Maxi

TÉMOIGNAGE « Échanger entre femmes donne du courage et de l’espoir ! »

Malgré treize fausses couches, Laetitia n’a pas renoncé à devenir mère. Pour aller de l’avant, elle a décidé de partager son quotidien avec d’autres femmes. Sans regrets !

- Laetitia

’est incroyable tous ces messages que l’on m’envoie. Hier encore, j’ai reçu une dizaine de félicitati­ons. Pourquoi moi ? Parce que je parle sur un site de mes joies et de mes peines à devenir maman. Certaines lectrices m’ont dit que je portais la voix de toutes les femmes traversant les mêmes douloureus­es épreuves de la vie. En parlant de mes difficulté­s à devenir mère, j’ai compris combien le sujet était encore tabou. Pourtant, quelle honte y a-t-il à ne pas réussir à fonder une famille ? Pour ma part, j’essaie d’avoir un enfant depuis près de cinq ans. J’ai arrêté la pilule en 2014 et je suis tout de suite tombée enceinte. Malheureus­ement, à quatre semaines de grossesse, j’ai commencé à saigner. Je suis allée aux urgences et on m’a dit qu’il n’y avait… plus rien. Très vite, je me suis sentie très seule. C’est très violent et on ne sait plus où on en est. Ce sont pourtant des choses qui arrivent à plein de monde. Or, les médecins n’en parlent jamais… Avec mon ancien compagnon, j’ai vécu onze débuts de grossesse et perdu tous ces bébés entre deux et quatre semaines. À la huitième tentative, j’ai entendu un battement de coeur. J’ai cru que c’était la bonne mais, à l’échographi­e suivante, il s’était arrêté. Une sage-femme m’a juste demandé froidement si je voulais l’évacuer par médicament ou par curetage. J’ai entendu des phrases très dures. Certains vont vous dire que ce n’est qu’une cellule, que ce n’est pas si grave, qu’on pourra vite recommence­r. À un moment, j’ai commencé à être jalouse des femmes enceintes. Je ne me reconnaiss­ais plus et cela m’a fait mal. Il faut alors du temps pour accepter le bonheur des autres. Mon couple, avec mon ex-compagnon, n’y a pas survécu. Par chance, avec mon conjoint actuel, c’est plus facile. C’est un ancien collègue qui connaissai­t mes difficulté­s et qui avait déjà deux enfants quand je l’ai rencontré. Après deux nouvelles fausses couches, une biopsie a finalement révélé, récemment seulement, la mauvaise qualité de mes ovules. Cela explique beaucoup de choses. J’ai toujours écrit ce que je ressentais. Depuis le début de mes fausses couches, je tenais une sorte de journal. J’y notais ce qui se passait au jour le jour, mes émotions, etc. Cela m’a beaucoup aidée à faire mon deuil après chaque épreuve. C’était comme si j’écrivais à mes « enfants ». Assez naturellem­ent, j’ai eu l’idée de partager ce que j’avais vécu. J’ai voulu ouvrir un blog avec l’idée d’échanger avec d’autres personnes. Finalement, j’ai créé la page « Mes Étoiles Et Mon Futur* » sur Facebook. J’avoue que le but premier était juste d’écrire, écrire et encore écrire, pour ne jamais oublier ces épreuves et rendre mes « bébés » réels. En treize fausses couches, j’ai pu seulement en voir trois aux échographi­es. Même si les autres étaient trop précoces, ils ont aussi existé pour moi. Mais, très vite, après avoir commencé à discuter avec d’autres femmes, je me suis rendu compte que je les aidais aussi énormément. C’est comme si je levais un tabou, alors que cela arrive à tant de monde ! Rien qu’autour de moi, à peine ai-je commencé à parler de mes soucis que des personnes de mon entourage m’ont avoué avoir perdu elles aussi un bébé. Ma page commence à être connue et j’ai déjà reçu des centaines de messages privés et des milliers de commentair­es de soutien. Grâce à mes mots, certaines femmes sont parvenues à exprimer sur ce qu’elles ressentaie­nt. D’autres, désoeuvrée­s, y ont trouvé des conseils après que les médecins leur ont annoncé une fausse couche. Les aider m’a remplie de bonheur. Avoir pu soulager une infime partie de leur peine et les accompagne­r un peu pour la suite m’a fait énormément de bien : j’ai eu l’impression de continuer mon combat pour être maman, tout en aidant les autres femmes à avancer elles aussi. Aujourd’hui, j’en suis persuadée : soudées, nous y arriverons ! Si j’ai un message, c’est qu’il faut continuer à se battre car beaucoup de solutions existent. Il ne faut surtout

Tenir un journal m’a aidée à faire mon deuil après chaque épreuve

pas se renfermer sur soi mais accepter tous les soutiens possibles pour surmonter une fausse couche. En même temps, je m’adresse aussi aux médecins, car j’en ai rencontré beaucoup. Il y a des praticiens adorables et d’autres très durs. Je sais que ce sont des métiers difficiles et qu’ils doivent se protéger pour ne pas absorber la détresse des patients. Cependant, leur manque d’empathie nous fait souvent du mal alors qu’il suffirait parfois juste d’un seul mot gentil ou d’un geste dans ces moments pour aller un tout petit peu mieux.

Je me souviens d’une infirmière qui m’avait juste caressé le bras et cela avait tout changé.

J’en profite aussi pour passer un message aux femmes qui n’ont pas de soucis pour être maman : la France est en pénurie de dons d’ovocytes. Si vous en avez la possibilit­é, faites un don et, par ce geste, vous nous ferez le plus beau des cadeaux. En attendant, les couples doivent attendre entre trois à cinq ans, car nous manquons de donneuses. Beaucoup, comme moi, doivent se résoudre à se rendre à l’étranger pour gagner du temps. Aujourd’hui, je vais plutôt bien. Je suis allée en République tchèque pour un don d’ovocytes et, au moment où je vous parle, je suis enceinte de quelques semaines. Je suis certes angoissée, mais confiante. Ce n’est que le début et je reste forcément prudente, vu toutes les fois où je suis tombée enceinte. Mais je pense sincèremen­t que je tiens ma chance. Ensemble, il faut y croire…

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