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Xi Jinping veut "oeuvrer avec la France" à "résoudre la crise" en Ukraine
À peine posé le pied sur le sol parisien dimanche pour une visite d'État, le président chinois Xi Jinping a exprimé sa volonté de "travailler avec la France et toute la communauté internationale" pour "résoudre la crise" en Ukraine.
Accueilli peu après 16h00 (14h00 GMT) à l'aéroport d'Orly par le Premier ministre Gabriel Attal, il sera reçu lundi à l'Élysée par le président français Emmanuel Macron, qui entend promouvoir la "réciprocité" commerciale et la recherche d'une solution à la guerre en Ukraine face à un dirigeant chinois qui continue d'afficher son soutien à la Russie.
"Dans l'espoir que la paix et la stabilité reviennent rapidement en Europe, nous sommes déterminés à travailler avec la France et toute la communauté internationale pour trouver des solutions viables à cette crise", a écrit le numéro un de la superpuissance asiatique dans une tribune publiée par le quotidien Le Figaro.
Paris souhaite de son côté s'assurer que la Chine, principal allié du président russe Vladimir Poutine, ne s'engage pas ouvertement dans son effort de guerre contre Kiev. Ou même "l'encourager à utiliser les leviers" dont elle dispose sur Moscou pour "contribuer à une résolution de ce conflit", selon l'Élysée. Emmanuel Macron avait déjà transmis ce même message il y a un an lors de sa propre visite d'État en Chine, mais avec des résultats mitigés.
Après la France, le président chinois, de retour pour la première fois en Europe depuis 2019, se rendra en Serbie et en Hongrie, deux pays qui sont restés proches de Moscou.
Lundi, Xi Jinping, venu célébrer les 60 ans de relations diplomatiques entre la France et la Chine, multipliera les rencontres avec Emmanuel Macron, qui s'est préalablement concerté avec le chancelier allemand Olaf Scholz.
Dans la matinée, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen se joindra au duo franco-chinois à l'Élysée pour une session qui devrait permettre d'aborder les contentieux commerciaux.
Et ils sont nombreux. Menacée d'être écrasée entre les économies américaine et chinoise, toutes deux largement soutenues par l'État, l'Union européenne a intensifié ces derniers mois ses enquêtes sur les subventions d'État chinoises à plusieurs secteurs industriels, notamment celui des véhicules électriques, qu'elle accuse de fausser la concurrence.
Dans un entretien accordé à La Tribune dimanche, Emmanuel Macron admet que les Européens ne sont "pas unanimes" sur la stratégie à adopter vis-à-vis de la Chine. Selon lui, "certains acteurs voient toujours dans la Chine essentiellement un marché de débouchés", alors même qu'elle "exporte massivement vers l'Europe".
Le président français plaide en faveur d'une approche axée sur "une meilleure protection de notre sécurité nationale", soulignant la nécessité d'être "beaucoup plus réalistes dans la défense de nos intérêts" et de "réclamer la réciprocité".
À Pékin, ces mesures perçues comme "protectionnistes" suscitent des réactions négatives. Les autorités chinoises ont lancé leur propre enquête antisubventions, principalement dirigée contre le cognac français, une initiative que le président français compte dénoncer.
Bien que aucun contrat majeur n'ait encore été annoncé, des discussions sur des investissements étaient en cours jusqu'au dernier moment. Un forum économique franco-chinois est programmé pour lundi au théâtre Marigny. Dans une tribune publiée dans Le Figaro, Xi Jinping affirme que les deux pays ont la capacité de "renforcer leur coopération en matière d'innovation pour promouvoir le développement durable", citant notamment les usines de batteries. Il espère que la France créera "un climat d'affaires juste et équitable" pour ses entreprises.
L'après-midi, après une cérémonie d'accueil grandiose aux Invalides, et avant un banquet à l'Élysée, Emmanuel Macron et Xi Jinping auront une rencontre en tête-à-tête, suivie d'une déclaration à la presse.
Le président français compte demander à son homologue chinois de soutenir la "trêve olympique" pour tous les conflits lors des Jeux de Paris cet été, y compris celui en Ukraine. Mardi, dans les Pyrénées, lors d'une escapade plus personnelle entre les deux dirigeants et leurs épouses, Emmanuel Macron poursuivra sur cette lancée. Le déjeuner prévu sur le col du Tourmalet, où il passait ses vacances enfant, vise à établir un dialogue plus direct, notamment sur la question ukrainienne.
Concernant les droits humains, le président français préfère aborder "les désaccords" en privé. Le dossier sensible de Taïwan, malgré les tensions entre les ÉtatsUnis et la Chine, n'a pas été érigé en priorité par Paris.
Dimanche, plusieurs milliers de Tibétains se sont rassemblés à Paris pour protester contre la visite du président chinois, qualifié de "dictateur", dans un pays qui se targue d'être le "pays des droits de l'homme".
Sujet diplomatique entre la Chine et la France : Le cognac !
Depuis janvier, la filière française du cognac est sous le feu d'une enquête antidumping en Chine, accusée d'infractions à la concurrence. Cette situation met en lumière les tensions commerciales entre l'Union européenne et Pékin, plaçant le cognac français au coeur d'un conflit économique délicat.
La rencontre entre Emmanuel Macron et Xi Jinping, prévue pour lundi et mardi, revêt une importance capitale pour cette filière qui considère cette enquête comme une menace sérieuse sur son deuxième marché, la Chine.
Depuis le début de l'année, le cognac, tout comme d'autres eaux-de-vie de vin importées de l'Union européenne, fait l'objet d'une enquête minutieuse de la part des autorités chinoises, suite à une plainte émanant de professionnels du secteur de l'alcool en Chine. Cette démarche est largement perçue comme une réponse aux enquêtes européennes sur les subventions accordées aux voitures électriques fabriquées en Chine, une enquête soutenue principalement par la France.
Selon Jean-Marc Figuet, expert en économie du marché vinicole, Pékin a choisi de cibler spécifiquement le cognac en raison de son excédent commercial significatif et de son impact sur une région agricole spécifique de la France.
Cette enquête inquiète profondément la filière du cognac, qui exporte environ un quart de sa production vers la Chine, son deuxième marché après les États-Unis. La perspective d'une augmentation des droits de douane, à l'image de ce qui s'est produit avec les vins australiens ces dernières années, suscite des craintes légitimes au sein de l'interprofession du cognac.
Raphaël Delpech, directeur général du Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC), exprime le sentiment d'être pris en otage dans ce contexte de tensions commerciales, où le cognac devient un indicateur des relations bilatérales entre la France et la Chine. Malgré une coopération rigoureuse aux enquêtes demandées par Pékin, il reste une crainte persistante de ne pas être entendu au niveau politique, même en cas de confirmation de la légitimité juridique de leurs actions.
Pour la filière du cognac, cette visite revêt une importance cruciale. Représentant 72 500 emplois en France et générant 3,35 milliards d'euros d'exportations, elle constitue une opportunité majeure de discuter de l'enquête antidumping en cours.
Anthony Brun, président du syndicat des viticulteurs de cognac, souligne l'urgence de trouver des solutions lors de ces discussions, car la filière est convaincue de sa conformité aux règles commerciales.
L'Elysée a confirmé que la question du cognac serait au coeur des échanges entre les deux présidents, afin de garantir que les intérêts français soient préservés tout au long de la procédure en cours en Chine.
Bien qu'il soit encore trop tôt pour évaluer pleinement l'impact de cette enquête, la filière redoute déjà une érosion de ses parts de marché en Chine, surtout après une année 2023 marquée par un recul des exportations. En effet, en 2023, les exportations de cognac ont chuté à 165,3 millions de bouteilles, contre 212,5 millions en 2022, qui elles-mêmes étaient en baisse de 4,8% par rapport à 2021.
Selon les professionnels, ce recul s'explique par un "contexte difficile" avec l'inflation, les consommateurs se détournant d'un produit de luxe lorsque le pouvoir d'achat baisse, et par la diminution des importations des États-Unis (-45%), encore en train d'écouler les stocks accumulés durant les années de pandémie.
Pour l'économiste Jean-Marc Figuet, après des années florissantes, le cognac, "très dépendant de la croissance mondiale", a surtout connu "une conjonction d'événements défavorables", sans subir de "crise structurelle".
Mais "sans solution diplomatique entre la France et la Chine", et avec le possible retour au pouvoir aux ÉtatsUnis de Donald Trump, qui avait déjà menacé de cibler les vins français dans le passé, "le contexte pourrait devenir plus compliqué" à l'avenir, avertit-il.