Bonne nouvelle
Les mariages sont de plus en plus solides
Les mariages sont nettement moins fragiles qu’on ne le pensait jusqu’à maintenant. En effet, depuis sept ans, le divorce est en perpétuel recul. Malgré des dispositions permettant pourtant de se séparer plus vite et plus facilement, hommes et femmes semblent désormais moins tentés de dissoudre leur union. Certes, on se marie aussi un peu moins. Mais la baisse des mariages ne suffit pas à expliquer la baisse des divorces, puisque ces derniers reculent de 8 %, alors que le nombre de personnes mariées n’a diminué que de 1%. De quoi battre en brèche cette idée reçue selon laquelle, en France, le divorce s’est banalisé !
Époux ou futurs époux mûrissent davantage leurs décisions
Réjouissons-nous, c’est tout nouveau, tout beau : « Même si le nombre de divorces reste important, le risque de divorce baisse », observe Anne Solaz, directrice de recherche à l’Institut national d’études démographiques (INED). En effet, après avoir augmenté régulièrement depuis les années 1970 et atteint le pic historique de 155300 procédures en 2005, un recul s’est clairement amorcé depuis 2010. Sauter le pas, oui, mais en connaissance de cause
Alors que, durant la même période, le nombre de mariages a à peine baissé, les unions célé- brées semblent, elles, plus solides. « Il peut s’agir de couples aux valeurs plus “traditionnelles”, avec des convictions religieuses, par exemple, qui seraient de ce fait plus réticents au divorce », analyse la chercheuse. Mais c’est aussi parce que, avant de passer devant monsieur le maire, on prend le temps de mûrir sa décision ! « De nos jours, les personnes qui se marient ont eu une “période d’essai” avant de sauter le pas : elles ont souvent cohabité avant le mariage, ce qui permet à chacun d’être plus sûr de sa décision au moment de se dire oui. » Julie, 39 ans, mère au foyer, confirme : « Je ne me suis
pas précipitée dans le mariage. J’ai rencontré mon conjoint, nous avons vécu ensemble et nous ne nous sommes mariés qu’après sept ans de vie commune. En plus de nos sentiments, nous étions surtout sûrs de partager une même vision de la vie », ajoute-t-elle.
La majorité des remariages sont stables
Les deuxièmes, voire troisièmes mariages y sont aussi pour beaucoup dans la pérennité des unions. « La grande majorité des remariages sont solides, affirme Florence Beuken, psychothérapeute. » Et ce n’est pas Pascale, 54 ans, mariée pour la seconde fois, qui dira le contraire : « Je ne vais pas reproduire les mêmes erreurs. Cette fois, j’espère que c’est pour la vie ! » Cependant, des raisons moins sentimentales peuvent aussi expliquer le recul des divorces : « Un divorce coûte cher et, avec la crise, des époux ayant de faibles ressources peuvent attendre avant d’officialiser leur désunion, même s’ils se sont séparés physiquement », ajoute Anne Solaz. « Ce sont généralement les femmes qui décident de partir, ajoute la psychothérapeute Florence Beuken. Or, elles diffèrent ou renoncent parfois à leur projet pour des raisons financières. » En effet, le divorce pèse plus lourd sur les finances des femmes, qui perdent jusqu’à 19 % de leurs revenus contre 2,5 % pour les hommes. « On divorce moins, mais surtout mieux, complète Florence Beuken. Et, ça aussi, c’est une bonne nouvelle ! » Les divorces pour faute, qui représentaient 40 % des séparations avant 2005, ne sont plus que 8 % en 2013. L’animosité baisse donc… pour le mieux-être de tous !
Vers une nouvelle vision de l’amour et du couple
L’amour est-il de nouveau en passe de rimer avec toujours ? Emmanuel Ballet de Coquereaumont, psychopraticien, spécialiste du couple, nuance : « En fait, on se sépare aujourd’hui avant de se marier. Beaucoup de relations meurent très vite, dès la première épreuve rencontrée. »
Les tempêtes se traversent ensemble
Les temps changent et l’amour avec. Si, avant les années 1970, beaucoup de couples restaient ensemble au prix parfois d’un grand ennui ou de réelles souffrances, et si le divorce a offert aux conjoints la liberté de partir quand l’un ou l’autre était malheureux, aujourd’hui, on dispose de nombreux outils pour « sauver » son couple ou, en tout cas, essayer quand l’amour bat de l’aile. « J’ai mis du temps à trouver mon conjoint, confie Véronique, 46 ans. Je n’allais donc pas céder à la première tempête ! Après cinq ans de mariage et deux enfants, nous avons traversé une crise et j’ai voulu faire appel à une médiatrice conjugale. Mon mari a joué le jeu et cette personne, extérieure et neutre, nous a permis de mettre des mots sur nos rancoeurs pour retrouver nos sentiments initiaux. Nous sommes toujours ensemble et heureux. » Florence Escaravage, spécialiste du coaching amoureux et fondatrice du cabinet Love Intelligence, appelle cela la révolution « postromantique ». « Aujourd’hui, on est un peu revenus de certains idéaux sur l’amour, celui selon lequel on doit être en parfaite harmonie avec l’autre, par exemple, ou que l’amour doit toujours être intense. On accepte mieux les hauts et les bas de la relation amoureuse et conjugale. De même l’infidélité n’est plus forcément une cause de rupture : désormais, si l’un est trompé, il cherche davantage à comprendre ce qu’il s’est passé et quelle est son éventuelle part de responsabilité dans ce “coup de canif au contrat”. De manière
générale, les conjoints se sentent davantage “coresponsables” de la relation, ce qui n’était pas le cas il y a dix ou quinze ans. Par conséquent, quand une épreuve survient, les membres du couple réagissent avec moins de précipitation et essayent de discuter pour envisager toutes les solutions avant de se séparer. » précise-t-elle.
La bienveillance est au centre du couple
Emmanuel Ballet de Coquereaumont ajoute : « Les couples qui durent ont compris qu’une relation mérite des efforts, des compromis, des discussions… Et, ça encore, c’est une bonne nouvelle car il était naïf de penser qu’on s’entendait forcément merveilleusement tout le temps. Le couple est une longue aventure à partir du moment où l’on accepte de découvrir toutes les facettes de l’autre. Et tant qu’il y a de la bienveillance des deux côtés, l’aventure peut durer longtemps ! » La baisse des divorces ne traduit donc aucune résignation ni acceptation d’être malheureux en amour, mais plutôt une meilleure acceptation de l’autre avec ses qualités et ses failles. « Aujourd’hui, la vie est plus dure et l’amour devient une valeur refuge », conclut Florence Escaravage. « On se sent fragilisé dans le monde tel qu’il est et on ne veut pas gâcher la stabilité apportée par son couple comme on a pu le faire il y a vingt ans quand la vie était plus facile et que l’on était peut-être plus insouciant. » Comme si la mode du “développement durable” avait aussi gagné les relations conjugales !