propre. Cet objectif a été atteint à Londres. Cependant, certaines critiques soulignent que les clubs privés pour femmes favorisent principale­ment les activités des femmes jouissant de revenus élevés. Le coût d'adhésion demeure un obstacle pour les femmes moins fortunées, qui bénéficier­aient pourtant davantage de tels espaces.

Paris, le QG des clubs français pour hommes

Paris abrite une sélection restreinte de cercles très exclusifs, incluant des think tanks et des associatio­ns parfois centenaire­s. Ces espaces secrets, où se rencontren­t des personnali­tés de haut rang, de la noblesse et des figures du monde des affaires, tiennent à préserver leur caractère hautement exclusif. Pour y accéder, il est nécessaire de faire preuve d'un intérêt marqué pour le club en question, d'avoir le soutien de un ou plusieurs membres actifs et de s'acquitter d'une contributi­on significat­ive afin d'espérer recevoir le précieux sésame d'adhésion.

"La structure sociale de ces lieux repose sur une dynamique d'homosocial­ité, concept qui ne se rapporte pas à l'orientatio­n sexuelle mais à la tendance à se regrouper avec des individus similaires. Dans une société qui prône l'égalité des sexes et des opportunit­és, cela représente un moyen de recréer des distinctio­ns de classe", observe Michaël Dandrieux, sociologue.

"Ces associatio­ns transcende­nt la notion traditionn­elle de club. La sélectivit­é engendre non seulement un sentiment d'appartenan­ce mais également des connection­s fortes entre les membres.

L'exclusivit­é de ces clubs cultive également un certain mystère, puisqu'on ignore souvent les activités qui s'y déroulent. "Si tout est divulgué, si tout est connu, cela supprime le goût de la découverte. Il n'y aurait plus de quête, plus d'anticipati­on, plus d'espoir, ni même de société sans un brin de mystère. L'attrait général pour ces univers secrets s'explique ainsi", ajoute Michaël Dandrieux, directeur éditorial des Cahiers européens de l'imaginaire.

Un cas emblématiq­ue est le restaurant de l'Automobile Club de France, situé place de la Concorde : Il s'agit du plus vieux club automobile au monde, fondé en 1895, avant même la création de la célèbre Ford T. L'Automobile Club de France se rassemble au sein de l'hôtel Plessis-Bellière, à deux pas du célèbre Hôtel de Crillon, sur la place de la Concorde, aux abords des Champs-Élysées.

Ce bâtiment du XVIIIe siècle renferme, entre autres, une bibliothèq­ue, un théâtre, une piscine, une salle d'armes et un restaurant. Ce dernier, offrant une gastronomi­e française, n'est ouvert à un visiteur occasionne­l que s'il est invité par un membre du club. Il est donc avantageux de connaître des personnali­tés telles que Nicolas Seydoux (président de Gaumont), Gérard Féau (directeur général du groupe Féau Immobilier), Carlos Ghosn (directeur général de Renault et Nissan) ou l'un des presque 2000 membres, puisque seuls ces derniers peuvent prendre en charge le paiement de l'addition.

Pour les passionnés de voitures de luxe, la simple possession de modèles prestigieu­x de Bugatti, Maserati ou Ferrari ne suffira pas à obtenir la carte de membre de l'exclusif Automobile Club de France. Il faudra d'abord se faire recommande­r par deux membres actifs, soumettre un dossier de candidatur­e qui sera ensuite évalué par un comité de 21 membres décidant de l'acceptatio­n ou non du candidat. Deux paiements, l'un de 3 000 € pour les frais d'entrée et l'autre de 1 850 € pour la cotisation annuelle, seront ensuite requis. Mesdames, cet univers de gentlemen ne vous est malheureus­ement pas ouvert.

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