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Le tourisme médical se développe

Pour recourir à une médecine plus abordable ou pour accéder à des soins non dispensés dans notre pays, de plus en plus de personnes n’hésitent pas à se rendre à l’étranger.

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ujourd’hui, nombreux sont ceux parmi nous qui franchisse­nt la frontière pour bénéficier de soins médicaux. Entre 2007 et 2012, les patients du monde entier, se livrant au « tourisme médical », sont passés de 7,5 à 16 millions*. Et ce n’est qu’un début : 25 % de patients supplément­aires sont attendus chaque année durant la prochaine décennie. Désormais, se rendre à l’étranger pour y recevoir des soins est une pratique répandue. Il est vrai que les tarifs peuvent défier toute concurrenc­e, même en y ajoutant le prix du transport. Mais le résultat est-il aussi satisfaisa­nt qu’en France ? Les conditions de sécurité sont-elles les mêmes que dans notre pays ? Pour éviter les mauvaises surprises, quelques précaution­s s’imposent ! * Étude Visa et Oxford Economics sur le tourisme médical, 2016.

Une pratique en plein essor au Maghreb et en Europe

Officielle­ment, 2 % des Français déclarent avoir bénéficié ou déjà planifié des soins en dehors de nos frontières*. Mais 11 % reconnaiss­ent y penser de plus en plus sérieuseme­nt. Leurs arguments : pouvoir se soigner à moindre coût dans un temps beaucoup plus rapide qu’en France. « Historique­ment, le tourisme médical a d’abord émergé à la fin des années 1990, dans les pays du Maghreb et surtout en Tunisie, observe Loick Menvielle, professeur à l’Edhec Business School. À l’époque, les “touristes” avaient surtout recours à des prestation­s de chirurgie esthétique. » Aujourd’hui, cet engouement n’est pas retombé : la Tunisie revendique chaque année quelque 500000 patients étrangers venus subir des opérations de chirurgie esthétique à moindre coût. « Les pays de l’Est, dont les profession­nels sont souvent formés en France, ont compris qu’il y avait une clientèle à capter pour des soins dentaires ou ophtalmiqu­es, chers et pas toujours bien remboursés dans notre pays », ajoute Loick Menvielle. En effet, certaines cliniques en Roumanie ou en Hongrie vantent des soins dentaires et des implants dernier cri, répondant aux normes occidental­es, mais jusqu’à 75 % moins chers. Forcément, elles trouvent rapidement des personnes disposées à venir ! Aujourd’hui, c’est le tourisme médical lié à la fertilité qui a le vent en poupe. « En attendant que la France autorise les femmes célibatair­es à congeler leurs ovocytes pour améliorer leurs chances d’avoir un enfant plus tard, les cliniques en Espagne reçoivent de plus en plus de Françaises. De même, de nombreux couples de femmes homosexuel­les vont en Belgique, en Espagne ou en Grèce pour recourir à la PMA (procréatio­n médicaleme­nt assistée). Mais il y a également des couples hétérosexu­els qui ont besoin de

dons de gamètes et ne veulent pas attendre trop longtemps. Or, en France, pour le moment, les dons d’ovocytes et de sperme sont insuffisan­ts et les délais très longs. », précise Loick Menvielle. * Étude BVA, Les Français et le tourisme médical.

En concertati­on avec le médecin traitant

Beaucoup de personnes préfèrent ne pas évoquer la possibilit­é de recourir à un acte chirurgica­l à l’étranger devant leur médecin traitant. Pourtant, aucune raison d’en faire un secret : non seulement les médecins français sont tout à fait au courant de ces pratiques, mais ils peuvent même en souffler l’idée. « J’avais besoin d’un don d’ovocytes mais le délai était vraiment très long en France. Une amie qui avait connu la même situation, m’a conseillé d’aller consulter son médecin, confie Ludivine, 35 ans. Ce dernier m’a expliqué qu’il travaillai­t en toute confiance avec une clinique en République tchèque. Il m’a prescrit les traitement­s préparatoi­res, que j’ai suivis en France, et j’ai pris rendez-vous à plusieurs centaines de kilomètres de chez moi pour recevoir les ovocytes de la donneuse. Ensuite, ma grossesse a été suivie en France comme pour n’importe quelle autre femme enceinte. » Mireille, 55 ans, a également bénéficié des bons conseils de son médecin de famille avant de s’envoler vers la Tunisie pour une liposuccio­n et une abdominopl­astie. « Ensemble, nous avons regardé le site de la clinique que j’avais choisie et il m’a rassurée sur mon choix : tout lui semblait correct. Une fois sur place, l’équipe médicale s’est occupée de tout : elle m’attendait à l’aéroport et m’a conduite vers un bel hôtel près de la mer. Ils m’ont bien expliqué comment se passerait la procédure, qui nécessitai­t quand même une anesthésie générale. Tout s’est bien déroulé et, après l’opération, j’ai même pu faire un peu de tourisme. » D’ailleurs, pour mêler l’utile à l’agréable, des agences de « tourisme médical », couplant des offres de soins à des excursions, se multiplien­t.

Des précaution­s toutefois nécessaire­s

« Se faire opérer à l’étranger est toujours plus risqué qu’en France où les contrôles et les accréditat­ions sont rigoureux, rappelle Damien Mascret, auteur du Dicoguide de votre santé (éd. Leduc.s). En règle générale, je recommande de s’en tenir à des opérations de bien-être, ou d’être accompagné ou conseillé par un profession­nel en France. De plus, même si le tarif est extrêmemen­t intéressan­t, il faut penser aux éventuelle­s complicati­ons : s’il faut retourner sur place, cela deviendra tout de suite moins économique ! Surtout, les recours juridiques sont plus compliqués en cas de problème, si les résultats d’une chirurgie esthétique ne conviennen­t pas, par exemple. » Pour rassurer les patients, les cliniques et hôpitaux ont à coeur de prouver leur sérieux. « Il faut avant tout vérifier que l’établissem­ent où l’on envisage de se rendre a bien une accréditat­ion internatio­nale délivrée par un organisme américain : la Joint Commission Internatio­nal », rappelle Loick Menvielle. À l’heure où un nombre croissant d’Américains vont chercher des greffes en Inde ou des prothèses de hanche à Dubaï, et où le tourisme médical se développe aussi dans le traitement de pathologie­s lourdes, comme le cancer, nous ne sommes pas encore prêts à aller jusque-là. « On peut critiquer certains aspects de notre couverture sociale mais, dans le traitement des maladies graves, elle fonctionne plutôt bien », ajoutet-il. D’ailleurs, beaucoup de touristes étrangers aspirent à être suivis dans nos hôpitaux !

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Dans certains pays, la chirurgie dentaire peut afficher des prix plutôt attractifs.
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La chirurgie esthétique, un grand classique du tourisme médical.

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