Maxi

«Malgré les critiques, on s’aime à la folie !»

Quand Anne a rencontré Francis, elle était divorcée et mère de famille. Le poids des années ne l’a pas empêchée de sourire à son incroyable destin.

- Anne

Récemment encore, quelqu’un m’a dit que mon histoire lui avait fait du bien. Il est vrai que je la raconte facilement. J’ai la chance de vivre avec un homme qui m’aime comme un fou depuis quarante ans. C’est un bonheur « insolent », disent certains. J’aime assez cet adjectif qui correspond bien à ce que nous avons vécu. Car notre amour, à l’origine, n’avait rien d’évident pour beaucoup. Au début, notre relation faisait un peu « jaser » comme on dit…

Je m’étais déjà mariée une première fois, à 18 ans, dans une autre vie.

J’ai épousé mon premier amour alors que j’étais enceinte de ma fille aînée. Nous avons vite agrandi la famille et j’ai passé plus de vingt ans de ma vie entièremen­t consacrée à eux. Je me suis sans doute un peu oubliée dans une vie d’obligation­s et, quand les enfants ont été assez grands, j’ai préféré divorcer. À cette époque, loin de moi l’envie de revivre en couple et de m’enfermer à nouveau dans une relation ! J’ai rencontré Francis dans le restaurant où il travaillai­t. J’avais alors 43 ans et lui à peine 20. Il aime raconter qu’il est tombé amoureux de moi dès le premier regard. Lorsque je me rendais dans l’établissem­ent, il s’arrangeait souvent pour me servir et j’échangeais toujours avec lui avec plaisir. Tout a commencé comme une histoire d’ami- tié pour moi. Jamais je n’aurais imaginé, alors, vivre une histoire d’amour avec lui. De toute façon, la question ne s’est pas vraiment posée parce que lui, de son côté, n’a pas osé m’avouer ses sentiments. Il en a été très malheureux et a même fini par accepter un poste ailleurs. Heureuseme­nt, le hasard (ou le destin !) nous a rattrapés cinq ans plus tard, quand Francis est entré dans une cafétéria où je travaillai­s. Il m’a invitée à boire un verre et j’ai accepté. Francis m’a aimée tout de suite sans mesurer l’ampleur de notre différence d’âge. S’il se doutait bien que j’étais plus vieille que lui, c’est seulement lorsque je lui ai parlé de mes enfants, qui avaient à peu près son âge, qu’il a compris que plus de vingt ans nous séparaient. Et alors ? Il n’a pas renoncé pour autant ! Nous avons enchaîné avec un restaurant et je lui ai proposé de venir jouer au tarot avec mes filles. Mais quand nous sommes finalement rentrés, elles étaient couchées. Nous avons écouté un disque de Donna Summer, échangé un baiser, et… Francis n’est plus jamais reparti ! Cette fois, j’ai décidé de me laisser porter sans réfléchir et j’ai refusé de céder à la pression des autres. Francis a réapparu dans ma vie au bon moment : j’avais « digéré » mon divorce. Après avoir vécu quelques aven- tures, j’étais prête à me poser à nouveau avec quelqu’un. De son côté, lui aussi avait connu quelques histoires sans lendemain avec des filles de son âge qui l’avaient conforté dans ses sentiments pour moi. Il venait de louer un studio qu’il a rendu au bout de trois mois, tellement il était sûr de lui. En même temps, nous avons vite découvert que cette relation n’avait rien de convention­nel. Un soir, alors qu’il payait l’addition dans un restaurant, un employé s’est étonné que je confie ma carte bleue à mon fils. J’avais envie de rire, mais en même temps, j’étais choquée car je savais qu’un homme avec une femme plus jeune ne s’attirerait jamais ce genre de réflexion.

Nous avons décidé de vivre sans prêter attention au regard des autres.

Cela n’a pas été tous les jours facile. Je me souviens d’un matin quand, au réveil, la plus jeune de mes filles a traité Francis de « gigolo ». Il s’est alors mis en tête de m’épouser. Du haut de ses 25 ans, il était déjà très mûr et bien décidé à prouver à tous que notre histoire était vouée à durer. Trois fois, j’ai refusé car je savais que je n’avais pas besoin d’un morceau de papier pour me sentir aimée. Et puis j’ai fini par accepter après une ultime propositio­n très romantique,

en vacances à Mandelieu. J’ai surtout dit « oui » parce que c’était important pour Francis. Même si, au début, à l’aube de la cinquantai­ne, j’avais un peu peur de ne pas soutenir la comparaiso­n sur la durée avec des filles plus jeunes. Mes inquiétude­s ont vite disparu.

Tout semblait tellement simple et évident entre nous.

À mon âge, je le « privais » d’avoir des enfants, mais il était prévenu et n’a jamais formulé le moindre regret. Je crois que Francis a seulement senti une gêne, très passagère, pendant notre relation, lorsque j’ai pris ma retraite. Il n’avait alors que 42 ans et a essuyé quelques remarques étonnées à son travail quand il en a parlé. Mais nous avons finalement très bien abordé ce tournant. J’ai continué à voyager avec lui partout dans le monde, exactement comme avant. De son côté, il a testé avec moi plusieurs clubs dits du « troisième âge », et il a adoré ! Avec le recul, nous sommes persuadés que nous devons la longévité de notre relation à ce respect et cette ouverture d’esprit mutuelle. Chacun a accepté l’autre comme il était et s’est enrichi à ses côtés.

Aujourd’hui, le temps a bien fait les choses.

À 59 ans, Francis est toujours un bel homme, avec juste quelques cheveux grisonnant­s en plus. Quant à moi, pour 82 ans, je trouve que je n’ai pas trop mal vieilli ! Notre différence d’âge est sans doute moins flagrante aujourd’hui. D’ailleurs, les gens se retournent moins sur notre passage. Malgré tout, notre histoire continue d’intriguer car nous nous aimons toujours comme au premier jour. En trente-quatre ans d’amour, nous ne nous sommes quasiment jamais disputés. Contre toute attente, je n’ai jamais ressenti la moindre jalousie. Francis aussi sait qu’il n’a rien à craindre. Ce n’est pas maintenant que je vais échanger mon « petit jeune » contre un homme plus vieux !

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