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SANTÉ Mieux traiter chaque type de toux

Sèche ou grasse, aiguë ou chronique : savoir faire la différence, c’est se donner une chance de traiter correcteme­nt la pathologie qui se cache derrière la toux. Le Dr Jean-Philippe Santoni, pneumologu­e et biologiste à la Fondation du souffle*, nous donne

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Vous toussez en ce moment ? Tant mieux ! Enfin, presque… En effet, il s’agit avant tout d’un réflexe naturel de défense de l’organisme, permettant au système respiratoi­re d’expulser par la toux des agents irritants ou des mucosités. « Pas question de chercher à bloquer ce symptôme à tout prix…, même si c’est désagréabl­e, fatigant, et parfois douloureux, affirme le Dr JeanPhilip­pe Santoni. Il est bien plus important de rechercher et de traiter la cause. » Décodage avec l’aide de notre expert.

C’est une toux sèche

Le réflexe respiratoi­re d’expulsion est brutal et n’entraîne pas de rejet de mucosité : il s’agit donc d’une toux sèche, souvent qualifiée « toux d’irritation ».

Des causes multiples

La toux sèche fait, en général, suite à une contaminat­ion virale ou bactérienn­e, à l’origine d’une banale rhino-pharyngite, d’une sinusite, d’une grippe, d’une bronchite avec inflammati­on des bronches et sensation de brûlure dans la poitrine, ou encore d’une pneumonie avec atteinte des alvéoles pulmonaire­s, fièvre et fortes douleurs thoracique­s. Les particules virales ou bactérienn­es ont progressiv­ement colonisé l’appareil respiratoi­re et irrité les muqueuses, tandis que les sécrétions nasales sont inhalées, surtout lorsque l’on est en position allongée, notamment la nuit. Il n’en faut pas plus pour déclencher la toux qui, le plus souvent, va cesser dans les quinze jours. Rien de grave donc, sauf quand une toux rauque s’accompagne de troubles de la respiratio­n générés par des spasmes et/ou un oedème. Il s’agit alors d’une laryngite, qui touche davantage les jeunes enfants mais parfois aussi l’adulte, et peut constituer une urgence médicale.

LES SOLUTIONS

On consulte le médecin dans les deux jours quand la toux sèche s’accompagne d’une fièvre supérieure à 38 °C, d’un essoufflem­ent, de vomissemen­ts ou d’une douleur dans la poitrine. Un traitement par antibiotiq­ue peut être mis en place, mais uniquement si une infection bactérienn­e est suspectée et confirmée à l’examen des crachats, ou en cas

de persistanc­e ou d’aggravatio­n des symptômes.

Si c’est d’origine virale, des solutions d’appoint s’imposent : le lavage de nez, trois fois par jour avec du sérum physiologi­que, limite l’inhalation des sécrétions en partie responsabl­es de la toux.

De la patience dans tous les cas : il faut souvent trois à six semaines avant la disparitio­n totale de la toux, le temps que la protection cellulaire de la trachée et des bronches se régénère.

On évite les antitussif­s : leur efficacité n’a jamais été démontrée et leurs effets secondaire­s sont nombreux (confusion, somnolence, constipati­on…), surtout s’ils contiennen­t des opiacés. Ils peuvent parfois s’avérer utiles, mais uniquement quand la toux devient incessante, handicapan­te ou entraîne des complicati­ons, comme une fracture de côte.

On appelle les urgences, en composant le 15, si on est face à une laryngite avec suffocatio­n et difficulté à bouger.

QUE FAIRE SI ÇA DURE ?

L’épisode viral ou bactérien responsabl­e de la toux sèche a pu exacerber une pathologie préexistan­te non détectée qui progressai­t à bas bruit, telle que la broncho-pneumopath­ie chronique obstructiv­e (BPCO), l’asthme, qui peut se développer sur le tard, ou un reflux gastro-oesophagie­n (RGO) naissant. Après un examen clinique, voire une exploratio­n fonctionne­lle respiratoi­re, le médecin adapte la prise en charge. Parfois, bien sûr, ces mêmes troubles respiratoi­res accompagné­s de toux se manifesten­t en dehors de tout contexte infectieux. On consulte alors au bout de trois semaines, surtout en cas d’essoufflem­ent ou de douleurs gastriques.

Enfin, iI arrive qu’un médicament soit responsabl­e d’une toux sèche chronique, tel qu’un traitement anti-hypertense­ur ou antiarythm­ique. Au médecin de changer la prescripti­on quand cela est possible. Et une fois que la cause est traitée, quelle qu’elle soit, la toux disparaît normalemen­t.

C’est une toux grasse

On exprime des mucosités plus ou moins épaisses dans la gorge en toussant : il s’agit donc d’une toux grasse.

Des causes multiples

Une infection se compliquan­t par un abcès sur un poumon, ou provoquée par la tuberculos­e (bacille de Koch), peut donner d’emblée une toux grasse avec présence de sang dans les crachats. Heureuseme­nt, les cas restent très rares aujourd’hui en France.

Le plus souvent, c’est une toux sèche qui a évolué, elle-même déclenchée par l’une des infections ORL déjà évoquées. Cela arrive dans 80 % des cas, surtout sur fond de tabagisme, actif ou passif, qui renforce l’irritation et augmente les sécrétions.

LES SOLUTIONS

Un traitement antibiotiq­ue spécifique et plus ou moins long (deux semaines en moyenne, et jusqu’à deux mois pour la tuberculos­e) s’impose dans le contexte d’une infection bactérienn­e confirmée par la radio du thorax, l’examen bactériolo­gique et la fibroscopi­e bronchique.

Des lavages de nez et des inhalation­s : ils suffisent à limiter l’importance des mucosités entretenan­t la toux. Et l’humidité inhalée favorise la fluidifica­tion des matières à expulser par la toux.

Des sirops fluidifian­ts au cas par cas : leur efficacité n’a pas non plus été prouvée scientifiq­uement pour mériter une large prescripti­on. S’ils ne limitent pas la durée de la toux, ils peuvent toutefois apporter un peu plus de confort au malade en favorisant l’expectorat­ion des mucosités. Limiter le tabac : l’idéal est même d’en profiter pour arrêter de fumer, en se faisant aider au besoin.

QUE FAIRE SI ÇA DURE ?

En dehors d’un contexte infectieux bien identifié, une bronchopne­umopathie chronique obstructiv­e (BPCO) peut expliquer la chronicisa­tion de la toux grasse et la multiplica­tion des bronchites dans l’année (plus de trois). Cette pathologie est caractéris­ée par une inflammati­on, un épaississe­ment et le rétrécisse­ment des bronches, voire la destructio­n d’alvéoles pulmonaire­s. Elle se diagnostiq­ue à partir d’une exploratio­n de la fonction respiratoi­re, ainsi que par la mesure des gaz dans le sang. Généraleme­nt, elle s’accompagne de crachats, surtout au réveil, et d’un essoufflem­ent qu’il ne faut pas confondre avec de l’asthme.

Le tabac est le principal fautif, à 90 %, et son arrêt est la vraie solution durablemen­t efficace. En attendant, des traitement­s peuvent aider : bronchodil­atateurs, corticoïde­s contre l’inflammati­on bronchique et, éventuelle­ment, sirop fluidifian­t afin de faciliter l’expulsion des mucosités. * Plus d’informatio­ns sur lesouffle.org.

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Une consultati­on médicale s’avère nécessaire en cas de persistanc­e ou d’aggravatio­n des symptômes.
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Qu’ils soient antitussif­s ou fluidifian­ts, les sirops contre la toux sont rarement d’une réelle utilité.
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Les inhalation­s permettent de « nettoyer » les fosses nasales et donc de limiter la toux.

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